Bien que ce ne soit pas le propre de la wilaya, Béjaïa n'arrive toujours pas à chasser la pollution qui, par endroits, gagne du terrain. Il est loisible de le constater, en tout cas, à travers le dernier rapport de la direction de l'environnement dont la poignée d'ingénieurs, dépassés, donnent l'air de ne plus savoir à quelle tête de l'hydre faut-il s'attaquer. Traquer les fumées dans les airs ou les sachets noirs dans la nature ? Les huiles dans l'eau ou les déchets solides partout ? Il y a trois ans, 120 rejets ont été recensés dans la rivière de la Soummam qui recevait chaque jour 35 000 m3 d'eaux usées urbaines. Aujourd'hui, on se réjouit de n'avoir que 74 rejets mais, paradoxe, avec un volume de 37 000 m3/jour. Une évolution qui fait regretter presque les 120 rejets, moins polluants de 2004. En 2007, ce sont 2000 m3 d'eaux usées de plus dans l'oued, à couler aux côtés des forages destinés à l'AEP et à l'irrigation. M. Djini, le directeur de l'environnement, croit avoir une explication à cela : « Les ménages sont plus nombreux. » Sur la côte est, le nombre de rejets (29), venus polluer un peu plus la Méditerranée, a doublé. Deux stations d'épuration (STEP) ont été mises en fonction à Saket et Aokas. Cette dernière devra traiter aussi les eaux usées urbaines de Tichy. Pour la vallée de la Soummam, les « études sont achevées » pour trois STEP. Des projets qui viennent confirmer, si besoin est, que ces zones sont considérées comme les deux points chauds de la wilaya. En termes de pollution, cela s'entend. La pollution industrielle les menace également. Outre les huileries et stations de lavage, celle-ci vient des unités industrielles dépourvues de stations d'épuration. Sept seulement en ont. Le chiffre n'a pratiquement pas évolué ces dernières années. Faute d'esprit écologique doublé de « manque » de sous. A défaut d'une STEP, Icotal a trouvé la solution : sacrifier son atelier finition pour se contenter d'un bassin de décantation. Les textes ont la prétention de ne pas laisser, à l'horizon mai 2008, place aux unités polluantes. Toutes doivent se mettre à niveau. « Celles qui sont à créer ne s'installeront pas sans une STEP », a indiqué M. Djini lors de la dernière session de l'APW. Jusque-là, 8 dossiers seulement, sur les 63 études de danger et 47 audits environnementaux réalisés dans la wilaya, ont été approuvés par le ministère de tutelle qui a retenu, par ailleurs, le projet de réalisation d'une station de contrôle de la pollution atmosphérique à Béjaïa. Selon M. Djini, ce type de pollution est dans la ville de Béjaïa et pas sous le ciel de la Soummam, blanchi, tente-t-il de rassurer, par des « vapeurs d'eau ». Il s'est voulu, une nouvelle fois, lors du forum hebdomadaire de radio Soummam, rassurant quant à certaines entités économiques plus ou moins importantes comme Cevital dont « la station d'épuration est surdimensionnée », Alfaditex « la plus performante », et aussi de « Capritour, qui sera prochainement fonctionnelle à l'intérieur du village touristique ». Les huileries aussi polluent en rejetant margines et eaux dans le milieu naturel ou dans le réseau d'assainissement. Sur les 456 huileries de la wilaya, plus de la moitié n'ont pas de bassins de décantation. Si pour les transformateurs à Askarels, une entreprise espagnole compte les récupérer, le « désamiantage » des 114 établissements concernés par l'amiante et la récupération des sachets en plastique dans la nature ne sont pas encore réalité. Paradoxalement, il reste que pour la petite équipe de la direction de l'environnement, la situation « est parfaitement maîtrisée ». « Seul problème : les décharges », dit, un tantinet irréaliste, M. Djini. Réceptacle de tous types de déchets, la Soummam, et à un degré moindre l'oued Agrioune, donne l'image d'une grande marmite naturelle posée sur les fourneaux des pullulantes décharges fumantes qui la longent. Les fumées qui s'en dégagent, elles, ne sont pas de simples « vapeurs d'eau ».