Pour marquer un point à cette «longue» histoire du timbre algérien du 1/11/1962 au 1/11/2017, on dira qu'en 55 ans d'existence, cette vignette symbolique aura connu des phases de gloire et de décadence. Un parcours qui n'a pas été tout de même à la hauteur des attentes, pour refléter l'histoire riche et millénaire de l'Algérie. Par les chiffres, ces 55 ans font ressortir une moisson de 1487 vignettes, toutes catégories confondues (timbres, feuillets, carnets et timbres taxes), soit une moyenne raisonnable de 27 figurines par an. On ne risque pas de se tromper en affirmant aussi que le catalogue algérien demeure aussi riche en thématiques. En tout, onen a recensé une vingtaine, dominées surtout par les commémorations, les événements et les organismes nationaux et internationaux, la faune, la flore, l'artisanat, le sport et le patrimoine historique. Le point noir qui entache encore le parcours du timbre algérien est l'amnésie qui frappe l'histoire de la résistance populaire à la colonisation française (1830-1916) et celle de la Révolution (1954-1962). Pour la première, les émissions, focalisées sur la personnalité de l'Emir Abdelkader pendant deux décennies, ont occulté pendant longtemps plusieurs figures historiques. On attendra 35 ans après l'indépendance, pour voir Lalla Fadhma n'Soumer, tirée la première de l'oubli, sur un timbre émis le 8 mars 1998, à l'occasion de la Journée internationale de la femme. Le 20 mai de la même année, un timbre commémore la bataille de Zaâtcha (du 16 juillet au 26 novembre 1849) entre les troupes françaises du général Herbillon et les habitants insurgés sous la conduite de Cheikh Bouziane, mais point de portrait de ce dernier. Ce n'est qu'à partir de 2001, qu'on retrouve un premier portrait de Cheikh Bouamama à l'occasion du 120e anniversaire de la révolte de 1881, puis celui d'El Mokrani pour le 130e anniversaire de la révolte de 1871. Il faudra attendre encore l'année 2007, pour que la Poste algérienne daigne enfin rendre hommage à Cheikh Mohamed Ameziane Belhadad et Hadj Ahmed Bey. Mais les grands oubliés de cette «saga philatélique» ont été Bennacer Benchohra (1804-1884), chef de la résistance dans la région de Laghouat et le Sud algérien en 1841 et qui a duré 27 ans. On citera Mohamed Ben Abdellah, dit Cheikh Boumaza, qui a mené en 1845 le soulèvement dans le Dahra et l'Ouarsenis, où ont été perpétrées les fameuses enfûmades par l'armée française contre les tribus arabes, mais aussi Mohammed Lamjad Ben Abdelmalek, dit Chérif Boubaghla, chef de la révolte populaire en Kabylie de 1851 jusqu'à sa mort le 26 décembre 1854. Un résistant décapité après son exécution, dont le crâne, ainsi que ceux de Cheikh Bouziane, Moussa Derkaoui et les restes d'une quarantaine d'autres résistants à la colonisation française sont conservés jusqu'à ce jour dans des boîtes au Musée national de l'histoire naturelle de Paris, attendant encore leur rapatriement. Pour l'histoire de la Révolution, c'est l'ingratitude pour une période riche en événements, commémorée par une overdose de timbres allégoriques, dont 50% consacrés au 1er Novembre 1954 et au 5 Juillet 1962. Ce n'est que le 19 septembre 1998 qu'un timbre sera consacré au 40e anniversaire du GPRA, illustré par la photo de la première composante de ce gouvernement. L'année 2004 verra la sortie du premier timbre à l'effigie des six personnalités historiques, grâce à la fameuse photo prise juste avant le déclenchement de la Révolution. Un tabou qui semblait être brisé. Malgré les hommages rendus sur des timbres à Abbes Ferhat en 2008 et Benyoucef Benkhedda en 2010, respectivement 1er et 2e présidents du GPRA, cela demeure toujours insuffisant. Pour une nation qui a enfanté aussi de grands hommes et femmes de culture, ces derniers n'ont pas eu leur part de reconnaissance. En 55 ans, 22 personnalités ont eu droit aux hommages. Depuis Moufdi Zakaria en 1997, jusqu'à Mouloud Maâmeri en 2017, on retrouve Mohamed Dib, Ali Maâchi, Mustapha Kateb et Mohamed Racim en 2000. La liste compte également Mohamed Temmam en 2002, puis les poètes populaires Lakhdar Benkhlouf, Benmessaïb, Si M'hand U M'hand et Aïssa Djermouni, en 2005, puis Ahmed-Redha Houhou, Malek Bennabi et Kateb Yacine en 2008. La même année, Baya Mahieddine sera la première femme artiste à figurer sur un timbre. Elle sera suivie de Abdelkrim Dali en 2014, puis Benhaddouga, Mouloud Feraoun, M'hamed Issiakhem, et Ismaïl Samsom en 2015. Les dernières à être honorées en 2017 furent Fadila Dziria et Warda El Djazairia. On relèvera aussi que l'Algérie est l'un des rares pays au monde à tourner le dos à ses présidents décédés. Plus de cinq ans après sa mort, Ahmed Ben Bella, qui a eu droit à des funérailles d'un chef d'Etat, attend toujours d'être immortalisé sur un timbre. Le même sort a été réservé à Chadli Bendjedid, décédé en 2012 et Ali Kafi qui a quitté ce monde en 2013. L'attente risque d'être longue au vu des priorités que semble afficher l'administration postale. Car selon une information fuitée, la Commission consultative réunie le 29 novembre dernier aurait validé une proposition émanant du ministère des PTIC visant à consacrer une émission célébrant le 40e anniversaire de la disparition du président Houari Boumediène au titre du programme philatélique 2018.