La figure contestataire du M'zab, Kamel Eddine Fekhar, a été libéré aujourd'hui au bout de deux années d'emprisonnement aux multiples rebondissements. «Je milite pour la démocratie et les droits de l'homme, j'en paie le prix. La prison n'a fait que renforcer mes convictions. J'ai été arrêté et condamné pour mes idées, je n'ai commis aucun crime. Je continuerai à militer pour la liberté. La lutte pour le respect des droits de l'homme est une longue lutte que tous les Algériens doivent mener, ce n'est pas l'affaire d'un seul homme», a-t-il déclaré à El Watan quelques instants après sa sortie de prison, à Médéa. Si ses convictions demeurent intactes, il craint pour sa santé : «J'ai peur que la grève de la faim que j'ai entamée en prison ne me laisse des séquelles.» Arrêté en compagnie d'autres citoyens mozabites le 9 juillet 2015 à Ghardaïa, M. Fekhar a connu un long calvaire carcéral. Accusé de faits graves, «tentative de renverser le régime politique», «atteinte à la souveraineté nationale», «atteinte à l'unité nationale (…)», 18 chefs d'inculpation en tout. Depuis lors, Kamel Eddine Fekhar ne cesse de clamer son innocence ; il a été jusqu'à risquer sa vie, n'était l'intervention de ses avocats pour le convaincre de mettre fin à sa grève de la faim. Son avocat, Salah Debouz, dénonçait inlassablement une «instruction à charge», mais surtout qui n'a que trop duré. Il a dû faire une longue marche d'Alger jusqu'à Laghouat, où son client était hospitalisé. Au terme d'une bataille politique et judiciaire, le procès de Fekhar et de ses compagnons a pu avoir lieu après 22 mois de détention provisoire. Et c'est le tribunal criminel de Médéa qui a abrité le procès le 24 mai dernier, au terme duquel Fekhar a été condamné dans une première affaire à cinq ans de prison, dont 18 mois ferme. Dans la seconde affaire, il a également été condamné dans la même semaine à cinq ans de prison, dont 24 mois ferme. Deux semaines après, ce fut au tour de l'ex-maire de Berriane, Nacer Eddine Hedjadj, de passer à la barre devant le même tribunal. Accusé d'importation et de détention d'armes sans autorisation, il a été condamné à trois ans de prison, dont 18 mois ferme. Il a quitté la prison le jour du procès, parce qu'il avait déjà passé près de deux ans en détention. Avec la libération de Kamel Eddine Fekhar, c'est une page douloureuse des événements de Ghardaïa qui est tournée. Cependant, ce qui s'est réellement passé dans la vallée du M'zab entre 2013 et 2015 demeure opaque. Le vrai procès n'a pas eu lieu. A cet effet, Kamel Eddine Fekhar lance un appel aux personnalités nationales indépendantes de constituer une «commission d'enquête indépendante pour faire la lumière sur les événements de Ghardaïa».