L'Afrique a du mal à avancer et à faire face aux défis qui l'attendent, notamment en ce qui concerne la réduction de la pauvreté, des disparités régionales et la lutte contre le chômage. Certes, il y a eu des signes de reprise économique en 2017 dans de nombreux pays du continent noir, mais les stratégies, les réformes structurelles et les instruments de financement se font encore attendre. Ce sont là globalement les conclusions du dernier rapport de la Banque africaine du développement (BAD) sur les perspectives économiques en Afrique dont le thème particulier est l'infrastructure et son financement. Scindé en deux parties, le rapport examine l'évolution macroéconomique et les récents changements structurels observés en Afrique. Il esquisse par ailleurs les projections pour l'année 2018 dans sa première phase. Ainsi, l'augmentation de la production réelle est estimée a 3,6% en 2017, contre 2,2% en 2016, et devrait s'accélérer pour atteindre 4,1% en 2018 et 2019. Dans l'ensemble, la reprise de la croissance a été plus rapide que prévu, en particulier dans les économies à forte intensité de ressources. A court terme, la reprise de la croissance pourrait marquer un tournant dans les pays exportateurs nets de produits de base, au sein desquels la baisse prolongée des prix a l'exportation a provoqué une contraction des recettes d'exportation et exacerbe les équilibres. Mais, relève le rappor, «l'année 2017 a déjà été marquée par des signes de reprises macroéconomiques». Les économistes de la BAD noteront également que es fondamentaux économiques et la résilience se sont améliorés dans plusieurs pays africains. «Dans certains pays africains, la mobilisation des ressources intérieures dépasse désormais celle des pays d'Asie et de l'Amérique latine dont les niveaux de développement sont comparables. Elle demeure toutefois insuffisante pour faire face au niveau élevé de financement nécessaire à l'expansion des infrastructures et du capital humain», lit-on encore dans le rapport. Justement, dans sa deuxième partie, le document met l'accent sur la nécessité de développer les infrastructures de l'Afrique et recommande aux pays du continent noir d'envisager de nouvelles stratégies et des instruments de financement novateurs, et ce, en fonction de leurs niveaux de développement et de leurs situations particulières respectives dans le but soutenir l'accélération de la croissance. Comment ? A travers des transformations structurelles susceptibles de créer plus d'emplois et de réduire la pauvreté. Renforcer l'investissement dans l'agriculture «Les politiques économiques devront également renforcer l'investissement dans l'agriculture et favoriser le développement des chaînes de valeur agricoles pour dynamiser le secteur manufacturier moderne et les services», préconisent les économistes de la BAD. Ces derniers placent comme première priorité dans les programmes politiques et économiques le renforcement de la gestion macroéconomique et l'adoption de stratégies de croissance de manière à absorber la main-d'œuvre, en donnant aux travailleurs peu qualifiés les capacités d'exploiter les nouvelles opportunités engendrées par la transformation structurelle. C'est le point commun à tous les pays africains, particulièrement ceux qui font face à des problèmes de gouvernance politiques, même si le rapport ne le dit pas clairement. Mais il rappelle la nécessité de travailler sur l'amélioration substantielle de l'infrastructure. D'où la nécessité dans une deuxième phase d'investir dans le capital humain pour développer en particulier les compétences entrepreneuriales des quelque 12 millions de jeunes qui arrivent chaque année sur le marché du travail. Des résultats à atteindre en mettant en œuvre une autre solution considérée comme la considération-clé du rapport. Il s'agit pour chaque pays de commencer par cibler les secteurs et les zones promettant les meilleurs rendements. D'autant plus qu'il s'agit de réussir la diversification économique tant attendue, surtout face à l'augmentation des besoins engendrés par la croissance démographique. Incitations «La diversification économique est essentielle pour la résolution des problèmes du continent, ceci compte tenu notamment de la situation démographique qui pose des défis», explique le document. Et d'aborder dans un autre sillage la nécessité d'élaborer des politiques macroéconomiques «prudentes et soutenues pour créer les incitations et l'environnement des affaires dont le secteur privé a besoin pour jouer son rôle». Ces politiques doivent, selon la BAD, chercher à assurer la compétitivité extérieure pour éviter la surévaluation des taux de change réels et tirer pleinement avantage du commerce, améliorer les recettes fiscales et assainir la dépense publique. «Pour atteindre ces objectifs, le cadre macroéconomique doit combiner la souplesse dans la gestion des taux de change, la mobilisation des recettes intérieures et une gestion judicieuse de la demande», préconise la Banque africaine mettant l'accent sur un autre plan avec la mise en place des mécanismes institutionnels efficaces pour gérer la planification, la conception, la coordination et la mise en œuvre des projets, ainsi que la réglementation. Des volets dans lesquels les pays africains connaissent de nombreux dysfonctionnements, retardant la réalisation des projets au-delà des problèmes financiers, lesquels problèmes pourraient trouver solution selon la BAD à travers les investisseurs institutionnels et les banques commerciales à l'échelle mondiale. Gérer efficacement les budgets En effet, pour la BAD, avec plus de cent mille milliards de dollars d'actifs gérés dans le monde par des investisseurs institutionnels et des banques commerciales à la recherche de bons rendements, «la situation financière mondiale offre aux pays africains une série de possibilités, au-delà de leurs ressources nationales et de l'aide étrangère, pour investir dans les infrastructures». Un chapitre dans lequel les besoins se chiffrent entre 130 et 170 milliards de dollars par an. «Un montant nettement plus élevé que les 93 milliards annuels longtemps acceptés qui implique un déficit annuel de financement de 68 à 108 milliards de dollars, bien supérieur aux 33 milliards précédemment estimés», est-il précisé dans le document relevant que ce déficit a peu de chances d'être comblé à court terme. Pour Akinwumi A. Adesina, président de la BAD, il suffit de travailler graduellement sur tous ces aspects en optant sur une gestion efficace des budgets d'infrastructures. «Les pays africains ne sont toutefois pas obligés de résoudre tous leurs problèmes d'infrastructures pour réaliser une croissance inclusive. Ils doivent se concentrer sur la meilleure façon d'utiliser leurs budgets d'infrastructures limités pour obtenir les rendements économiques et sociaux les plus élevés», fera-t-il remarquer, avant de conclure : «Les projets d'infrastructures sont parmi les investissements les plus profitables qu'une société puisse effectuer. Quand ils sont productifs, ils contribuent à la croissance économique du pays et la soutiennent. Ils fournissent donc les ressources financières nécessaires pour réaliser d'autres objectifs. Des recommandations qui reviennent régulièrement sans pour autant qu'elles soient mises en œuvre sur le terrain. D'où l'accumulation des retards dans plusieurs secteurs à travers de nombreux pays africains.