Le Mechmoum, intitulé du CD, se veut un écrin des multiples ivresses ravivées par les simples promesses de l'être aimé. « Promesses du temps qui passe et qui renouvelle nos passions, toujours les mêmes mais à chaque fois renouvelées », écrit Nour Eddine Saoudi dans le livret accompagnant le CD Rasd Eddhil chez Soli Music, présent dans les bacs depuis mercredi. Une jaquette sentant bon le bois de la forêt référence à Chréa ? avec un vert citron prédominant et le marron craquelé de l'arbre. La forêt à l'intérieur des six feuillets renferme la présentation de la nouba faite par M. Belarbi, l'ami de toujours de l'artiste, les traductions en langue française des Inqilab, B'taihi, Insiraf et Khlassat où la thématique de l'amour réconcilie le mélomane avec l'essence de la vie. Zarni El Melih et Sabri qalil sont, par exemple, l'illustration de ce jeu entre l'amour fou et l'impatience qui en découle inévitablement ; interprétée par Farid Khodja, cette nouba Rasd eddhil fera date dans le patrimoine musical du pays. Le Blidéen, qui a voulu l'écriture « kouffie » pour le titre de la jaquette, peut s'enorgueillir d'être le digne descendant de Dahmane Benachour, pour ne pas oser dire se mettre à côté de lui avec son rebab fétiche, hérité de l'oncle Mohamed Khodja et collé à lui comme un biberon. Les cœurs épris sauront trouver l'idéal sonore après lequel ils courent dans cet incessant mouvement de bruits divers, caractérisant ce début de siècle infernal. Repos de l'âme, place à la poésie, à l'amour avec des rappels même dans la police des caractères : « Du gothique pour le nom de l'artiste pour rappeler que cette musique était médiévale, elle-même insinuée avec la calligraphie kouffie du mot “Mechmoum” et la couleur rose de l'écriture pour le nom Khodja afin de ne pas oublier que la rose est la fleure qui émerge dans un vase », dira Farid Khodja tout fier de sa production. L'écorce retrouvée et présente au fil des pages du livret permet une sorte de promenade dans la forêt, en amoureux, protégés par l'ombre de cette forêt à aimer et à entretenir. Les mélomanes sauront apprécier cette conjugaison des modes d'expression où la sincérité et la vertu réconcilient avec la beauté de l'âme. Les cordes du rebab vrillent à travers les arbres et les branches, pleurant la bien-aimée devant partir à la venue de l'aube. Cet instrument, devenu la spécialité de Farid Khodja et Abdelkrim Raïs, du Maroc, a trouvé son disciple : c'est tout le Maghreb qui peut être fier, avec la réception de ce Mechmoum dédié à la nostalgie de la meïda matinale dressée dans le patio des maisons arabes, des quartiers d'El Djoun, Douirette, Bab Khouikha et Bab Zaouia où l' yasmine, fell, soltane El Ghaba et wridette ornent la s'nioua. Que de souvenirs pour nos grand-mères ! Et quel patrimoine à passer aux demoiselles et dames d'aujourd'hui ! Afin de perpétuer un art de vivre.