Grand de taille et assez robuste, Mohamed Hansal, 22 ans, s'approcha de la barre des accusés d'un air idiot. Il donnait l'impression de ne pas savoir ce qui lui arrivait. « Je ne sais pas. Non je n'ai jamais rien fait », ne cessait-il de dire. Les mains derrière le dos, il semblait ne pas être concerné par le procès et regardait d'un air absent ceux qui l'entouraient. A travers son comportement, il tentait ainsi de faire croire aux membres de la cour criminelle qu'il souffre d'une amnésie. Le président de la cour lui demanda : « Tu ne sais absolument rien ? Te rappelles-tu au moins avoir été condamné à deux reprises pour coups et blessures volontaires par, respectivement, le tribunal d'Arzew et celui de Mécheria ? » A chaque question, l'accusé hochait la tête de droite à gauche en disant : « Non. » De temps à autre, il haussait les épaules en guise de réponse avant de se replonger dans son mutisme ce qui donna, quelque peu, du fil à retordre aux membres de la cour pour mener à bien les débats. L'épouse de la victime, appelée à la barre en qualité de témoin, a cependant souligné, au sujet de l'attitude de l'accusé, qu'« il a été toujours dans un état normal. Je n'ai jamais décelé chez lui des signes de folie. » L'accusé Mohamed Hansal a comparu, le 26 juin dernier, devant la cour criminelle d'Oran sous les principaux chefs d'inculpation d'homicide volontaire et vol qualifié. Selon les faits consignés sur l'arrêt de renvoi, la genèse de cette affaire remonte à la nuit du 1er mai 2003 et a eu pour théâtre une habitation située dans la localité de Saint-Rémy, à quelques encablures de la sortie sud de la ville d'Oran. Mohamed Hansal a été invité par sa tante, trois jours avant la fatidique nuit, à passer quelques jours chez elle à Saint-Rémy. « Il me faisait pitié. Ma sœur avait divorcé avec son mari. C'était encore un bébé lorsque ma sœur me l'avait confié. Avec mon époux, nous l'avons élevé comme si c'était notre propre enfant jusqu'à l'âge de quatre ans », a témoigné sa tante lors du procès. Le soir des faits, l'oncle de l'accusé, en l'occurrence Smaïn Benyelles, âgé de 65 ans, se trouvait seul dans son domicile car son épouse avait été invitée à la célébration du mariage d'un parent, qui devait avoir lieu à Oran. Mohamed Hansal savait pertinemment que sa tante devait y passer la nuit et par conséquent le sexagénaire serait seul dans son domicile. Cependant, il a accompagné sa tante à Oran en lui laissant entendre qu'il ne va pas retourner à Saint-Rémy, lieu de sa résidence. En fait, il avait concocté son plan dès le début pour ne pas attirer les soupçons. En ouvrant sa porte le soir du 1er mai 2003, Smaïn Benyelles fut étonné de revoir son neveu alors que pour lui il ne devait pas revenir, en tout cas pas ce soir-là. « J'ai oublié quelques objets personnels que je dois récupérer », a prétendu l'accusé pour justifier sa présence à la porte du domicile du sexagénaire à une heure indue. A l'intérieur, Mohamed Hansal a profité d'un moment d'inattention de son hôte pendant que celui-ci s'affairait à la préparation du souper pour se ruer sur lui, armé d'un coutelas. Sans hésiter, il lui trancha la carotide avant de lui porter trois coups au niveau du thorax (les résultats de l'autopsie l'ont confirmé). L'accusé a, par la suite, nettoyé toutes les traces de sang avant de procéder au tri de tous les objets de valeur et autres biens de la victime qu'il devait emporter, selon son machiavélique plan. Il a passé la nuit dans la maison avec le cadavre du sexagénaire gisant dans la cuisine. Le lendemain à l'aube, il traîna sa victime jusqu'au puits situé à quelques pas de la maison dans lequel il le balança. L'accusé se rendit par la suite au quartier Petit Lac, sur la périphérie sud de la ville d'Oran, pour solliciter les services d'un transporteur public. Ce dernier, pensant qu'il s'agissait d'un déménagement, a offert ses services pour aider l'accusé à transporter le butin de son vol dans un garage situé dans ledit quartier. C'est ce même transporteur qui, en devinant qu'il s'agissait des produits de vol, a avisé les éléments de la gendarmerie nationale. Ces derniers se sont déplacés au lieu indiqué où ils découvriront l'épouse de la victime dans tous ses états. Elle fit savoir qu'une véritable razzia a été opérée dans son domicile avant de signaler la mystérieuse disparition de son mari. Ce sont des traces de sang laissées par le meurtrier qui ont conduit les enquêteurs jusqu'au puits dans lequel Smaïn Benyelles avait été jeté. Le représentant du ministère public a fait remarquer dans son réquisitoire que l'accusé avait tenté d'induire en erreur les membres de la cour en simulant l'amnésie. Il a souligné : « L'accusé avait bien préparé son plan. Car quelques heures après avoir assassiné sa victime, il s'est payé une virée à travers les bars de la commune balnéaire de Aïn El Turk avec l'argent du butin fourgué. » L'accusé a reconnu les griefs retenus contre lui au cours des différentes étapes de l'enquête judiciaire. L'avocat général a conclu en requérant la peine maximale contre l'accusé. L'avocate de la défense a mis en exergue la déplorable situation sociale de son mandant avant de plaider les circonstances atténuantes en sa faveur. Au terme des délibérations, la cour a condamné Mohamed Hansal à la réclusion à perpétuité.