Un sondage d'opinion, commandé par un site d'information algérien, indique une évolution favorable des Français sur la question des excuses à l'Algérie par la France pour les crimes de la colonisation. C'est du jamais vu en France, et pourtant on en a peu parlé. Alors que la classe politique de l'hexagone qui ne veut rien entendre de la nécessité historique de reconnaître les exactions commises par l'armée française et, à plus longue échéance, de la colonisation, un sondage réalisé par l'institut français Ifop pour le site algérien en ligne TSA, démontre que cinquante-quatre ans après l'indépendance, les Français sont plus partagés qu'on ne le pense. Ainsi, une majorité de 52% de personnes interrogées (représentatives de la population française) se montre favorable à des excuses de l'Etat français pour «les meurtres et exactions commis par l'armée française durant l'occupation de l'Algérie». Avec, cependant, des nuances. Ainsi, près des deux tiers (62%) des personnes âgées de 65 ans et plus y sont opposées, contre un peu plus d'un tiers des jeunes de moins de 25 ans (36%). Cela signifie que le passage des générations peut être synonyme d'apaisement. Le positionnement politique, comme on s'y attend, est relativement clivant : les sympathisants du FN (75%) et des Républicains (62%) sont massivement opposés à tout acte de repentance, alors que 75% des gens marqués à gauche sont plutôt favorables aux excuses. De même, l'opinion française soutient massivement le rapatriement en Algérie des restes mortuaires de militants algériens morts durant la guerre. 88% y sont favorables alors que l'affaire traîne en longueur. Enfin, l'indépendance de l'Algérie est perçue comme un événement bénéfique aux deux pays. Plus des deux tiers des Français estiment que la fin de la colonisation a été une «bonne chose» aussi bien pour l'Algérie (69%) que pour la France (71%). Là aussi, les personnes âgées de 65 ans et plus étant moins nombreuses (57%) que la moyenne (69%) à penser que l'indépendance de l'Algérie a été une bonne chose pour ce pays. Sur le site français Atlantico, Jérôme Fourquet, directeur du Département opinion publique de l'Ifop, estime que ces résultats doivent être considérés malgré tout comme la preuve d'un clivage entre la droite et la gauche, même si les petits pas du souvenir engagés par les Présidents ces dernières années engagent toute la nation : «Certes, la guerre d'Algérie est terminée depuis désormais un demi-siècle. Elle n'en demeure pas moins plus fraîche que la seconde guerre mondiale dans les esprits. Elle affleure toujours régulièrement dans le débat : les relations franco-algériennes sont toujours un sujet éminemment sensible. Il y a quelques mois, elles constituaient d'ailleurs l'objet d'une passe d'armes entre Alain Juppé et Nicolas Sarkozy, dans le cadre de la primaire de la droite. Il s'agissait alors de reconsidérer le traitement privilégié des demandes de visa de ressortissants algériens, jusqu'à présent justifiée par l'histoire commune entre nos deux pays». Il faut dire que le «passé ‘‘rétrocolonial'' est encore très présent dans les esprits et les mémoires collectives». Si paradoxalement ce sondage a été peu commenté sur les médias en France, il a aussi été généralement boudé en Algérie.