Un Bastion de l'Élite    Les candidats appelés à respecter l'éthique des pratiques politiques    L'Algérie victorieuse !    Campagne de sensibilisation destinée aux femmes rurales    Loin de ses potentialités, l'Afrique doit améliorer sa gouvernance    Les colons profanent la Mosquée Al-Aqsa    L'occupation marocaine empêche trois euro-députés d'entrer dans la ville sahraouie occupée    RDC : Le groupe terroriste M23 fait obstacle aux aides humanitaires    Football : Clôture de la formation de la licence CAF A pour les anciens internationaux    MCA – Orlando Pirates d'Afrique du Sud aux quarts de finale    Coupe du monde 2026-Qualif's : Botswana-Algérie le 21 mars à 15h    Arrestation de trois narcotrafiquants    Saisie de 100 g de cannabis et une quantité de psychotropes à Oued Rhiou    Assurer un diagnostic précoce    Rencontre scientifique avec des experts de l'Unesco    Installation des commissions    L'écrivain Yasmina Khadra remercie le président de la République pour ses félicitations    Journée nationale du Chahid: 21e finale de la course des facteurs    Cardiologie pédiatrique: tenue à Alger du 3e séminaire international sur le cœur de l'enfant    Sahara occidental: une répression marocaine croissante face aux observateurs internationaux    G20: Attaf s'entretient à Johannesburg avec nombre de ses homologues    7e Conférence du PA et des présidents des Assemblées et des Parlements arabes: Boughali au Caire    Le ministre de la Poste et des TIC préside une rencontre avec les responsables du secteur    Djezzy inaugure son "Espace Solutions" à Dar El Beida    Athlètisme/Championnat national hivernal: nouveau record national pour Bendjemaâ    Open Africain d'Alger: les juniors algériens dominent la 1e journée    Journée nationale de la Casbah: activités artistiques et expositions en février à Alger    Saadaoui reçoit plusieurs organisations syndicales agréées    Palestine occupée: Lazzarini dénonce les violations sionistes du droit fondamental à l'enseignement    Sonelgaz: L'APM décerne à Rome le prix "Excellence pour la Méditerranée" à M. Adjal    Le dangereux terroriste abattu jeudi à Médéa identifié    Réception de la majorité des projets de réhabilitation de la Casbah "fin 2025 et en 2026"    Centres de formation au profit des citoyens concernés par la saison du hadj 2025    Grand Prix Sonatrach 2025: Azzedine Lagab (Madar Pro-Cycling) s'impose devant ses coéquipiers    Installation des commissions des Prix du président de la République "Ali Maâchi" et "Cadets de la culture"    «La justice sera intransigeante contre tout abus !»        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Le mouvement national commence à prendre forme en Algérie»
Gilles Manceron. Historien
Publié dans El Watan le 21 - 06 - 2016

En quoi le Front populaire a-t-il marqué l'histoire coloniale en Algérie, six ans après le centenaire de la colonisation ?
Le Front populaire est une occasion manquée de remise en cause de la politique coloniale par la gauche française. Si on se reporte aux tentatives, avant 1914, de Jaurès, de contester le colonialisme, on est tombés, au contraire, dans les années 1920 et 1930, par une certaine acceptation par la gauche du fait colonial, avec cependant une contestation autour de l'exposition coloniale de 1931, qui émanait des milieux communistes, qui avaient soutenu l'Etoile nord-africaine, à ses débuts, mais qui s'en sont éloignés au moment du Front populaire.
C'est un moment-clé de rupture entre, d'une part, l'idée anticoloniale, portée par l'ENA, d'une indépendance des pays du Maghreb, et, d'autre part, la gauche française, y compris communiste, qui, sous l'influence de l'Union soviétique, assume en 1935 un tournant lors du déplacement de Pierre Laval à Moscou. L'Union soviétique, notamment Staline, arrête alors de prêcher l'anticolonialisme - si je puis dire- et accepte l'empire français. Le Front populaire, bien que l'Etoile nord-africaine adhère au rassemblement, va finalement dissoudre l'association.

Pourquoi le congrès musulman échoue-t-il, alors que, malgré sa diversité, il est un moment rare, pour ne pas dire inédit et unique de regroupement des forces algériennes organisées ?
Ce congrès musulman est effectivement un temps de mobilisation. On peut dire qu'en Algérie autour de l'idée nationale, c'est un moment précurseur parce que, jusque-là, le mouvement national était surtout présent dans l'immigration. Il commence à prendre forme en Algérie avec le congrès musulman.
C'est un moment décisif, mais il va être mis fin à la mobilisation par le choix du gouvernement de renoncer à toute remise en cause du système colonial, y compris le plan dit Blum-Violette, qui élargissait un peu la citoyenneté des indigènes. Ce plan a été avorté. Ce qui est certainement le plus important et insuffisamment cité, c'est la dissolution de l'Etoile nord- africaine en janvier 1937, alors que ce parti avait adopté une orientation nettement antifasciste face à l'Italie et l'Allemagne et s'associait au Front populaire dans l'idée d'une citoyenneté pleine et entière en Algérie. Le Front populaire va dissoudre l'ENA, obligeant les militants à créer le PPA en mars 1937 à Nanterre. Cette rupture annonce quelque peu l'attitude de la gauche française en mai 1945 huit ans plus tard, voire en mars 1956 avec les pleins pouvoirs à l'armée dans la guerre en Algérie, votés par Guy Mollet.

Peut-on parler d'un forcing des milieux coloniaux en Algérie pour bloquer toute évolution ?
Il y a lors du congrès musulman une mobilisation populaire qui se heurte à des intérêts coloniaux qui voyaient mal un processus pouvant mener vers la citoyenneté de l'ensemble de la population et donc une indépendance à terme. D'où la réponse très ferme des milieux coloniaux qui ont bloqué toute réforme et ont fait obstacle. Dans ce milieu colonial, ceux qui seront obéissants à la France de Pétain, la France de Vichy, qui se met en place dès la fin des années 1930, avec les ligues fascistes comme les Croix de feu et autres, prolifèrent à Oran, dans l'Ouest algérien, Constantine, etc. Donc un régime colonial très conservateur qui réagit au mouvement populaire.

Les ruptures dont vous parlez du fait du Front populaire ne traçaient-elles pas le destin de l'Algérie ?
D'une certaine façon. Le Front populaire témoigne d'une incompréhension de la gauche française dans ses différentes composantes : SFIO, mais aussi le Parti communiste, qui renonce à l'anticolonialisme de ses débuts et souscrit à la dissolution de l'ENA. L'humanité se réjouit et le ministre de l'Intérieur socialiste dit, lors d'un débat parlementaire, que c'est avec l'assentiment des communistes que l'ENA est dissoute. La gauche méconnaît et refuse la main tendue par le mouvement algérien qui, pourtant, a partagé l'antifascisme et les aspirations de la gauche française.
D'une certaine manière cela signifiait-il qu'on ne pouvait pas passer de l'antifascisme à l'anticolonialisme ?
La gauche française en a été incapable. Comme la France libre dans les années 1940, qui connaîtra quelques débats sur ce thème pendant la période de la résistance, notamment autour du général de Gaulle à Londres, avec quelques personnalités comme André Philip ou la philosophe Simone Weil, qui disent leur anticolonialisme, affirmant que si nous nous sommes battus pour la liberté de la France, nous devons souscrire aux peuples coloniaux qui demandent leur propre indépendance. Ils sont minoritaires et le Conseil national de la résistance dans son programme (ndlr : 27 mai 1943) ne retient pas l'aspiration des peuples coloniaux. Il y a là aussi une occasion qui a été laissée de côté et va conduire aux guerres coloniales après la libération (ndlr : en Indochine d'abord, puis en Afrique du Nord).

En raccourci, peut-on dire que cette période est en quelque sorte un laboratoire, en ce sens qu'en Algérie, le Front populaire, comme en France, est un temps d'ébullition et de liberté d'expression culturelle, politique et médiatique, on pense notamment à la publication de journaux comme Alger Républicain ou Oran Républicain ?
Le Front populaire favorise une effervescence, une liberté d'expression, une liberté associative en Algérie. Les communistes y contribuent avec la création du Parti communiste algérien (PCA) à partir de la Fédération d'Algérie du PCF. Il sera peu autonome, jusqu'en 1955-56. La tutelle du PCF sur le PCA demeure. Mais malgré tout, le Front populaire a représenté un premier cadre d'expression, même si la majorité des forces métropolitaines ont mal compris l'aspiration algérienne, comme ils ne la soutiendront pas en mai 1945 et en 1954.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.