Mourad Zemali, ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale, a affirmé, jeudi à Alger, que la réunion de la commission interministérielle de suivi des conflits collectifs du travail vise «à renforcer et à promouvoir la culture du dialogue social en tant que meilleure option pour le traitement des questions liées au monde du travail, et à asseoir un climat social serein et stable». Il a précisé en outre pour lever toute ambiguïté que l'activation de la commission interministérielle «ne signifie en aucun cas que nous rejetons le droit syndical et le droit des travailleurs à défendre leurs droits dans le cadre de la loi, d'autant que ces droits sont garantis par la Constitution. L'action syndicale dans notre pays ne souffre d'aucune entrave». En réalité, l'exercice auquel s'adonne le ministre est d'autant plus périlleux qu'il sait pertinemment que les Algériens sont au cours de cette rentrée sociale sur des charbons ardents. Le ministre, voire le gouvernement dans son ensemble craignent la montée des contestations politique et sociale dans le pays. Un discours qui veut contribuer indirectement à apaiser le climat politique et public général, actuellement dans le rouge. Impuissants, les pouvoirs publics ont été réduits dans la majorité des cas à subir les grandes questions sociétales, payant souvent le prix de leur incapacité à y faire face au moment où elles se sont posées. L'impact de la crise financière sur l'Algérie suscite toujours des interrogations. Dans le discours officiel, on constate une ambiguïté par rapport à cette question, parfois rassurante, d'autres fois inquiétante. A cet égard, déclare le ministre, «nous avons noté au cours de la première moitié de cette année environ 100 cas de conflits collectifs de travail, une indication claire de l'existence d'une activité syndicale en Algérie. Nous espérons et travaillons à réduire le nombre de ces conflits de travail en adoptant la culture du dialogue». Dialogue oui, mais les syndicats autonomes sont-ils écoutés ? Souvent, ils sont obligés de recourir à des moyens extrêmes pour se faire entendre et l'UGTA joue généralement le rôle de gardienne de la stabilité sociale, une mission que lui ont confiée les tenants du pouvoir. Sidi Saïd, l'indéboulonnable secrétaire général, veille personnellement à atteindre cet objectif. Le ministre met en avant la nécessité «de rapprocher les points de vue et de parvenir à un consensus entre les partenaires sociaux concernant le contentieux, notamment dans les secteurs sensibles qui touchent directement à la vie quotidienne du citoyen». Il est conscient que la conjoncture économique particulière que connaît le pays constitue un virage délicat à négocier. L'Algérie n'est plus à l'ère de l'emploi permanent. L'Etat reste certes le principal employeur, mais avec une réduction de plus en plus importante du nombre de postes d'emploi dans le secteur public. Les années de large distribution de la rente pétrolière avaient jusqu'alors permis de contenir le mécontentement de la population. Aujourd'hui, le mot qui revient souvent est austérité et beaucoup sont menacés dans leur emploi. Il a souligné l'importance de mettre en place des mécanismes à même de «faciliter la circulation de l'information et la saisine de la commission sur tous les cas de litiges pour mieux comprendre le problème et trouver des solutions». Il a exprimé sa volonté de relancer la mission de l'inspection du travail qui ne «doit pas se limiter au contrôle, à la répression et à l'obligation, mais doit être pédagogique, destinée à la sensibilisation, à l'information, à l'orientation, au conseil et à l'anticipation et mettre à profit l'expertise des inspecteurs dans le domaine de la réconciliation et de l'accompagnement, au service des partenaires sociaux et du monde du travail en général». Des cellules de wilaya présidées par les walis ont été créées et chargées des mêmes missions attribuées à la commission au niveau national. Installée le 10 janvier 2017, la commission compte dix départements ministériels, en sus de la direction générale de la Fonction publique, à savoir les ministères du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale, de l'Intérieur, des Collectivités locales et de l'Aménagement du territoire, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, de la Formation et de l'Enseignement professionnels, de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Condition féminine, de l'Industrie et des Mines, de l'Energie et des Finances. La composante de la commission pourrait être élargie à d'autres secteurs en cas de besoin. Le gouvernement multiplie les contre-feux et fait tout pour éteindre un éventuel brasier social.