Abdelmoumen Khalifa a réaffirmé son statut de réfugié politique à Londres, dans un entretien accordé vendredi 2 février à la chaîne Al Jazeera. Le même jour, Mustapha Farouk Ksentini, président de la commission nationale consultative pour la protection et la promotion des droits de l'homme (CNCPPDH, officiel), a attesté du contraire, citant un haut cadre de la justice britannique. Selon cet avocat, le PDG du défunt groupe Khalifa n'a jamais bénéficié d'un tel statut. Qui dit la vérité ? Abdelmoumen ou Ksentini ? Depuis quelque temps, les déclarations se suivent et se contredisent ici et ailleurs. Aucune réponse claire n'a été apportée aux innombrables interrogations soulevées par « l'exil » forcé de celui qui est désigné comme le principal responsable du « scandale du siècle » : la banqueroute d'El Khalifa Bank, dont le procès est à sa quatrième semaine à Blida. Officiellement, le Royaume-Uni ne s'est jamais exprimé sur la nature du « séjour » de l'ex-golden boy à Londres. On sait cependant que Khalifa possède dans la capitale britannique des bureaux et une chaîne de télévision à l'arrêt suite au krach de la banque. Une question s'impose d'elle-même : si Rafik Khalifa ne jouit pas de la protection de Sa Majesté, pourquoi n'arrive-t-on pas à obtenir son extradition des autorités britanniques ? Des juristes évoquent l'absence d'accords bilatéraux en la matière entre les deux justices, algérienne et anglaise. Mais depuis 2006, les Etats ont signé un traité d'extradition qui a été entériné par le parlement des deux pays bien avant la fin de la même année. L'ambassadeur d'Algérie en Grande-Bretagne, Mohamed Salah Dembri, ancien ministre des Affaires étrangères, avait déclaré à la Chaîne III de la Radio algérienne, le jour de l'ouverture du procès Khalifa, que, 30 jours après la ratification du traité, le processus d'extradition de Rafik Khalifa s'enclenche. Plus d'un mois est passé et les choses ne se sont pas encore clarifiées. Le ministre de la Justice, Tayeb Belaïz, avait attesté que l'extradition de Khalifa « est une question de temps ». Abdelaziz Belkhadem, chef du gouvernement, a assuré, le 13 janvier dernier, que « le traité d'extradition paraphé entre l'Algérie et la Grande-Bretagne a pris en considération le volet ayant trait à l'extradition de Abdelmoumen Rafik Khalifa. Il reste maintenant que son extradition concerne la justice des deux pays ». Mais l'autre affirmation de Farouk Ksentini laisse pantois. Il a indiqué qu'aucune demande officielle d'extradition de Moumen n'a été introduite par la justice algérienne. Là aussi, c'est une zone d'ombre qui mérite des explications officielles. Rafik Khalifa profite bien de cette situation confuse pour se montrer, le jour de son passage sur Al Jazeera, « confiant » en la justice britannique, défiant même les autorités algériennes de pouvoir obtenir son extradition. Une telle assurance va dans le sens de l'appréhension du président de l'association algérienne de lutte contre la corruption, Djilali Hadjadj, qui avait affirmé en janvier 2006 que Londres n'a pas de volonté d'extrader Abdelmoumen Khalifa. Cette volonté politique existe-t-elle vraiment chez l'autre partie ?