Le documentaire sur la pratique de la hidjama en Algérie, diffusé par l'ENTV lors de l'émission « Min waqiîna » (de notre réalité), lundi, a suscité des réactions. Si le recours à cette méthode constitue, aujourd'hui, un remède prisé par la population de la capitale comme le montre le reportage, il est plutôt dangereux de voir que cette « médecine parallèle » pratiquée dans les lieux publics et sans que les autorités sanitaires ne réagissent. Pourtant la loi est claire là-dessus. Il s'agit d'un usage illégal. Les patients ont tous loué les bienfaits de cette médecine, mais sans se soucier des conséquences néfastes (infections, contamination et autres problèmes de santé) que peut engendrer ce procédé utilisé sans aucun respect des conditions d'hygiène. Le reportage montre en fait comment ce « moyen thérapeutique » est exercé dans un cabinet médical et dans d'autres endroits, dans la rue, dans des maisons et dans certains locaux de vendeurs de plantes médicinales. La parole est alors donnée à un médecin « hidjami » : est-ce une spécialité reconnue par la faculté de médecine ? Est-ce une qualification validée par les instances concernées ? Est-ce que ce médecin est inscrit au tableau de l'Ordre des médecins ? Personne ne le sait, puisque la journaliste qui a fait le reportage n'a pas trouvé nécessaire d'interroger des médecins non hidjami encore moins l'institution de la déontologie et de l'éthique, à savoir le Conseil de déontologie médicale. Chez les « guérisseurs » ambulants, les malades sont traités avec les mêmes ventouses (des verres à thé) sans qu'elles soient stérilisées pour retirer le « mauvais sang ». Les incisions sont pratiquées à l'aide d'une lame de rasoir nettoyée avec de l'alcool. « Un moyen de stérilisation », souligne-t-on. Les patients sont alors traités pour différents « maux » (migraine, impuissance sexuelle, mal de dos, maladies cardiaques, etc.), dont certains à titre préventif. Parallèlement, dans le cabinet médical, le reportage nous montre le médecin hidjami appliquant la même thérapie avec des moyens plus modernes. Un pistolet qui met en place les ventouses en plastique puis un bistouri pour inciser et récupérer le sang qui peut être à l'origine du mal. Il nous apprend, par ailleurs, que cette méthode thérapeutique est aussi pratiquée à des fins esthétiques. « On peut soigner l'acné avec ces ventouses après avoir imbibé le visage à la vitamine E. La prévention des rides est aussi possible avec la hidjama », explique-t-on. En conclusion, ni le guérisseur ambulant ni le médecin spécialiste de la hidjama n'ont expliqué aux téléspectateurs par quel phénomène la maladie disparaît, surtout lorsqu'il s'agit de pathologies lourdes, telles que les insuffisances cardiaques, le diabète, l'insuffisance rénale et enfin les cancers. Dans un communiqué parvenu à notre rédaction, le conseil national de l'Ordre des médecins a vivement réagi à cette émission de l'ENTV qui « met en images des médecins pratiquant des actes de charlatanisme ». Il considère que la télévision algérienne a un devoir informatif dans la cadre de la loi et des règlements en vigueur de la République. « Or, le fait de faire de la publicité à des pratiques charlatanesques, “des traitements illusoires”, l'ENTV se rend complice de ces actes illégaux réprouvés par le code de déontologie médicale (art. 31, 17 et 18 du code). » Le conseil de l'Ordre des médecins entend donner suite à cette situation par des poursuites disciplinaires contre ces praticiens et demander réparation morale au nom de la corporation.