Au cours de l'année 1951, les partis politique algériens s'évertuent à déterminer une stratégie pour soulager les populations du poids lourd de l'indigence et de la misère. L'UDMA, dirigée par Ferhat Abbès, le parti communiste représenté par Larbi Bouhali secrétaire général, l'Association des oulémas présidée par Bachir El Ibrahimi et le Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD) représenté par le secrétaire général Lahouel Hocine ont multiplié les démarches et organisé des regroupements autour d'une revendication commune. Une plateforme de doléances était présentée à la puissance coloniale, aux termes de laquelle on pouvait relever entre autres l'accès au travail dans l'administration, le droit au logement et une couverture sociale contre les épidémies. Pour sa part, le MTLD prônait le recouvrement de la souveraineté nationale par des moyens pacifiques. Les partis coalisés considéraient que cette action commune et délibérée constituée une salutaire et bénéfique dans le développement politique, social et culturel de la société autochtone. Antérieurement, le PPA/MTLD avait initié une campagne d'agitation durant laquelle des mots d'ordre sous forme d'inscription murales telle « Algérie libre vivra », des distributions de tacts, des meetings volants et la diffusion de la presse partisane, sensibilisant militants et populations sur la situation affligeante du sous-développement qui caractérise les masses populaires. Le parti avait mobilisé ses structures pour porter le message auprès de la société qu'il fallait mobiliser et structurer dans les différentes organisations, syndicats des dockers, des boulangers, des marchands de légumes. Un effort était consenti pour conforter l'organisation féminine celle des étudiants, celle des scouts musulmans algériens, ainsi que le secteur sportif et les medersa libres du parti MTLD. Cette mobilisation a eu des résultats positifs, puisque dans certains quartiers de la capitale, précisément à La Casbah, la population était dans son ensemble organisée et structurée. C'est dans cette ambiance et le constat établi que la masse est sensibilisée que le mouvement des Amis du manifeste et de la liberté est lancé en 1944. Au cours de l'année suivante, il y eut des réjouissances et des manifestations populaires pour fêter la victoire des alliés sur le nazisme. Le colonialisme français, qui venait de se dépêtrer du marasme qu'il a enduré de 1939 à 1945 trouva des forces pour organiser à sa manière le remerciement des Algériens qui l'ont aidé à triompher des Allemands. Ce fut la tuerie de 1945 dans la région de Sétif, Guelma et Kherrata, alors que les Algériens manifestaient pacifiquement pour une reconnaissance de leurs droits, le colonialisme a réagi sauvagement par une répression sans bornes sur des populations désarmées. Cet acte barbare allait changer le cours de l'histoire des colonisés sachant que l'impérialisme français « est un mauvais élève ». Il ne céderait pas aux revendications pour le développement de la société afin d'accéder par des réformes à l'indépendance. Ils considèrent que l'Algérie est un département français et que les habitants de ce pays, les indigènes du deuxième collège, seront toujours des serviteurs des conquérants de race supérieure. C'est ainsi qu'après cette rude épreuve, le parti avait mûri l'idée d'opter pour la conception révolutionnaire en créant une structure paramilitaire sous la dénomination de l'OS, organisation spéciale, lors du congrès de 1947. Cette structure, qui est parallèle et autonome dans ses activités, constituera un réseau à travers le territoire national, ses éléments furent formés à la guérilla pour préparer le déclenchement armé. Malheureusement, cette organisation fut démantelée par une grande partie suite à une tentative manquée d'enlèvement d'un de ses responsables soupçonnés de défaillance. Ce fut une chasse à l'homme à travers le territoire national, ceux qui échappèrent aux rafles furent soustraits de toutes activités par le parti qui chargera Ben Boulaïd d'accueillir les responsables fugitifs dans les Aurès, région qui a pu échapper au déferlement policier. Suite à cette catastrophe, le parti décide de dissoudre la structure de l'OS en 1951 considérant que celle-ci a échoué dans sa mission. En 1952, il y eut une tentative par quelques responsables recherchés qui avaient échappé aux arrestations de la police française, notamment Boudiaf qui était l'un des membres de l'Etat major de l'OS, soutenu par ses subordonnés Ben Abdelmalek Ramdane, Ben Boulaïd Mustapha ainsi que Didouche Mourad et Ben M'hidi Larbi. Il avait essayé sans résultat d'influencer la direction du parti, de la nécessité de revoir la structure de l'OS sur de nouvelles bases en même temps engager des contacts et pourparlers avec les frères tunisiens et marocains pour une éventuelle coordination afin de déclencher en commun une lutte armée au niveau maghrébin. Mais hélas, l'opération ne s'est pas concrétisée. La Tunisie qui était un protectorat avait hésité de s'engager avec une Algérie de statut de département français. Déstabiliser la politique coloniale au Maghreb et en Afrique Durant cette période, des événements ont éclaté à la suite de revendications pour obtenir l'autonomie intérieure. La réaction brutale du Pouvoir réactionnaire français a été très vive et une répression s'est abattue sur le peuple tunisien. Il avait procédé à la déchéance du prince Moncef Bey de la régence et l'arrestation du leader politique Habib Bourguiba le 18 janvier 1952. Cela a obligé le destour parti nationaliste à organiser de grandes manifestations en passant à l'action directe par des attentats meurtriers par des commandos fedayine. Cette situation a créé une convergence pour déstabiliser la politique coloniale dans la région du Maghreb et en Afrique où de grandes manifestations ont été organisées à Madagascar. Au Maroc, la population s'est soulevée après la déposition du roi Mohammed V le 20 août 1953. Le parti politique de l'Stiklel, dirigé par Allel El Fassi, organisa des manifestations populaires appuyées par des actions armées. Malgré ce bouillonnement, le parti du MLTD est préoccupé beaucoup plus par la crise interne au parti que les événements qui se déroulent dans la région. Il décide la tenue d'un congrès en avril 1953. Cette importante rencontre consistait à établir un bilan de ces activités et étudier la conjoncture internationale. Parmi les principales décisions prises lors de ces assises, on relèvera entre autres l'application d'un centralisme démocratique et la continuité d'une politique réformiste par la participation active aux élections municipales d'avril 1953. Dans ses résolutions, le parti ne fait pas mention de la perspective révolutionnaire et occulte la démarche pour l'engagement dans le processus de la préparation de la lutte armée. Une des stratégies essentielles philosophique et théorique utilisées par les responsables du parti en direction de la base militante, surtout que la conjoncture politique du Maghreb s'y prêtait et l'effet provoqué par la victoire dans le combat des Vietnamiens sur l'armée française à bien Diên Biên Phu. Cette ambiance générale à mis le militant dans de bonnes dispositions psychologiques, surtout qu'il avait acquis une formation dans la guérilla, il n'attendait que le signal pour s'investir. A la suite de ces données, l'occasion est saisie par Messali pour extérioriser son mécontentement en dénonçant la bureaucratie justifiant son opposition après le limogeage et la mise à l'écart de ses plus proches collaborateurs de la direction du parti, en l'occurrence Ahmed Mezghena et Moulay Merbah. Il est contrarié aussi par la nouvelle gestion d'un centralisme démocratique avec une direction collégiale, le privant de sa prise directe sur la direction du parti. La rupture avec le comité central est déclarée lors d'une conférence organisée par la fédération de France initiée par Messali. La direction du parti est critiquée et les membres du comité central sont dénoncés. M. Boudiaf, qui était responsable au niveau de la direction de la fédération de France du MLTD, est très éprouvé par le marasme au sein du parti, il vit dramatiquement cet événement. Il craignait l'effritement à l'intérieur du pays des structures de l'organisation. Il rentre en mars 1954 en Algérie avec l'espoir de regrouper les militants avec lesquels il était resté en relation et avec surtout les militants recherchés qui étaient dans les structures paramilitaires. Il lance un mouvement pour prêcher le neutralisme après avoir constaté le glissement vers la scission du parti en deux fractions messalistes et centralistes. Il s'accorde avec deux responsables qui détiennent des postes importants dans la hiérarchie du parti, en l'occurrence le chef de l'organisation Dekhli Bachir et le contrôleur général Bouchbouba Ramdhane. Cela lui permit de pénétrer au sein des structures pour mener une campagne de sensibilisation auprès de la base pour le maintien de l'unité des militants dans les rangs du parti et faire pression pour obliger les antagonistes de s'expliquer devant un congrès et les amener à s'engager dans le processus du déclenchement armé. Avec l'accord de ces deux responsables et avec le poids et le charisme de Ben Boulaïd, ils créent le Comité révolutionnaire pour l'unité et l'action (CRUA). Ils éditent un bulletin d'information intitulé le « Patriote », trois mois après cette démarche, Boudiaf avec Ben Boulaïd réunirent à El Madania 22 éléments le 25 juin 1954 pour faire le point sur la crise du parti et d'étudier la situation politique en général pour enclencher le processus révolutionnaire par la lutte armée. En juillet 1954, des contacts sont engagés avec la délégation extérieure au niveau du bureau du comité du Maghreb arabe au Caire. Ils convainquirent les trois membres du bureau qui sont Ben Bella, Aït Ahmed et Khider à soutenir cette troisième force pour dépasser la crise et passer à l'action directe. Parallèlement, ils conclurent l'accord avec les responsables maquisards de la Kabylie, pourparlers qui étaient engagés depuis mai 1954, les auteurs de cette initiative sont pour les neutralistes Didouche Mourad et Aouamrane pour les maquisards. Krim rejoint le comité des 5, il est considéré comme le principal responsable dans la région. Avec l'approbation de Didouche, Ben M'hidi et Bitat, ils décidèrent en commun de tenir une réunion le 23 octobre 1954 à Raïs Hamidou pour la formation d'un état-major de la Révolution. Ces acteurs se mettent d'accord pour le principe d'une gestion collective avec à la tête un coordinateur. Ils arrêtent un programme par la publication de la plateforme politique qui est la proclamation du 1er novembre du FLN, l'appel au peuple avec le sigle de l'ALN. Ces deux documents traduisent la constitution de deux structures l'une politique et l'autre militaire. Un découpage géographique en 6 zones qui deviennent par la suite wilayas après le Congrès de la Soummam en 1956. Les structures relatives à la capitale se composent de deux cellules coiffées par Bitat chef de la zone 4. La cellule logistique est composée de cinq responsables pour des tâches différentes : Accueillir et orienter les responsables venant de l'intérieur et de l'extérieur du pays ; assurer les liaisons, les relais, les boîtes aux lettres et prévoir des gîtes pour abriter les recherchés ; s'occuper de l'édition et de la diffusion du bulletin d'information et des tracts. La seconde cellule dirigée par Bouadjadj Zoubir est constituée de groupes de choc armés qui sont chargés de commettre des actions armées spectaculaires pour frapper l'opinion publique et créer une psychose dans le milieu des réactionnaires colonialistes. L'effectif de ses groupes est de 29 membres, y compris les responsables des 7 groupes. En plus de ces effectifs, 5 autres sont chargés de diverses missions. Une poignée d'hommes modestes et désintéressés ont pris à leur compte la lourde responsabilité avec le concours de militants engagés au nombre limité pour déclencher l'étincelle ; un 1er novembre 1954 au nom d'un front. Ils ont embrigadé un peuple autour d'un symbole de l'unité, le FLN qui englobe en son sein tous les Algériens sans exception. Avec des moyens rudimentaires mais une volonté inébranlable, ils ont consenti au sacrifice suprême de la vie et mener une lutte farouche, longue et dure qui avait abouti au résultat, le recouvrement de la souveraineté nationale. Que la jeunesse d'aujourd'hui s'imprègne de cet idéal et prenne conscience qu'il est de son devoir de ressouder l'unité nationale qui s'effrite de jour en jour, construire un pays sur des bases démocratiques, concrétiser le pluralisme sur le terrain par la compétition de toutes les tendances politiques de veiller au respect des pratiques républicaines dans le cadre de nos valeurs nationales.