Il y avait foule à l'INSM (Institut national supérieur de musique). Des élèves, la veuve et la fille du défunt, des musiciens, des artistes, comme Mohamed Lamari, Samir Toumi, Lina Borsali, Ahmed Rachedi, Hassen Kechache, le directeur de l'INSM, Abdelkader Bouazara, une délégation de la DGSN, le secrétaire général du ministère de la Culture, le directeur de l'ONDA (Office national des droits d'auteur), Nouredine Saoudi, directeur de l'Opéra d'Alger… Ils se sont réunis pour saluer la mémoire d'un des leurs. Un maestro ne ressemblant guère aux autres. Et se départissant des oripeaux et autres «glorioles». Au contraire, Rachid Saouli est ce «conductor» de l'ombre. Réservé, effacé, humble, presque «invisible». Tant il était d'une modestie forçant le respect. Et pourtant, Rachid Saouli était destiné à la mélomanie. Au service de la musique, bien sûr universelle, et surtout celle algérienne. Celle du terroir, du patrimoine. Celles kabyle, oranaise, chaouie, chaâbie, targuie…
UN PASSEUR Ce qui est méritoire chez Rachid Saouli, c'est qu'il a sillonné, la baguette sous le bras, dirigé l'Orchestre symphonique national (OSN), à travers les 48 wilayas pour démocratiser cette musique savante, voire élitiste. Et de par le monde, en Chine, en Ukraine ou encore en Espagne. De Te Deum (Marc-Antoine Charpentier, c'est le fameux générique de l'Eurovision des années 1970), à Cole Porter (Salute), en passant par Wahran Wahran d'Ahmed Wahbi, Jahanagh Bezzef d'Akli Yahiaten, ou encore Yaracha El Fetten (chant du patrimoine) arrangés par Rachid Saouli. C'est qu'il était arrangeur et compositeur aussi. «Rachid Saouli est un frère, un père, un ami et un humain. Il nous a quittés physiquement, mais son âme et son esprit demeurent avec nous. Ils hanteront et illumineront les allées de l'Institut national supérieur de musique et ceux régionaux. Nous avons eu l'honneur de sillonner avec Rachid tout le territoire national pour y interpréter les merveilles universelles et autres œuvres algériennes. Rachid Saouli aura été un ‘‘leader'' en son genre pour ses élèves et tous ceux qui adorent la musique classique. Que Dieu l'accueille en Son Vaste Paradis», saluera sa mémoire Abdelkader Bouazara, directeur de l'Institut national supérieur de musique, à Alger. MERCI L'ALTISTE Mme Aït Tahar Vera, premier violon de l'OSN, se souvient non sans émotion : «Monsieur Rachid Saouli est un ami. Nous étions ensemble à Saint-Pétersbourg. Nous étions étudiants. Nous y avions passé de bons moments. Au sein de l'OSN, il était le chef d'orchestre et j'étais le premier violon. Nous travaillions main dans la main pour nous produire dans les 48 wilayas. Partout les gens applaudissaient Rachid. Sa disparition est un moment terrible. C'est une grosse perte.» La dernière fois où nous avons assisté à un concert du regretté Rachid Saouli, c'était lors d'une soirée du mois du Ramadhan, en juin 2017. Il dirigeait les jeunes talents de l'INSM. Il rappellera à l'ordre les élèves dissipés qui ne cessaient de radoter, abusant de sa gentillesse : «Ne parlez pas trop ! Ecoutez ! C'est moi qui dirige !» C'était un homme bon et humble surtout. Avec cette pointe de mélancolie dans les yeux qu'on lui connaissait. La tâche incombe à la relève pour perpétuer l'œuvre de ce passeur. Sandra, Ibtissem, Belkacem, Sofiane, Khalil, Abdelwahab… Salut l'altiste Rachid ! Salut l'artiste Saouli !