Acculé par la nécessité de réduire le déficit budgétaire et développer au mieux la fiscalité et les finances locales, le gouvernement a pris la décision d'instaurer, dans le projet de loi de finances 2017 (PLF 2017), une nouvelle hausse des taxes dont, essentiellement, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). L'article 23 du PLF 2017 prévoit, en effet, un relèvement du taux de TVA de deux points de pourcentage, soit de 7 à 9% pour le taux réduit et de 17 à 19% pour le taux normal. Deux conséquences majeures découleront inéluctablement de cette hausse : une augmentation généralisée des prix des produits de consommation, localement fabriqués ou importés, et, par ricochet, un rebond de l'inflation. Le pouvoir d'achat des ménages, déjà effrité, va encore baisser et le taux d'inflation, dépassant actuellement les 6%, atteindra facilement des niveaux de 8%, comme le prévoit beaucoup d'observateurs. Le gouvernement justifie le relèvement de la TVA par la nécessité de venir en aide aux collectivité locales, puisque «les recettes de ces taxes leur seront affectées afin d'améliorer leur situation financière». Ce relèvement devrait rapporter au budget de l'Etat pas moins de 100 milliards de dinars, affirment encore certains analystes. En fait, la TVA représente 35% des revenus communaux fiscaux, soit la deuxième ressource après celle provenant de la taxe sur l'activité professionnelle (TAP) qui est de 58% des ressources et a fait l'objet d'une réduction intervenue cette année. «Pas tellement méchant» Selon un bilan établi par le ministère des Finances, le produit des impôts divers sur affaires (TVA, TIC...) s'est chiffré, en 2015, à 803,2 milliards de dinars contre 765,2 milliards de dinars en 2014. La TVA, à elle seule, imposée aux importations a rapporté 467 milliards de dinars, alors que celle imposée à la consommation intérieure a été de 265,3 milliards de dinars. Il faut rappeler à ce propos que la fiscalité ordinaire du pays est induite, en moyenne à 20%, par la TVA à l'importation. Les droits de douanes prélevés à l'importation représentent 20% de ces importations. Le cumul de la TVA à l'importation et des droits de douanes prélevés à l'importation représentent 39% des ressources fiscales ordinaires. Selon les experts, malgré le relèvement de la TVA à 19%, le gouvernement doit maintenir le volume des importations à un certain niveau qui permet d'assurer ces ratios. Cependant, si le renflouement des caisses met les finances locales dans une situation moins contraignante qu'elle ne l'est actuellement, l'augmentation de la TVA entraînera, en revanche, une hausse générale des prix des produits de large consommation, ainsi que ceux des services comme l'électricité, l'eau, les communication téléphoniques et autres. Pour le président du Forum des chefs d'entreprise (FCE), Ali Haddad, «augmenter la TVA de deux points n'est pas tellement méchant». Il affirme à ce propos que «les membres du Forum n'auront aucune réserve à se soumettre au rehaussement de cette taxe». Le président de la Confédération nationale du patronat algérien (CNPA), Mohand Saïd Naït Abdelaziz, estime, quant à lui, qu'il serait «à la limite de bonne guerre que le gouvernement recoure à ce genre de solution dans une situation où il est nécessaire d'équilibrer nos finances», mais toute l'attention doit être portée sur les répercussions que cette hausse peut avoir sur «la production nationale». Selon lui, «il faudrait plutôt instaurer des taxes ou en augmenter d'autres sur les produits de luxe, de façon à ce que ces augmentations ne touchent pas l'ensemble des produits». Tout en insistant sur la nécessité de «faire la part des choses pour préserver le pouvoir d'achat des citoyens aux revenus faibles», le président de la CNPA souligne que ces augmentations ne doivent pas «pénaliser l'acte de production». «Alors que l'économie manque déjà de vigueur, la hausse ne ferait que ralentir encore la croissance. En touchant la production nationale, ce relèvement risque de compliquer les choses. Il doit nécessairement concerner les produits importés, notamment ceux n'étant pas de première nécessité», précise-t-il. Du côté de l'Association de défense des droits des consommateurs (Apoce) on insiste également sur l'impact négatif que peut avoir le relèvement de la TVA sur le pouvoir d'achat des citoyens. Selon le président de cette association, le docteur Mustapha Zebdi, toute hausse de la TVA ou dez prix de produits ou services se répercutera sur la capacité des ménages à subvenir à leurs besoins. «On ne peut que défendre la stabilité des prix et nous ne pouvons accueillir avec joie ces taxations et ces hausses», souligne le Dr Zebdi. Et d'ajouter : «Il y a des produits de première nécessité dont les prix doivent continuer à être subventionnés par l'Etat, jusqu'à ce que les conditions de levée de ces subventions soient bien mises en place, à savoir l'élaboration du fichier national des familles nécessiteuses et la mise ne place d'une grille de subventions directes au profit de ces familles.» Quant aux produits secondaires, de luxe ou superflus, l'Apoce affirme «ne trouver aucune gêne à ce qu'il y ait des taxations supplémentaires pour renforcer le Trésor public et diminuer les importations, d'autant que le pays traverse une période financièrement difficile». Mieux encore, Mustapha Zebdi affirme avoir demandé, à maintes reprises, l'instauration de dispositions imposant aux importateurs de «financer l'importation de ces produits sans recourir aux devises des banques algériennes».