L'anonymat était immérité. L'oubli résonne tel un affront. L'indifférence décidément trop irrespectueuse pour une vie de travail, de labeur et de ferveur à l'égard d'un pan de notre culture ancestrale. Abderrezak Fakhardji a tiré sa révérence, l'âme touchée par une ingratitude suprenante. Il n'est pas excessif de dire que la culture avait subi un coup de boutoir aussi vain qu'inutile. Mentor et érudit, Abderrezak Fakhardji a frappé à la bonne porte en se mettant sous l'aile de Mohamed Bentefahi, musicologue réputé, décédé en 1944. Comme pour reconnaître son talent, Abderrezak Fakhardji aura à diriger l'orchestre de musique classique à Radio-Alger. Il fut un digne récipiendaire. Mais l'artiste Abderrezak Fakhardji n'était pas uniquement le musicien au mérite éprouvé. Ses qualités d'homme d'écoute, courtois et affable lui attirérent respect et considération. C'était un maître au sens le plus complet du terme. A l'indépendance, Abderrezak Fakhardji poursuivit sa tâche non sans quelques difficultés. Selon Ahmed Serri, musicologue de renom, la reprise fut laborieuse. Cela n'affecte pas outre mesure Abderrezak Fakhardji parce que la flamme résiste, l'engouement intact, le dévouement jamais pris en défaut. C'est le propre des artistes qui se mettent au service exclusif de l'art et de la culture nationale. On fit tout de même appel à lui lors des festivals de musique classique de 1966, 1968 et 1972. On essayait peut-être de rectifier le tir, corriger l'erreur. La besogne se poursuivra. Malgré les handicaps, les défauts d'aiguillages, les impairs commis à l'adresse de la pratique culturelle. Vaste débat qui trouvera un jour des réponses adéquates pour situer les déficits et les torts. Le souffle persista avec la création d'Al Fakhardjiya, en 1981. C'est comme un témoignage concret de ne pas baisser les bras. Le 12 janvier 1984, Abderrezak Fakhardji disparaissait. Cet artiste de grande envergure aura œuvré près d'un demi-siècle au service de la culture avec dévouement et fidélité, humilité et passion. Un destin enviable.