Une bande d'incompétents.» Ce sont les termes que plusieurs athlètes engagés dans ces JO de Rio de Janeiro ont utilisés en substance, ou du moins suggérés, pour qualifier leur tutelle, à savoir la Fédération algérienne d'athlétisme (FAA). L'attaque engagée dans la matinée d'hier par Taoufik Makhloufi, juste après sa médaille d'argent sur le 1500 m, à l'égard des responsables du sport algérien — «tous les responsables du sport algérien», pour reprendre les termes de l'athlète, mais en évitant soigneusement de citer le moindre nom et la moindre structure — était du reste prévisible, lui qui ne s'est pas gêné, lundi dernier, pour s'attaquer à la FAA après avoir décroché sa première médaille d'argent de ces Olympiades, sur 800 m. Ce jour-là, Makhloufi a tiré à boulets rouges sur les responsables de la Fédération d'athlétisme. Dans une déclaration à El Watan, moins d'une heure après cette médaille d'argent, retranscrite fidèlement dans un papier portant le titre «Makhloufi règle ses comptes», le désormais ex-champion olympique du 1500 m disait textuellement : «Cette médaille est une réponse à mes détracteurs. Moi, je n'ai rien à prouver, je suis venu pour le podium et j'ai terminé deuxième derrière le grand David Rudisha. Il y a des personnes qui feignent connaître l'athlétisme, mais ne font que bluffer les gens et les induire en erreur. Ces personnes écument les plateaux télé et non les terrains. Elles ne parlent que pour parler et si elles travaillaient vraiment sur le terrain, l'Algérie aurait obtenu bien plus qu'une médaille en athlétisme.» Keddar donne le ton Deux jours auparavant (mardi matin), c'était le jeune Salim Keddar (1500 m) qui tirait la première balle en direction de la FAA. Eliminé dès le premier tour, le jeune coureur se lâche et s'attaque à la Fédération. Une déclaration, encore une fois faite à El Watan, publiée sous le titre «Keddar dénonce», où il regrette : «Les minima 2016 imposés dans un premier temps par la Fédération m'ont beaucoup perturbé, du moment qu'officiellement j'étais qualifié pour les JO en ayant réalisé les minima exigés par l'IAAF l'année dernière. Au lieu de me concentrer sur les Jeux, je me suis retrouvé perturbé à l'idée d'aller chercher encore ces minima.» Et d'ajouter : «J'ai rejoint Rio le 9 août, après avoir bouclé ma préparation en France en compagnie de Makhloufi et de notre coach Philippe Dupont. Mais j'ai été obligé de payer le billet Paris-Rio pour disputer ces JO et c'est Makhloufi qui m'a aidé en réglant la note de sa poche. C'était ça ou rater le déplacement au Brésil, puisque la Fédération avait exigé que je paie moi-même le billet ou que je rejoigne Rio de Janeiro le 27 juillet dernier, avec le reste de la délégation, alors que j'étais en pleine préparation à Font-Romeu, en France, ce qui m'aurait privé de près de deux semaines de stage à la veille des JO.» Autre épreuve, même discipline et même accusation. Le décathlonien Larbi Bourrada, qui évitera soigneusement d'évoquer le moindre problème avant son entrée en lice dans le décathlon, se lâchera à son tour jeudi soir, juste après la fin des épreuves, avec sa 5e place et son nouveau record d'Afrique. Dans l'entretien qu'il a accordé à El Watan, sans même qu'on lui pose la question, comme ce fut le cas avec Makhloufi lors de ses deux sorties, il prend la parole pour dénoncer à son tour : «On manque de beaucoup de choses nécessaires et incontournables pour pouvoir gagner des médailles. La préparation des JO ne se fait pas en trois ou quatre mois. Il faut une très longue saison et surtout deux à trois ans de préparation. Des stages, des compétitions et plein d'autres choses. A mon avis, quand un athlète a des dispositions pour faire de bons résultats, il devrait bénéficier de tous les moyens nécessaires pour gagner des médailles.» Avant de s'attaquer à la Fédération, suite à une question : «C'est en effet le rôle d'une fédération de satisfaire toutes ces exigences… Ce n'est pas à l'approche des JO qu'on demande aux athlètes de se préparer. Les gens au sein de la Fédération sont en principe des enfants de la discipline et connaissent bien les exigences du haut niveau. On est vraiment loin, à ce rythme, de gagner des médailles aux JO, malgré la présence de talents.» Trois athlètes, trois attaques en quatre jours, dénotant une certaine préméditation et une stratégie de dénonciation à l'égard de la FAA. Le clou a été la bombe lâchée par Makhloufi, dans la matinée de samedi.