Aïn El Fouara, la gardienne du temple, est restée en poste pour assurer la permanence et accueillir comme à l'accoutumée les visiteurs de passage, venus pour boire son eau bénite. Les cafés du centre, comme de la périphérie, étaient bondés de férus des Noir et Blanc qui jouaient au Koweït une importante carte pour la suite des événements. A l'issue de la première mi-temps, les Sétifiens, des Ententistes invétérés se mettent à caresser le rêve. Les pronostics vont donc bon train. La reprise des débats replonge la séculaire cité dans un silence de cathédrale, même les enfants sont concernés par le foot un facteur de rassemblement. La réalisation de Maïza enflamme l'agglomération qui explose de joie. La suite du match a été, le moins qu'on puisse dire, infernale pour les chauvins ayant failli, aux ultimes secondes du match, craquer. L'excellent arbitre libanais libère les Sétifiens qui réinvestissent d'un coup, la rue transformée, des heures durant, en une grande scène de bal. Les tubes à l'honneur de la bande à Saâdane, ayant eu le mérite de redonner confiance au co-leader du championnat, sont, ça et là, entonnés tels des hymnes. Des cortèges de voitures et de divers engins roulants ont sillonné la cité, qui vibre au rythme de son club phare ne laissant personne indifférent. Qu'elle tourne bien ou mal, l'Entente est au cœur des discussions des Sétifiens, dont elle (l'Entente) est désormais une affaire de famille. Petits et grands, filles et garçons vivent au rythme de l'Aigle noir faisant, à l'instar de Aïn El Fouara et Sid El Khier, partie du patrimoine des hautes plaines sétifiennes égayées par la sortie des protégés de l'ex-patron des Verts. Mieux encore, l'Entente, un phénomène social, fait vibrer les enfants qui partent à l'école avec des survêtements, des bonnets, des écharpes en noir et blanc. La gent féminine, qui attend avec impatience le jour où elle peut investir le 8 Mai 1945 comme c'est d'usage chez nos voisins, n'est pas restée en rade : « Croyez-moi, des centaines, pour ne pas dire des milliers de filles, sont des inconditionnelles de l'Entente qui nous donne cette année du plaisir », dira Nassima une étudiante à l'université qui s'est mêlée, avec son père et ses petits frères, à la foule ayant, toute la nuit, donné libre cours à une indescriptible liesse que seul le sport le plus populaire peut procurer à Sétif, une terre de foot à la quête d'une couronne depuis plus de 20 ans. Cette année sera-t-elle la bonne ?