Le mot google n'est pas seulement l'un des plus usités de ce début de siècle, il est pour John Batterelle, auteur d'un ouvrage passionnant (La révolution google, Ed Eyrolles, 2006) sur la formidable réussite du moteur de recherche « en tant que business, une des plus grandes idées de l'histoire ». En nouvel empire planétaire de pouvoir symbolique, la firme s'est dotée, entre autres ressources, de 175 000 serveurs qui lui moulinent, à l'infini et en permanence, quatre milliards de pages web, pour « digérer » plus de 200 millions de demandes de recherches / jour. Son assise financière est proportionnelle au crédit des annonceurs, assurés du succès d'accès des internautes, et d'un strict protocole d'accord avec google : discrétion de l'incrustation des marques et confiance sur le prorata des clics relevés par le moteur et leurs liens. Les gains sont de telle consistance que la firme ne cesse de grignoter des parts considérables de l'eldorado cyber – planète. Le géant des géants des acteurs de l'Internet a été crée en 1998. Son site physique de rayonnement est à Mountain View, au sud de San Francisco, et comme de juste non loin d'un musée dédié à l'histoire de l'informatique. Hommage de cette portion de la Silicon Valley aux puces électroniques intronisées en déesses de patrimoine culturel. Mais aussi en « musée vivant » de science fiction : ses 72 000 habitants sont raccordés gratuitement, via la WI-Fi, à l'Internet, par Google en nouveau mécénat et promotion d'entreprise Pour mémoire la ville a engrangé l'invention, en 1970, du tout premier microprocesseur et, à la fin des années 90, de Netscap, et de toute une fournée des premières start – up. Pour la petite histoire, les inventeurs du moteur de recherche ont démarré leur cogitation à partir d'un garage, avec l'ambition déclarée « d'organiser l'information mondiale en la rendant accessible et utile à tous ». Diplômés de l'université de Stanford, aujourd'hui à 32 et 33 ans, les propriétaires de google règnent sur l'une des plus grandes fortunes du monde : une entreprise estimée à plus de 100 milliards de dollars et employant plus de 8000 salariés. Google a récemment ravivé les questions sur sa tentation de main mise concentrationnaire sur l'ensemble des produits de la Toile par son rachat, pour 1,65 milliard de dollars, de You Tube, un site de vidéos en ligne. L'expansion de l'empire google suscite de nombreuses questions et appréhensions quant à son pouvoir démesuré – et de plus en plus incontrôlable – sur ses clients. Un avocat de l'organisme américain de veille sur la protection des libertés et droits citoyens sur l'Internet, l'Electronic Frontier Foundation (EFF) s'interroge sur les usages que la firme peut pratiquer de l'infinie richesse d'informations qu'elles gère. Il observe que « Google dispose d'un panel d'informations sans précédent sur ses internautes : via leurs recherches, amis, mais aussi les adresses e-mail et les achats en ligne. Le Wi-Fi ajoute une nouvelle dimension en en permettant de savoir près de quelles antennes se trouvent les internautes. Le problème n'est pas tant l'utilisation par Google de ces données, mais ce qui peut se passer si un gouvernement ou un particulier (mari en colère, ancien associé) demande l'accès à ses informations. Personne ne sait combien de temps Google les conserve. Et la loi reste très floue : doit-il ou non livrer ses données ? » Pour illustration de cas, notons que le moteur de recherche a refusé de livrer des données au gouvernement américain sur un réseau de pornographie ; mais il a accepté, en 2004, la condition de Pékin, motivée par la censure politique, « d'adapter localement » son réseau. De retour de Googleland, un reporter qui a observé le fantastique domaine d'activité de la firme (comprenant terrains de sport, séances de massage et piscine aux vagues artificielles à disposition de la « tribu Google », etc.), a noté aussi noté que « la culture du secret y est un art », pour ne permettre au journaliste en visite du site physique qu'un discours préfabriqué sur la firme. Et, comme en écho lointain au célèbre roman de science fiction d'Aldous Huxley « distraire à en mourir », il a dit son « sentiment d'avoir passé quelques jours sur une autre planète, sans trop savoir s'il faut se réjouir ou blêmir à l'idée qu'elle ressemble peut-être à notre avenir. »