Les choses se précipiteront en 1960 peu après les expropriations décidées par l'United Fruit et les autres compagnies américaines, conséquences sans doute du rapprochement du dirigeant cubain avec le Parti communiste. En janvier 1961, les Etats-Unis décident de rompre les relations avec cuba. Quelques mois plus tard, en avril, une tentative de débarquement d'opposants anticastristes soutenus et financés par la CIA tourne court. C'est à la fin de la même année qu'il se déclare communiste. Sa popularité augmente encore plus auprès des Cubains. Débute alors un blocus économique décrété par les Etats-Unis contre l'île et sans doute l'un des plus atroces de l'histoire contemporaine. Les Américains pensaient étouffer dans l'œuf la révolution cubaine. Celle-ci pour survivre a dû se rapprocher de l'Union soviétique. Pour Washington, il devenait, on ne peut plus clair, que le régime castriste était devenu franchement pro-soviétique. La crise des missiles russes pointés sur les côtes américaines va intensifier cette opposition farouche des Etats-Unis envers Cuba, désormais relié par un cordon sanitaire à Moscou. On a frôlé une guerre mondiale. Moscou accepte de retirer ses missiles contre l'engagement de Washington à ne plus essayer d'envahir l'île. Mais l'hostilité américaine ne cessera pas pour autant. Une hostilité d'autant plus forte qu'il existe à Miami et dans toute la Floride une opposition anticastriste, constituée de milliers d'exilés qui ont fui la révolution dans le sillage de Batista. L'acharnement américain pourrait s'expliquer, peut-être, comme le suggère le cinéaste Michael Moore, par le poids exercé par ce lobby anticastriste sur la politique extérieure de Washington. Il cite plusieurs faits qui expliqueraient cette mainmise des anticastristes. De l'assassinat de John Kennedy jusqu'à l'affaire du Watergate en passant par l'« Irangate » et derrière lesquels se profile toujours la filière des « Cubains de Miami ». Toujours est-il que les dures conditions de l'embargo vont obliger Castro à opter pour une véritable économie de guerre. Nationalisations et expropriations ont eu pour effet de provoquer l'exil de plusieurs milliers de personnes vers la Floride. Grâce à des exportations surévaluées et des importations minorées en matières énergétiques avec l'Urss, l'île va réaliser des performances considérables en matière de santé et d'éducation notamment. L'espérance de vie est la plus élevée d'Amérique latine et vient juste après celle des Etats-Unis. L'analphabétisme a été éradiqué dès les premiers mois de la révolution. Aujourd'hui, plus de 30 000 médecins cubains ont été envoyés en Amérique latine et dans plusieurs pays en voie de développement au titre de la coopération. L'engagement de Cuba pour le Tiers-Monde a débuté dès les premiers instants de la révolution en 1960. L'ancien président Ahmed Ben Bella a révélé dans un article publié dans Le Monde diplomatique que Che Guevara l'avait contacté au lendemain de l'indépendance pour lui demander que l'Algérie aide le régime cubain à faire parvenir des armes à plusieurs mouvements de libération africains. En 1975, des instructeurs militaires cubains ont été envoyés en Angola pour les combattants du MPLA. Quelques années plus tard, l'Ethiopie a bénéficié de l'aide militaire cubaine. Un tel engagement « tiers mondiste » ne pouvait assurément que déplaire à Washington qui a financé et soutenu d'autres opérations des anticastristes. Des épidémies provoquées (fièvre porcine et dengue), jusqu'à la démonstration de force sous l'administration Clinton, les Etats-Unis ont déployé toute une panoplie d'actions pour déstabiliser le régime castriste. La meilleure manière consistait à exploiter la question des demandeurs d'asile comme cela a été le cas dans les années 1980 et 1990. Des dizaines de milliers de Cubains ont quitté le pays. Castro, en fermant les yeux sur la question des candidats à l'exil, a sans doute vu là l'occasion de se débarrasser d'opposants potentiels, tandis que les plus déterminés et les plus « durs » étaient emprisonnés.