Au Rassemblement national démocratique (RND), on a jamais été aussi confiant qu'aujourd'hui. Direction, cadres et militants de ce parti sont convaincus que les prochaines élections seront les « bonnes ». A commencer par les sénatoriales, puis les législatives et enfin les locales. « Nous entamons notre campagne plus solides que jamais. Le RND est aujourd'hui un parti fort, nous sommes une formation soudée qui n'a aucun problème interne », rassure un cadre de ce parti. L'allusion au FLN et au FFS est à peine voilée. Miloud Chorfi, porte-parole du RND, est catégorique : « La crise ne touche ni de près ni de loin notre formation. » Les militants du rassemblement ne semblent nullement inquiets par un hypothétique mouvement de redressement, comme il en pousse partout ailleurs, malgré l'agitation médiatique de Aïssa Nouassri. Son « groupuscule », qui tente tant bien que mal de créer et d'entretenir la suspicion, ne semble pas avoir ébranlé la sérénité des militants, convaincus qu'il ne possède aucun ancrage au sein de la base militante. Les fidèles d'Ahmed Ouyahia ne pensent pas trop à Aïssa Nouassri, qui survit uniquement « via quelques communiqués » qu'il arrive parfois à faire publier dans les journaux. « Le secrétaire général du parti, Ahmed Ouyahia, ne donne aucune importance à ces ‘‘agitateurs occasionnels''. Si ce groupe avait une réelle assise politique, il aurait investi, depuis 2001, le parti et renversé la vapeur en sa faveur ; mais vu qu'il ne représente pas grand-chose, le résultat est connu de tous... Il essaye, néanmoins, de temps à autre de faire de petites sorties remarquées, mais en vain », explique un militant de cette formation. Cette belle assurance se vérifie également sur le terrain. L'épreuve du terrain… Une virée au bureau de wilaya d'Alger, situé à proximité de la Grande poste, nous renseigne sur l'importance qu'accorde ce parti aux prochaines échéances électorales, et à l'occasion desquelles il n'entend pas faire de la simple figuration. « Tout le monde est engagé à fond pour ramener un maximum de voix ! », lance un militant occupé à recenser les cartes des adhérents. « Les redresseurs n'ont aucun impact sur le parti, la preuve c'est que pour le seul Alger, 10 000 militants ont renouvelé leur carte d'adhésion au RND. Ceci est un indicateur important qui dénote que le parti se porte bien », ajoutera-t-il. Mohamed, un chevronné au sein du parti, affirme, optimiste, que « la situation aurait été effectivement préoccupante si les militants à travers le territoire national n'avaient pas effectué cette opération ». Tout en ajustant ses lunettes, Mohamed nous confie que ses collègues ne font pas la fine bouche concernant la collecte des voix. « Tout se joue au niveau des communes », croit savoir Mohamed. Tout en saluant le courage de son « chef », ce dernier s'est lancé dans un long discours flatteur envers celui qui a osé endosser « des décisions impopulaires, mais nécessaires pour le pays », en l'occurrence l'ancien chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia. Tout au long de la discussion, de nombreux militants ont rejoint Mohamed pour susciter un débat encore plus passionné. Plusieurs sujets sont abordés, mais ce sera « le cas Guidoum », le ministre de la Jeunesse et des Sports, qui enflammera les discussions, donnant l'impression d'avoir oublié notre présence. Se rendant compte de cette distraction passagère, Mohamed a vite fait de reprendre son rôle de défenseur acharné du RND et fera cette mise au point : Yahia Guidoum, assure-t-il alors, n'aurait jamais été proposé par Ouyahia pour le portefeuille qu'il occupe actuellement, car il serait plutôt l'homme du président de la République. « M. Guidoum ne prend jamais soin de mesurer ses propos ni ses gestes irréfléchis, et choque souvent plus d'un. M. Guidoum est à l'origine de la suspension de la Fédération algérienne d'athlétisme par la Fédération internationale d'athlétisme », ajoute Mohamed. Le RND, à en croire les uns et les autres parmi ses sympathisants, aurait donc dépassé « la zone de turbulences », et l'horizon politique semble lui réserver de belles perspectives. Structurellement, le parti donne l'impression d'avoir une solide assise puisqu'une certaine maturation politique est perceptible à tous les niveaux. Qu'il s'agisse des militants rencontrés au bureau d'Alger ou bien des députés approchés à l'APN, tous s'accordent à affirmer que, depuis quelques années, le RND a retrouvé sa stabilité et sa quiétude. Même le numéro deux de cette formation, Chihab Seddik, appuie cette thèse. « Il n'y a pas d'opposition au sein du parti ni de motif de discorde ; bien au contraire, il existe plus de choses qui nous unissent les uns aux autres que celles qui nous divisent. Nous avons tous des idées, des propositions que nous discutons souvent à bâtons rompus », explique celui qu'on qualifie de « bras droit d'Ouyahia ». Même s'il ne s'est pas montré avare en réponses à nos multiples questionnements, notre interlocuteur semblait néanmoins sur ses gardes. A aucun moment il n'a voulu dévoiler la stratégie élaborée par la direction du parti pour réaliser un score honorable et satisfaisant lors des joutes électorales à venir. « C'est de bonne guerre ! », serions-nous tentés de dire au regard de la compétitivité existante. M. Chorfi est d'avis, quant à lui, que la mobilisation des élus, dont le nombre dépasse les 700, s'impose plus que jamais pour la réussite de cette opération. « Il faut inévitablement jouer la transparence au sein du parti. Certes, les ambitions personnelles demeurent légitimes, mais la discipline reste la colonne vertébrale de toute formation politique. La crédibilité interne est un élément important », certifie un représentant du parti. Au RND, les militants semblent plus conscients de la nécessité de ménager et de préserver les candidats qui n'ont pas été élus. « Il faut savoir gérer ce genre de situation afin d'éviter que ces militants ‘‘fâchés'' ne changent de camp », explique un cadre du parti. Le travail de proximité, la mobilisation et la confiance, soutient-on au sein du parti, sont les facteurs de réussite. L'opération de restructuration du parti est achevée dans les 57 communes de la capitale, nous confirme-t-on. « Aujourd'hui, nous ne nous focalisons pas sur les législatives, car nous préparons ce rendez-vous depuis une année. Notre souci actuel est d'être présents dans toutes les wilayas du pays. Nos rangs sont composés de militants intègres. Les thèmes choisis par le parti pour les prochaines campagnes sont mobilisateurs », commente un militant qui nous invite à assister à la réunion du bureau d'Alger en sus des treize coordonnateurs des circonscriptions de la capitale. Une rencontre qui devait se dérouler en fin d'après-midi sous la présidence de Chihab Seddik, en présence de Mme Flici, présidente de l'Association des victimes du terrorisme, une organisation qui fait parler d'elle ces derniers temps. L'heure est à l'optimisme… A titre indicatif, le bureau d'Alger compte neuf membres dont trois femmes. « Ces femmes sont notre fierté », répliquera l'un des participants. Mokhtar Boudina prend la peine, en marge de la réunion, de nous rappeler que le RND se refuse aux visions réductrices quant au rôle de la gent féminine dans l'évolution du parti. Il existe une section féminine dans tous les bureaux du RND et dans certaines régions, à l'instar des zones rurales, même si la présence féminine est fondamentalement confrontée aux préjugés encore vivaces à l'intérieur du pays. « Nous ne sommes pas dogmatiques. Nous sommes un parti ouvert et nous n'avons, par conséquent, aucun problème d'exclusion », nous précisera-t-il. Dans cette même salle, les représentants des différentes circonscriptions ont dressé, l'un après l'autre, l'état d'avancement du travail de proximité opéré à leur niveau. Une manière d'informer les membres du nouveau bureau sur les récentes évolutions liées au parti. A l'unanimité presque, les cadres du RND sont convaincus que le parti rééditera le scénario de décembre 2003 en raflant la mise lors des élections sénatoriales pour le renouvellement des deux tiers du Sénat en remportant dix-sept sièges. « Nous avons battu en brèche le FLN. C'était un exploit », dira avec satisfaction M. Chorfi. Avec une grande assurance, cet ancien journaliste nous révélera que le RND a acquis une expérience certaine en la matière. La bataille pour décrocher un grand nombre de sièges ou pour obtenir une plus importante représentativité au sein de la chambre haute du Parlement a, en réalité, débuté il y a de cela des semaines, nous confie-t-on encore. Loin des regards curieux de ses collègues, un élu nous apprend que des tractations, des pressions et des alliances de toutes sortes ont été effectuées. Même la ruse est tolérée... Les représentants des circonscriptions y allaient, dans ce sens, chacun de ses propositions. Celui de Bouzaréah suggère une alliance avec les partis qui n'ont aucune chance de décrocher un siège. Un autre propose de « récupérer » les mécontents et les contestataires des autres formations, et ce, quelle que soit leur tendance. « Le travail doit se faire à tous les niveaux : local et national ; et dans ce genre de situation, les relations personnelle peuvent être d'un secours indéniable », lance le représentant de Dar El Beida. Evoquant un autre sujet, et pas des moindres, les militants du RND sont majoritairement persuadés que M. Bensalah, dont le mandat à la tête du Conseil de la nation expire le 28 décembre, sera reconduit, et ce, au moment où le nom d'Abdelaziz Belkhadem est avancé. Dans la foulée, Miloud Chorfi nous fait part de la convocation par le secrétaire général du RND des 121 membres du premier collège de la wilaya d'Alger pour une réunion purement organique. À la reconquête de la base… Ce premier contact sera, selon certaines sources, une occasion pour les élus en vue d'amorcer officiellement la campagne électorale pour les sénatoriales du 28 décembre. M. Ouyahia, qui a déjà entamé son périple dans les quatre coins du pays pour mobiliser ses troupes, a fait une halte à Alger pour faire le point sur les préparatifs en vue de donner les orientations nécessaires afin d'optimiser les chances du futur candidat RND qui aura réussi le test des primaires. Après Boumerdès, Annaba et Sétif, Ahmed Ouyahia devra se rendre à Aïn Témouchent, Oran ainsi que d'autres villes. Le secrétaire général, selon ses proches, devra rendre des comptes à la base et satisfaire notamment leur curiosité par rapport aux motivations de son départ du gouvernement. Tant cette question continue encore de marquer les esprits de la majorité des militants. Si certains n'ont pas admis son retrait du gouvernement, d'autres ont, au contraire, applaudi le geste, car convaincus que c'est une démission qui profitera au parti, dont le secrétaire général est, désormais, plus disponible pour s'y consacrer. D'ou le regain d'activité constaté par les militants. « Lorsqu'il était chef du gouvernement, les occupations du pays et des citoyens étaient sa première priorité. Aujourd'hui, un programme a été tracé et Ouyahia a le temps de le suivre à la lettre. Il ira surtout à la rencontre de la population », dira M. Chihab. En donnant les grands axes de ce programme, ce dernier explique que « M. Ouyahia a déjà passé au peigne fin la situation du parti, il aura à entendre durant ses déplacements les préoccupations de la base. Il rencontrera les secrétaires de wilaya et les membres des bureaux de wilaya ». Le RND, aux yeux de ses cadres, est un parti constant dans ses positions, notamment s'agissant de la condamnation des actes terroristes. « Nous avons adhéré au projet de la charte en étant convaincus que celle-ci est l'unique solution qui s'offre à nous. Nous ne nions pas, toutefois, qu'il nous a fallu du temps pour convaincre nos militants ; en premier lieu, ceux qui sont touchés par la tragédie », soutient un responsable au niveau de cette formation. Mme Flici, selon certaines informations, n'aurait été que mise devant le fait accompli... Quant aux élections législatives, le RND promet de ne pas rééditer le scénario de 2003, où il a été presque laminé.