Résumé de la 2e partie Un matin du 8 février 1955, on retrouve la Lincoln Continental de M. Rufus K. Dryer, les clés sur le tableau de bord mais point de Rufus. -Non, monsieur, il s'appelle Rufus K. Dryer. ? Vous êtes sûr ? Je le connais bien, c'est mon beau-frère... Je suis le frère de sa femme. Le frère de la femme de Rufus est difficile à décrire. Ni grand ni petit, il a un costume discret. On remarque qu'il est bien vêtu, mais sans ostentation. Il a les cheveux ni trop longs ni trop courts, un visage pas antipathique, des yeux sans expression particulière. En le voyant on n'a pas l'impression de rencontrer Einstein en personne... mais il n'a pas l'air idiot non plus... D'ailleurs, pour faire le métier qu'il fait, il faut plutôt être malin : il est agent immobilier. On dit de lui que «c'est un homme de bon sens» et chacun sait les vertus du bon sens... Et que le bon sens triomphe toujours... La preuve, regardez autour de vous. «Et dire qu'on le cherche partout depuis trois mois, dit le beau-frère. ll est devenu fou, complètement fou.» Le directeur éberlué regarde la photo. «Je ne sais pas s'il est fou... Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'il s'est présenté comme clown». ? Et vous l'avez cru ? ? Pourquoi pas ? Le vieux Styron a soixante-dix ans, il est clown depuis cinquante-cinq ans. Lorsqu'il m'a dit qu'il s'était trouvé un nouveau partenaire, évidemment j'ai voulu le voir. Je n'ai rien soupçonné. Au contraire, il m'a donné l'impression de connaître le métier. J'ai dit : «Cet homme est un clown.» Le vieux Styron en avait les larmes aux yeux. ? Et moi je vous dis qu'il n'a jamais été clown. ? Possible, mais alors il est très doué. Le vieux Styron et lui ont travaillé pendant trois mois. La semaine dernière, lorsque nous avons présenté leur numéro aux frères Ring, ils ont décidé qu?il ferait la saison d'été... C'est une chance inespérée pour le vieux Styron de pouvoir faire encore une saison. ? Vous le payez ? Je veux dire... le nouveau ? ? Evidemment... Vingt-cinq dollars par semaine. ? Vingt-cinq de dollars... Incroyable ! Et dire qu'il est millionnaire». Soudain le beau-frère prend un air pincé, soupçonneux. ? Et... ce vieux clown... on peut le voir ? ? Oui... Mais vous devriez peut-être attendre la fin du spectacle. ? Je préfère le voir tout de suite. Je ne peux pas vous en empêcher, dit le directeur, mais ce n'est pas très chic... Le vieux Styron ne peut pas faire son numéro tout seul. ? Je leur laisserai faire leur numéro à deux ce soir, mais je veux voir le vieux clown avant. ? Pauvre vieux, dit le directeur, comment voulez-vous qu'il fasse son numéro correctement après ça ? Ces gens-là doivent faire rire, monsieur. C'est ce que le public attend et c'est difficile, vous savez... Mais puisque vous ne comprenez pas...» Le beau-frère n'est pas là pour comprendre. Il demande : ? Où est-il ce Styron ? ? Là-bas... Dans cette roulotte.» Dans la roulotte, entre la télévision portative, un petit bar recouvert de formica et la reproduction du clown de buffet, le beau-frère de Rufus trouve un vieux bonhomme, pâle et triste, vêtu d'un survêtement, jaune décoloré avec un foulard rouge.