Le gouvernement ne jure plus que par sa volonté de doter l'industrie nationale d'une nouvelle stratégie. Sa volonté va être jaugée au cas par cas. Le sort du complexe ex-ENCC de Hassi Ameur, à Oran, fait partie des vraies valeurs test. La décision stratégique des décideurs économiques de valoriser le parc productif national dans une nouvelle stratégie industrielle a soulevé un espoir chez les collectifs de travailleurs d'entreprises publiques en difficulté. Ce « tournant » annoncé va être mis à l'épreuve du traitement de quelques entreprises emblématiques du secteur industriel. Ainsi l'encadrement du complexe ex-ENCC de chaudronnerie lourde situé à Hassi Ameur, Oran Est, est resté mobilisé cet automne-hiver pour obtenir une reprise de l'activité de cette unité phare de la construction métallique. Elle est à l'arrêt depuis mars 2005. L'entreprise mixte SIMAS qui détenait le complexe depuis 1995 est en liquidation. Résultat : quelque 460 salariés ont été indemnisés en octobre dernier. C'est un pan appréciable du savoir-faire national dans la construction métallique qui est jeté par-dessus bord. Le sort du complexe Hassi Ameur est le type même d'illustration des errances de la « non politique industrielle » qui a marqué la première moitié des années 2000. Voilà une activité qui a un marché domestique en pleine expansion : le complexe est pourvoyeur de biens d'équipements de stockage et de transport d'hydrocarbures et produits chimiques. Hassi Ameur détient une situation de quasi-monopole dans l'offre nationale sur la gamme des biens d'équipements chaudronnés fabriqués à partir d'installations du complexe (colonnes de distillation, ballons, séparateurs, échangeurs de chaleur et autres aéroréfrigérants). Des produits destinés à des clients solvables intervenant principalement dans les secteurs des hydrocarbures et de l'énergie comme le montre la liste de ses clients : Saipem, Entrepose, Basse Sambre, ABB, Bechtel, Alstom, Anadarco, BRC, Sonelgaz, Sonatrach, Bouygues off-shore, JGC, Naftal. Que s'est-t-il donc passé ? Simas – complexe ex-ENCC Hassi Ameur - a été une expérience de partenariat mal pilotée. En 1997, le canadien KPSI est arrivé dans le tour de table de Simas avec un apport de 6 millions de dollars en technologie et en numéraire. Il a amené avec lui un autre partenaire, l'espagnol Mecanica de la Pénà, une ancienne filière de ABB, qui a déclaré faillite l'année suivante en Espagne. La modernisation des équipements prévue ne s'effectue pas. Le transfert de technologie avorte. Simas obtient régulièrement des contrats de prestations mais les honore souvent à perte à cause d'un management approximatif et d'une stratégie du court terme des co-propriétaires. La SGP Construmet et sur un autre plan le ministère de l'Industrie ne prennent aucune mesure pour faire respecter le cahier des charges du partenariat. Les comptes de Simas se creusent malgré un chiffre d'affaires de 1,5 milliard de dinars et des commandes en route. Les coûts de production élevés deviennent un handicap devant la concurrence des produits importés. L'arrêt de la production en mars 2005 ouvre d'ailleurs grandes les portes du marché national aux seules importations provenant notamment des ex-pays de l'Est européen où les modernisations des outils de production dans ses filières lourdes se sont bien produits dans les années 90. Voilà donc une illustration concrète et très indicative des défis qui attendent la « nouvelle politique industrielle » de Hamid Temmar. La production d'équipements chaudronnés pour le secteur de l'énergie est-elle une activité importante et viable dans le tissu industriel national ? Pour le personnel de Hassi Ameur, la réponse ne fait aucun doute. La demande en aval est en expansion, le personnel avec ses 45% d'ingénieurs et d'universitaires détient toujours un savoir-faire précieux, il reste à trouver un ou des repreneurs et à accompagner la construction d'un tour de table qui remette en route le complexe ex-ENCC de Hassi Ameur. Des étrangers viennent périodiquement visiter le site fermé de Hassi Ameur. Pour l'ancien encadrement du complexe, « c'est à Alger, entre la SGP Construmet et les ministères liés au dossier, que le flou persiste sur la volonté de redémarrage de l'unité ».