L'Algérie, dont l'économie est fortement dépendante des hydrocarbures, doit mettre œuvre des «réformes essentielles» pour sortir de l'addiction pétrolière et diversifier son économie, selon Jean-François Dauphin, chef de mission du Fonds monétaire international (FMI) pour l'Algérie. «Le pays a devant lui une occasion exceptionnelle de se concentrer sur la mise en œuvre de ces réformes essentielles et de refaçonner ainsi son économie sur un modèle plus pérenne, plutôt que de rester tributaire de réserves pétrolières qui risquent d'être épuisées d'ici vingt ans», a souligné M. Dauphin, également chef de la division Maghreb du département Moyen-Orient et Asie centrale du FMI, dans un entretien accordé au blog de l'institution financière. Pour lui, l'économie algérienne aborde actuellement «un tournant décisif» car depuis le milieu de l'année 2014, le repli des cours du pétrole «fait craindre pour les perspectives économiques de cette nation tributaire de l'or noir». «Pour mieux saisir les effets de ce choc, il faut se rappeler que le secteur des hydrocarbures a représenté plus de 95% des exportations, deux tiers des recettes budgétaires, et un tiers du PIB», a analysé M. Dauphin, relevant en revanche que le pays avait mis en place des «volants de sécurité sous forme d'épargne budgétaire, de réserves internationales, et d'un faible niveau d'endettement, ce qui lui a permis dans un premier temps d'absorber le choc». La mise en œuvre d'un certain nombre de réformes, dont une diminution progressive des subventions énergétiques «coûteuses et inéquitables», et l'adoption un nouveau code des investissements demeure pour le moment insuffisant. «Le pays peut encore réduire sa dépendance à l'égard des recettes pétrolières et diversifier son économie», a-t-il jugé. Lors d'un récent voyage en Algérie en juillet, Jean-François Dauphin a plaidé en faveur d'«un modèle de croissance plus pérenne». «Le conseil le plus important que nous avons prodigué aux autorités lors de notre récent voyage est que, même si l'adaptation à ce choc est difficile, non seulement elle est nécessaire, mais elle constitue aussi une occasion de promouvoir un modèle de croissance plus pérenne. Cet aménagement doit reposer sur deux piliers : le premier est un rééquilibrage budgétaire visant à rétablir la santé de l'économie en résorbant les déficits public et extérieur, et le deuxième consiste en de vastes réformes structurelles, des mesures qui contribuent à libérer le potentiel du secteur privé, à diversifier l'économie et à favoriser durablement une plus forte croissance et davantage d'emplois», a-t-il suggéré. Dans le détail, le FMI a recommandé aux autorités l'amélioration du climat des affaires en allégeant les lourdeurs bureaucratiques, le renforcement de la gouvernance économique, la transparence, la concurrence, l'amélioration de l'accès au financement et le développement des marchés de capitaux et l'ouverture de l'économie aux échanges commerciaux et aux investissements étrangers. Il est aussi question d'améliorer le fonctionnement du marché du travail tout en assurant la protection «appropriée» des travailleurs, et garantir la bonne adéquation entre les qualifications assurées par les systèmes d'enseignement général et professionnel, et les compétences recherchées par les entreprises. «Mais pour cela, il faut les bonnes incitations et un climat propice au développement du secteur privé. Les autorités sont parfaitement conscientes de la nécessité de cette évolution et ont très récemment adopté une stratégie pour recadrer le modèle de croissance du pays», a conclu M. Dauphin.