Malgré l'amertume ressentie et justifiée d'un artiste qui a donné sa vie, son sourire et son rire à son public et à son pays, il dit quand même être satisfait de son parcours, Les Editions Anep viennent de lever le voile sur la mystérieuse vie d'un grand homme, d'un talentueux artiste, comédien, musicien et homme de théâtre qui, comme beaucoup de ses amis artistes, n'a pas eu la vie facile. Dans Ammi Kaci ou les témoignages de Kaci Tizi Ouzou, Saïd Bouterfa, nous raconte les secrets qu'a bien voulu nous dévoiler Hamid Lourari, plus connu sous le nom de Kaci Tizi Ouzou. Né en 1931 à Ighil Oufela, dans la région de Beni Ourtilane, Ammi Kaci a eu une enfance difficile et malheureuse entre une maman qui devait travailler pour nourrir ses enfants et un papa qui devait bosser malgré son âge avancé. Il avoue sans aucune honte, avoir galéré entre Belcourt, Salembier, La Glacière et Maison-Carrée à El Harrach; avoir cherché le reste d'une soupe à la sortie d'une caserne, avoir fait de la boxe pour gagner quelques pièces, avoir arrêté ses études pour cirer des chaussures et avoir fait plein de petits boulots pour survivre. En 1946, il entre dans la troupe de Réda Bey, dirigée par Mahboub Stambouli et fait, à partir de là, de nombreuses «tentatives pour devenir célèbre», comme il le dit si bien. C'est avec une certaine nostalgie -qu'on arrive à lire entre les lignes- qu'il raconte des souvenirs avec Abderrahmane Aziz, Hsissen, Tayeb Lakhal, El Hadj Ababssa, Noura, Saloua, dans des endroits qu'il se remémore avec plaisir comme le café Malakoff, café du Sport, café Tontonville, cinéma l'Odéon, Dounyazed, bar du Vélo, et plein d'autres spectacles qu'il anime avec Moufdi Zakaria, Mohamed Touri ou autres noms connus. A 20 ans, au déclenchement de la guerre de Libération, il quitte Alger pour la France et là, une autre galère l'attend. D'abord employé dans une usine, puis coiffeur, il entre en clandestinité au FLN et sera à maintes reprises arrêté, écroué dans des conditions atroces et traité de la façon la plus abominable. Marié à une Française qui l'a toujours soutenu, il rentre enfin au pays à l'indépendance et continue sa galère artistique entre, la radio - Chaîne II pendant 17 ans, l'émission «Saha leftornwoune», à la télévision où il anime des émissions «Irtidjel», des sketches Le Restaurant avec Mohamed Hilmi, Krikèche et Djaâfer Beck, ce sont d'autres souvenirs qui surgissent comme celui encore de la khaïma de la Foire internationale d'Alger qu'il anime pendant six ans ou encore des soirées passées en compagnie de Dahmane el Harrachi, Hacène El Hassani ou Khelifi Ahmed. Malgré l'amertume ressentie et justifiée d'un artiste qui a donné sa vie, son sourire et son rire à son public et à son pays, malgré le manque de considération, la non-reconnaissance et parfois le mépris et l'indifférence affichés chez certains, Hamid Lourari, alias Kaci Tizi Ouzou, se dit quand même être satisfait de son parcours, remercie, dans cet ouvrage, beaucoup de personnes qui l'ont aidé et il «espère pour mon pays que je porte au fond de mon âme tout le bonheur du monde et je demande à ceux qui en ont la responsabilité et au peuple algérien de bien réaliser et prendre conscience que si la terre est proche, combien il est dur d'atteindre le ciel», et de conclure que «la culture d'un pays, c'est sa force et un pays sans culture, c'est un pays qui se meurt». Alors suivons Ammi Kaci dans sa sagesse et que vive notre culture pour que vive notre pays. A bon entendeur...