Seul dans sa chambre, cloué sur son lit à l'hôpital de Koléa, Hadj Lourari Hamid, plus connu sous le nom de Kaci Tizi Ouzou (75 ans), déjà atteint d'une maladie chronique, en dépit du mal qu'il traîne avec lui depuis son admission au service de la chirurgie, était content de notre visite inattendue. Ce monument vivant, natif de Béni Ourtilène, avait envie de tout « déballer » sur son vécu, en sa qualité de militant de la cause nationale avant l'indépendance du pays, d'une part, et, d'autre part, sur ses, travaux dans le domaine culturel après le 5 juillet 1962. Ce n'est pas par hasard si l'artiste est invité à chacune des commémorations par les hautes autorités du pays. La dernière en date était celle de la célébration du 52e anniversaire du déclenchement de la Révolution. La sympathie du personnel d'un hôpital dépourvu d'équipements et de technologie n'a jamais guéri les patients. « Peut-être à travers votre message mon fils, nous dit-il avec émotion, j'espère que le premier magistrat du pays entendra mon appel de détresse. Au lieu d'être abandonné dans cet hôpital durant des jours sans résultat, il me suffit d'une prise en charge de 10 jours dans un hôpital à Paris pour que ma maladie soit guérie. Il n'est pas encore trop tard. Dites-moi mon fils, moi qui me suis sacrifié pour mon Algérie durant ma jeunesse et ayant fait rire des dizaines de millions d'Algériens durant des décennies, soit au total 55 ans de ma vie, je ne trouve pas quelqu'un qui puisse me faire rire aujourd'hui », s'interroge-t-il. Son regard ne pouvait pas dissimuler sa tristesse et son inquiétude. Arrivant difficilement à se retourner dans son lit, Aâmi Kaci s'est mis à pleurer. Une image que personne ne pouvait imaginer. Pour notre artiste, il y a parfois des circonstances qui exigent des prises en charge à l'étranger pour les malades algériens. « Est-ce que je ne mérite pas un traitement pour être guéri définitivement de ce mal qui me ronge », s'exclame-t-il. Aâmi Kaci n'a quand même pas perdu son humour pour fustiger les opportunistes qui continuent à sucer le pays. « J'ai horreur et je dénonce ces olympiques, ces scientifiques et ces atlantiques qui font du mal à l'Algérie et à son peuple, tout en s'enrichissant sur le dos des patriotes qui se sont sacrifiés pour que notre pays reste debout », lance-t-il avec amertume. Il reconnaît néanmoins qu'il existe toujours des enfants du pays qui reconnaissent les artistes qui se sont dévoués pour la patrie. Il nous cite à titre d'exemple les hommages qui lui ont été rendus par le Festival du rire de Bou Ismaïl en 1999, par la wilaya de Sétif, et bien d'autres, mais il remercie une fois encore le président Bouteflika pour lui avoir payé le pèlerinage. « S'il vous plaît, nous précise-t-il, faites le savoir à vos lecteurs et je vous le jure que ce n'est pas avec l'argent du contribuable que nous avons accompli le hadj », conclut-il. Le mépris et l'indifférence de certains responsables lui font très mal. Aâmi Kaci replonge dans le silence. Les médicaments prescrits ne servent qu'à atténuer la douleur, en attendant la délivrance. Son cri sera-t-il entendu ?