Le moral des entreprises, des ménages et de l'économie nationale dans son ensemble est plus que jamais en berne en cette fin d'année sociale. Ponctuée par un nouveau programme gouvernemental qui n'annonce rien de vraiment réjouissant, cette nouvelle année de crise aura ainsi accouché, tout naturellement, de nouvelles promesses de réformes et d'ajustements douloureux auxquels il faudra désormais consentir dès la prochaine rentrée sociale. Enclenchement du démantèlement du système public généreux et généralisé des subventions, hausses d'impôts et taxes touchant surtout la consommation, réduction progressive des dépenses générales de l'Etat…Plus qu'une stratégie rationnelle et mûrie en vue d'un redressement salutaire de l'économie nationale, les priorités ainsi annoncées de l'action économique du gouvernement s'avèrent n'être en définitive que de simples mesures d'urgence, rendues presque évidentes et incontournables par un manque cruel d'argent public. La fiscalité autrefois généreuse des hydrocarbures ne permettant plus d'alimenter l'action budgétivore de l'Etat, la voie de secours semble donc toute évidente pour l'Exécutif qui met ainsi le cap sur la réhabilitation de la fiscalité ordinaire, en tentant surtout de se réapproprier sa fonction de collecte de l'impôt. Dans son plan d'action adopté presque en un tournemain par une Assemblée nationale toute dévouée, le gouvernement se fixe en la matière un objectif de 11% de progression annuelle à réaliser sur les recouvrements fiscaux ordinaires, tout en s'engageant à sévir désormais contre les pratiques généralisées de fraude et d'évasion fiscales. Pour y parvenir, il prévoit, entre autres mesures, d'éliminer certaines exemptions fiscales, de réviser les bases d'imposition à l'impôt sur le patrimoine — équivalent de l'impôt sur la fortune — et de revoir les seuils d'assujettissement à certains autres impôts, dont vraisemblablement celui sur le revenu global (IRG). Accouplée à une volonté de ciblage des dispositifs publics de subventions et au désamorçage de la hausse effrénée de la demande énergétique pour aller vers une vérité des prix, la nouvelle politique fiscale que se fixe le gouvernement vise ni plus ni moins à couvrir à terme l'essentiel des dépenses sociales et de fonctionnement par le seul produit des impôts et taxes ordinaires. Si une telle orientation peut être en soi raisonnable et louable, en ceci qu'elle découle d'un besoin d'une meilleure visibilité budgétaire, le risque est cependant réel et grand de voir les coûts sociaux de sa mise en pratique n'incomber qu'à certaines catégories de la population. Car entre la complexité évidente d'un ciblage équitable des subventions et la tentation de concentrer l'essentiel de la pression fiscale sur les impôts à la source, la nouvelle politique du gouvernement pourrait vite virer à la mise en danger de ce qui reste encore comme cohésion sociale…