Le e-paiement permet de développer une approche inclusive de l'économie informelle, créer un écosystème favorisant l'émergence d'un tissu de start-up et de PME innovantes. En quelques semaines, l'Exécutif a changé de position sur la modernisation des moyens de paiement, un concept monétique et financier longtemps confiné dans sa plus simple expression, faute de volonté politique. Il tente, cependant, aujourd'hui d'ouvrir la porte du e-paiement aux grands facturiers, prédisposés à offrir des solutions digitales à leurs clients détenteurs de cartes interbancaires. Ainsi, sur la question du paiement à distance, la posture du gouvernement semble évoluer, tant il s'agit de réduire la pression d'un phénomène socioéconomique : l'usage excessif du cash. Bien qu'une importante partie de la population ne soit pas bancarisée, des services alternatifs sont possibles, dont les comptes de monnaie électronique associés à un numéro mobile que les opérateurs de téléphonie peuvent proposer. D'autant que l'introduction de la téléphonie mobile de quatrième génération joue en faveur d'une numérisation à plus grande échelle de l'économie. Testé dans plusieurs pays, ce service permet à la population non bancarisée d'accéder à une panoplie de solutions digitales, dont le transfert d'argent et le paiement des factures. Pour ainsi dire, le lancement officiel du e-paiement, prévu dès aujourd'hui, vise, en premier lieu à montrer la voie et, ensuite, à libéraliser plus largement l'usage des moyens de paiement modernes. Il y a quelques mois, le gouvernement se montrait excessivement réticent à l'idée de dématérialiser les moyens de paiement. Face à la prolifération pathologique de l'informel, à l'usage excessif du cash et aux statistiques effarantes sur les fortunes en monnaie fiduciaire en circulation en dehors du réseau bancaire, le gouvernement a probablement reçu, entre temps, l'expertise des spécialistes. Ainsi, il semble se rendre à l'évidence selon laquelle le développement des modes de paiement électronique porte les enjeux et les avantages sur lesquels repose l'impératif d'une économie numérique. Pour donner une première réponse à cet enjeu, les grands facturiers, les banquiers, les organismes financiers et monétiques ainsi que leurs ministères de tutelle se réuniront aujourd'hui pour plaider les avantages du e-paiement. Sur le terrain purement économique, le e-paiement permet de développer une approche inclusive de l'économie informelle, créer un écosystème favorisant l'émergence d'un tissu de start-up et de PME innovantes, développement de nouveaux relais de croissance, etc. e-paiement pour les grands facturiers Dans une économie où 50% des transactions se font dans les circuits invisibles qui, selon d'autres statistiques, accaparent 1700 milliards de dinars de la monnaie fiduciaire, l'inclusion de cette économie informelle se pose en besoin pressant. La création d'une monnaie électronique et le développement du commerce à distance pourraient être l'une des clés de voûte pour mieux contrôler la traçabilité de tous les contribuables. Depuis plusieurs années déjà, la recherche d'une solution pour l'économie souterraine patine faute d'une volonté politique et d'une adhésion de tous les acteurs concernés. Le e-paiement a été l'une des pistes sur lesquelles plusieurs pays africains et sud-américains ont travaillé pour réduire la pression du cash et son usage. Le gros chantier du e-paiement et du e-commerce était jusqu'ici presque irréalisable tant il était question de faire bouger un système bancaire qui évoluait à pas de tortue, de le déplacer sur le terrain de l'innovation et d'en découdre avec le vieux mammouth de l'administration aux réflexes pour le moins moyenâgeux. Les blocages dont a souffert l'avant-projet de loi sur le e-paiement et le e-commerce dans les travées des différentes administrations en sont une parfaite illustration. Le lancement fragile, dès aujourd'hui, du e-paiement, dédié uniquement aux grands facturiers dans sa phase inaugurale, en attendant l'évolution législative tant espérée, intervient dans un contexte de diminution des liquidités bancaires. Lequel contexte plaide, aujourd'hui plus que jamais, pour une inclusion des activités informelles et leur bancarisation. La création d'une monnaie électronique en est une solution parmi d'autres. Elle permet au moins la transparence à travers la réduction du transactionnel et la lutte contre certains fléaux, dont la fausse monnaie.