Le 3 décembre 1994, Saïd Mekbel, chroniqueur satirique, directeur par intérim du Matin, est assassiné dans un petit restaurant d'Hussein Dey. Il aurait été logique que je fasse un petit mémo pour rappeler sa disparition, mais ai-je le droit d'écrire uniquement sur Saïd Mekbel ? Peut-on être nombriliste et ne voir que nos chers disparus ? Il m'a suffi de jeter un regard sur cette liste conservée depuis tant d'années, ces fameuses années où je passais mon temps à l'actualiser chaque jour, en me rapportant aux dépêches et aux nouvelles macabres, pour réaliser cette évidence qu'avec du recul, l'évolution des événements et de la politique nationale, cette liste prend une toute autre valeur. A la voir de plus près, on y retrouve des noms dont certains restent figés dans nos consciences sans plus trop savoir ce qu'ils représentaient, les fonctions qu'ils occupaient et la famille qu'ils ont laissée. Cette liste a cela de particulier qu'elle n'est jamais exhaustive, qu'elle ne contient jamais les mêmes noms ni le même nombre, elle est écrite suivant l'obédience ou la profession de son auteur. Si c'est un journaliste qui s'y consacre, on y trouvera Djaout, Mekbel, Mahiout, Dorban, etc. Si c'est le RCD ou le Kabyle, on parlera de Stambouli, Aouchta, Djahnine, Tazghout. Quant au PAGS, il pensera aux Chergou, Belazhar, Faderheb, Azziz. Les hittistes n'oublieront pas Yamaha, les chebs Hasni et Azziz. Oui, comme on le voit, cette liste devient multiple à en perdre son calcul. Il est quand même tragique de constater que nous avons cette fâcheuse habitude inconsciente de la division même quand il s'agit de notre mémoire. Si seulement on pouvait s'occuper de notre histoire, si on savait reconnaître la valeur de cette perte, loin des parti pris, cette liste ne serait alors qu'une. Nazim Mekbel : (Fils du défunt)