La crise diplomatique s'installe entre l'Algérie et le Maroc. Deux jours après l'incident diplomatique survenu dans la lointaine Saint-Vincent-et-les-Grenadines, la crise s'envenime et les responsables des deux pays sont à bout de nerfs. Pour illustrer la gravité de la situation, l'Algérie a placé la barre très haut. Elle a non seulement convoqué l'ambassadeur du Maroc à Alger pour exiger des excuses, mais le diplomate marocain a été reçu par le ministre des Affaires maghrébines, africaines et des Etats de la Ligue arabe, Abdelkader Messahel. Le communiqué du ministère des Affaires étrangères, relayé par l'agence APS, évoque le harcèlement dont a été victime une diplomate algérienne. «Ces provocations contre la diplomate algérienne ont amené les autorités de Saint-Vincent et-les-Grenadines à lui assurer une protection personnelle rapprochée», a soutenu le communiqué du MAE. M. Messahel a signifié au diplomate marocain le caractère «inacceptable d'un tel comportement contraire aux règles élémentaires de bienséance et attentant à la courtoisie et aux us et coutumes diplomatiques». La veille, le ministère marocain des Affaires étrangères a convoqué le chargé d'affaires de l'ambassade d'Algérie à Rabat. Hier, le ministre marocain des Affaires étrangères a également réclamé des «excuses» à l'Algérie. Les Marocains mettent en avant une «agression» dont aurait été victime un de leurs diplomates lors d'une réunion, mercredi à Saint-Vincent-et-les-Grenadines. Les autorités algériennes ont carrément démenti cette information et indiqué que les allégations marocaines sont «sans fondement». «Les informations rapportées par des médias marocains (...) au sujet d'une prétendue agression physique qui aurait été commise par un diplomate algérien de haut rang sur un membre de la délégation marocaine en marge de la tenue à Saint-Vincent-et-les-Grenadines du séminaire régional organisé par le comité spécial de décolonisation, le C24, sont des informations inventées, infondées, fausses et mensongères et sans aucun lien avec la réalité», a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Abdelaziz Benali Cherif. «Un membre de la délégation algérienne (...) a fait l'objet, depuis le début des travaux du séminaire, d'un harcèlement permanent et a même été victime de tentatives d'agression de la part d'éléments de la délégation marocaine, ce qui a amené les autorités du pays organisateur à désigner des agents pour assurer sa sécurité», a encore expliqué le responsable algérien. Les accusations marocaines sont intervenues, étrangement, à l'issue d'une réunion dont les résolutions sont favorables aux revendications des Sahraouis. Selon l'APS, les participants au séminaire régional des Caraïbes sur la décolonisation, organisé par le Comité des 24 de l'ONU, ont appelé l'Organisation des Nations unies à accélérer le processus de décolonisation du Sahara occidental, en réclamant la tenue d'un référendum d'autodétermination du peuple sahraoui. Un acte de diversion Au moment où le Maroc porte l'estocade à l'Algérie, des dizaines de milliers de Marocains manifestent dans plusieurs régions du Rif pour protester contre leurs conditions de vie. La protestation devient de plus en plus importante et les autorités marocaines semblent éprouver du mal à répondre à la demande dans cette région frondeuse. Faire diversion semble donc être une bonne option pour le makhzen qui a besoin d'un ennemi extérieur. L'objectif est donc double : faire oublier cette crise interne et tenter de «ressouder» l'unité du royaume, mise à mal par les autonomistes du Rif berbère. Ces derniers se réclament beaucoup plus de la «république» du Rif que du palais royal de Rabat. L'autre problème que le palais cherche à cacher est son permanent désaveu dans le dossier du Sahara occidental. Notre voisin de l'Ouest a tout tenté. Mais les organisations internationales continuent de considérer le territoire sahraoui comme non autonome, donc candidat à l'autodétermination.