Plusieurs romanciers et écrivains algériens sont revenus sur le rôle des personnages dans leurs œuvres. L'universitaire, Fatima Bekhaï, a indiqué que pour aborder une histoire, on a besoin de supports qui se déclinent sous la forme de personnages, d'animaux ou encore de choses. L'écrivaine a déjà personnifié la ville d'Oran. Selon elle, s'il n' y a pas d'émotion, il n' y a pas d'esthétique et d'art dans tout écrit. Dans son œuvre didactique de trois volumes Isurene, elle raconte l'histoire des Algériens. «Mes personnages étaient là pour mettre en valeur des personnalités qui ont vraiment vécu. J'avais besoin de personnages pour décrire, par exemple, les coutumes, les croyances, la façon de s'habiller, de manger», explique-t-elle. Elle souhaite que le lecteur s'identifie et se retrouve dans cette narration truffée de personnages. Comment sont créés ces personnages ? Selon elle, le personnage s'impose de lui-même. Au fur et à mesure, l'auteur met de lui-même. «Je crée un personnage parce que j'en ai besoin. Je le vois physiquement et ensuite le lecteur l'imagine autrement. C'est le personnage qui me guide», note-t-elle. Habib Ayoub a soutenu, pour sa part, que le cinéma limite l'histoire dans le processus créatif de l'artiste «parce qu'il cerne une chose, alors qu'il y a un tas de choses qui sont autour du cadre de la caméra qui sont éliminées», dit-il. Il est convaincu que le cinéaste a cette capacité de forcer le spectateur à voir ce qu'il désire, à commencer par le décor. Il rappelle que dans un film, le décor est le premier personnage. Le romancier, Bachir Mefti, précise que le personnage ne doit pas être nécessairement une personnalité humaine. Preuve en est, la capitale l'a accompagné dans ses œuvres. Il a créé cette entité de la ville d'Alger qui est, selon lui, complexe. Alger a connu beaucoup de douleurs et peu de joies. Alger a été occupée par la colonisation, ayant subi des chocs civilisationnels. «Généralement, nous passons une année à créer nos personnages. Ils s'imposent à notre esprit. Il y a une relation très forte avec ce personnage, même quand il meurt dans l'histoire vous êtes tristes». L'écrivain Hadj Sedik d'Adrar indique sur le personnage principal de son roman Le compagnon, Mamadou, parlant de la situation des écrivains marginalisés : «Mamadou est marginalisé, mais il essaye de nous faire dévoiler l'existence de ces Africains.» Le lauréat du roman arabe Katara, Saïd Kattibi, est revenu sur son dernier roman Quarante ans à attendre Isabelle. De son point de vue, un personnage diffère d'un roman à un autre. Nous nous inspirons du réel pour adapter notre personnage. Il reconnaît que tout ce qui a été écrit sur ce personnage mythique ce sont des biographies et des adaptations cinématographiques. Il n'y a jamais eu un regard algérien. «Isabelle Eberhardt est la négation de l'orientalisme. Elle était du côté des opprimés».Nacima Chabani