A Melika, la reine du M'Zab, l'hospitalité est grande, la désolation également, c'est une ville livrée à elle-même. Pour parvenir à ses hauteurs, en partant de Ghardaïa, il va falloir traverser l'Oued M'Zab et grimper les pénibles sentiers tortueux accrochés à la montagne. Les rares animations culturelles organisées ici et là à travers la localité, selon un programme varié : animation, chorale, conférences-débat et autres, ont suscité l'intérêt des habitants de Melika, privés de tout autre moyen de distraction. Ces manifestations sont animées par des associations locales qui auraient curieusement connu un blocage à la direction de la réglementation des affaires générales de la wilaya. « Je ne comprends pas pourquoi nous sommes freinés et interdits d'activer sur ordre d'un notable de la ville qui aurait usé de son excès d'autorité », s'interroge Bachir Benaouemeur, président de l'association Bey Ahmed encore sceptique. Pourtant, la quinzaine d'associations de Melika ont pour but d'animer la ville, de mobiliser les jeunes et d'aiguiser leur esprit patriotique à travers l'expression libre et un échange d'idées. Toutefois, l'objectif principal, c'est surtout celui de tirer la sonnette d'alarme et d'interpeller les autorités locales concernées afin de les amener à s'intéresser impérativement à cette ville, distante à peine de 2 km du chef-lieu, mais qui semble livrée à elle-même. Sur une montagne perchée, Melika située en juxtaposition à la ville de Ghardaïa, fut fondée en 1385, c'est la ville parmi les moins peuplées de la région du M'Zab. Elle ne compte que 4984 habitants seulement, et ne s'étend que sur 45 ha. Elle reste toutefois, une ville très hospitalière et mérite bien qu'on s'y attarde. Par sa position, c'est à partir de Melika, ce beau belvédère que l'on domine la majorité des autres villes du M'Zab. Les habitants de toute la bourgade soutiennent que Melika est très sale et traverse une crise socioconomique sans précédent, aucune infrastructure de base ne s'en préoccupe. La seule infrastructure qui aurait pu être la fierté des habitants de Melika, c'est la construction sur l'esplanade Loumades des 445 logements LSP, programmés depuis 1996, mais non achevés à ce jour ! Interrogé à ce sujet, le directeur de l'agence foncière de Ghardaïa explique son héritage de ce problème et semble plus que jamais déterminée à finaliser ces logements en dépit de la réévalutation du prix du mètre carré de ces logements, compte tenu de l'augmentation des prix des matériaux de construction et de la main-d'œuvre. La société civile, pour sa part, insiste résolument sur la sauvegarde de cette ville, longtemps marginalisée. II s'agit également de la sauvegarde et de la poursuite de la restauration du vieux ksar. Le rempart millénaire ceinturant une bonne partie de Melika et qui servait de bouclier durant l'occupation française est sur le point de s'écrouler. II représente un danger certain pour les habitants. Certaines habitations vétustes de Melika, classées patrimoine national, vont bientôt devenir un tas de ruines qui s'offriraient à la vue des visiteurs. Par le passé, une série d'expositions d'une architecture traditionnelle nous a pourtant révélé toute la beauté et la richesse d'un patrimoine en voie de disparition. « Le ksar de Melika est un louis d'or entre les mains d'enfants qui ne connaissent pas sa valeur », a affirmé un autre président d'une association gelée à son tour, soutenu par un groupe de vieux hadjis assis devant la porte d'entrée du village. Les yeux larmoyants, ils déclarent : « L'histoire ne se raconte pas uniquement à travers des livres, mais aussi avec des lieux comme celui-ci. La disparition de Melika signifie également l'effacement de la mémoire d'une ville millénaire. » Pour l'instant, les lieux sont en pleine agonie. C'est aussi celle de tout Melika, si l'on ne se presse pas de venir en aide à cette population. En effet, la localité ne bénéficie d'aucune infrastructure à même de pouvoir la désenclaver, malgré toutes les promesses formulées dans ce sens de la part des autorités locales. L'ensemble de la population, pour la plupart des jeunes (70%), est voué à l'oisiveté et au chômage. II est peut-être temps d'y remédier, comme le recommandent les associations en activité.