Près de 112 000 ha du foncier agricole seront cédés à l'urbanisme d'ici à 2010, selon Mohamed Mellouhi, directeur de l'organisation foncière et de la protection des patrimoines au niveau du ministère de l'Agriculture et du Développement rural. Ces terres agricoles changeront de vocation afin de concrétiser des projets d'intérêt général, à en croire M. Mellouhi. Pour compenser la « perte » de ces terres, les pouvoirs publics ont mis en place un dispositif de mise en valeur par la concession. Ce programme, amorcé en 1990, prévoit d'ajouter 650 000 ha à la surface agricole utile. De septembre 2003 à ce jour, près de 550 ha de terres agricoles ont été récupérés par l'Etat au profit de projets urbanistiques en vertu d'une disposition de la loi de finances 1998 qui accorde à l'Etat un droit de reprise ou en vertu de la loi 91 fixant les règles d'expropriation pour utilité publique. Dont 90% ont été utilisés dans le cadre du programme « Location-vente » de l'Agence pour l'amélioration et le développement du logement (AADL). Le reste a servi à l'extension de centres universitaires, la construction de lycées, hôpitaux et des projets pour le secteur de l'éducation. Les agriculteurs, à qui on a retiré les terres, ont tous été indemnisés, selon notre interlocuteur. L'application des dispositions de la loi de finances 1998 relatives à cette question n'a commencé qu'en 2003 afin de permettre aux communes d'élaborer leurs plans conducteurs d'aménagement et d'urbanisme. Actuellement, les 1541 communes que compte le pays se sont dotées d'un tel plan. « Ainsi nous avons pu mesurer l'impact de ces plans sur le foncier agricole. Avant, la situation était anarchique », soulignera M.Mellouhi. Les communes devaient également élaborer des plans d'occupation du sol. Les opérations de récupération de ces terres ont commencé après la promulgation du décret exécutif 03-313 du 16 septembre 2003 portant modalité d'exercice du droit de reprise. Par ailleurs, 320 personnes dans tout le territoire national ont été déchues de leur droit de jouissance perpétuelle entre 2000 et 2003 et d'autres affaires similaires sont traitées par la justice. Parmi ces cas, 200 se sont vu retirer leur droit de jouissance perpétuelle pour avoir effectué des transactions illégales de cession. Environ 50 déchéances sont dues à une non-exploitation des terres. Mais le plus surprenant, ce sont les déchéances qui ont fait suite à un transfert illégal des terres agricoles de types exploitations agricoles collectives et individuelles au profit des communes. Une cinquantaine de cas de ce genre ont été recensés. Ces pratiques ont été plus courantes à Alger et Oran, selon notre source. Ainsi, dans la capitale, des agriculteurs ont cédé leurs droits d'exploitation aux autorités locales d'El Hamiz, Staoueli, Dar El Beida, Birkhadem, Cheraga, Zeralda, Ouled Fayet. Trois communes à Oran ont été également le théâtre de telles transactions illégales. Ces communes ont en fait des lotissements et des zones d'habitation. Selon M.Mellouhi, la gestion des communes par des élus de l'ex-Front Islamique du Salut (FIS dissous) a été la période de grâce de ces infractions à la loi. « Jusqu'en 1995, il n'y avait pratiquement pas une autorité sur le foncier. Ce n'est qu'en 1995 que l'Etat a repris les choses en main », a expliqué M. Mellouhi. Ce dernier a indiqué que ce problème devrait connaître son épilogue dans le sillage de la désignation par le chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, d'un groupe de travail intersectoriel pour étudier la question des constructions illicites. Ce groupe de travail, qui été mis en place il y a deux semaines, commencera par faire un recensement de tous les cas qui sont contraires à la loi et proposera des solutions.