Certes, les saisons passent mais l'imperméable demeure toujours intact. L'imper reste. Le trench-coat en est la preuve concrète. Cet impeméable légendaire a été inventé par l'Anglais Thomas Burberry. En 1870, dans sa boutique de confection de Basingstoke (Hampshire), ce passionné de tissu a mis au point une étoffe solide, impérméable à la pluie et quasiment infroissable, adaptée au climat chagrin de son pays. Il a eu l'ingéniosité d'utiliser des fils ultrafins, recouverts d'une potion secrète pour justement empêcher l'humidité de pénétrer, puis de les tisser très serrés afin d'en parfaire l'imperméabilité. Dès la fin du XIXe siècle, Burberry commence à tailler, dans sa matière déposée sous le nom de gabardine, des vestons et des manteaux pour aller à la chasse, des capotes pour les premières automobiles et aussi des tentes pour l'armée... Durant la seconde guerre des Boers, de 1899 à 1902 en Afrique du Sud, les officiers britanniques se parent d'un grand manteau, enrichi d'un bavolet dans le haut du dos afin d'empêcher l'eau de ruisseler le long du corps ; et de deux autres sur le devant pour amortir le recul de la crosse du fusil, calée au creux de l'épaule. La version définitive du trench-coat a été finalisée pour la Première Guerre mondiale. Les soldats britanniques vont se battre dans les tranchées (trench en anglais). Afin qu'ils aient tout à portée de main, le vêtement se dote d'une ceinture à anneaux pour y suspendre des grenades sur le devant et un sabre dans le dos. Le bas des manches est resserré par une bride au poignet pour que le froid ne pénètre pas et, dans le même but, une mentonnière amovible est ajoutée sous le col pour calfeutrer le cou au niveau de l'échancrure... De toute son histoire, le costume militaire ne connaîtra pas d'autre invention aussi poussée. C'est pourquoi les soldats anglais n'ont pas rendu leur trench une fois l'armistice sonné. Il constituait l'habit idéal pour « braver le crachin, leur Albion brillant rarement sous le soleil ». D'autres marques dont Mackintosh, Barbour, Ramosport reconduisent l'idée. En 1924, Burberry se distingue, ainsi, de ses concurrents en doublant ses modèles de tartan Nova Check. Il s'agit d'un tissu écossais dont le rythme des carreaux et les couleurs ont valeur de blason au Royaume-Uni. L'actuel directeur artistique de Buberry estime qu'aujourd'hui, le trench est un vêtement à la fois unique et démocratique. « Je le compare souvent au jean. Il sied aussi bien à un homme qu'à une femme, à une jeune fille branchée qu'à un gentleman conservateur. » Il est à noter, par ailleurs, que le cinéma a contribué à lui donner un statut d'icône vestimentaire. De sa première apparition à l'écran sur le dos de Gary Cooper dans Today we live en 1935 à Brad Pitt dans Ocean's Twelve l'an dernier, en passant par Humphrey Bogart (Casablanca, 1942), Meryl Streep (Kramer contre Kramer, 1979) ou Michael Douglas (Wall Street, 1990). « Cet ex-uniforme militaire profitera du charisme, de la classe et du chic des plus belles têtes d'affiche. » Depuis l'avènement des créateurs dans les années 1970, ils sont si nombreux à le réinventer chaque saison, qu'il est devenu une pièce phare du prêt-à-porter. R. M.