Pour rien au monde, les amateurs de gnawi n'auraient raté le dernier concert du groupe Gnawa Diffusion. Preuve en est avec les processions humaines qui ont commencé à se former dès 17h à l'entrée de la Coupole Mohamed Boudiaf du complexe olympique du 5 Juillet où le concert était programmé pour 19h30. La prudence était de rigueur ce soir-là. Tout le monde voulait être le plus près de l'imposante scène afin de mieux voir leur idole et la star Amazigh et de s'enivrer de sa musique algérienne, maghrébine et africaine d'ébène et d'ivoire. La Coupole Mohamed Boudiaf qui peut contenir 6000 personnes était noire de monde aux alentours de 19h. Les vigiles ont eu du pain sur la planche pour filtrer cette jeunesse assoiffée de spectacles. Le coup d'envoi de cet événement a été étrenné par le passage sur scène du groupe gnawi The Djmawi Africa. Ce dernier, qui s'apprête à s'envoler pour la France afin d'enregistrer son premier album, a dévoilé au public quelques morceaux de son ancien et nouveau répertoires. Après trois années d'existence, le groupe a su s'imposer grâce à son travail et à son expérience scénique enrichissante. The Djmawi Africa se retire timidement de la scène pour laisser place à la vedette. Cependant, il y eut une demi-heure de flottement... Des voix s'élèvent dans le noir pour réclamer le chantre de la musique gnawi : Amazigh ! L'attente sera subitement écourtée. La silhouette de la bête de scène qu'est Amazigh Kateb apparaît au grand bonheur des uns et des autres. Sautillant dans tous les sens, le leader du groupe Gnawa Diffusion salue son public qui l'ovationnera frénétiquement. Des ballons jaunes... et des bouteilles en plastique voltigent dans les airs. Avant d'entamer son programme, l'artiste demandera aux présents de se recueillir à la mémoire des victimes des tragiques attentats du 11 avril dernier à Alger et ce en imposant une minute de silence. Juste après, Amazigh donne le « la » du show en lançant en langue arabe : « Nous sommes contents d'être là parmi vous à Alger. Nous sommes venus vous rendre visite... pour faire un boucan d'enfer ». Un tonnerre de rires et des applaudissements fusent de partout. Amazigh a ce don inné d'accaparer et de séduire son public. Un public connaisseur et fidèle à la fois. Après un istikhbar langoureux, Amazigh enfile son gumbri. Là, les choses deviennent plus sérieuses et plus électriques. D'une voix rocailleuse, il passera en revue certains anciens titres dont entre autres Salem Alikoum, Deca-Dance, Lalla Mira El-Gnawi, Charla-Town, Saki Baki ou encore Douga-douga, ses textes en arabe, en français et en anglais. Et puis, ces rythmes très métissés sont une invitation à la musique de l'Afrique noire. Le groupe gratifiera l'assistance de quelques extraits de son nouvel album ,un CD/ DVD Fucking Cow-boys qui est sorti le mois dernier en France. Etant sensible à tout ce qui se passe comme injustices dans le monde, Amazigh Kateb improvise une chanson intitulée Man Way en direction du peuple américain : « Les Américains sont implantés en Irak et là, ils veulent faire une base dans le Sud algérien », dit-il sur un ton mi-sérieux, mi-ironique. Il enchaîne en demandant une faveur. Il exhorte l'assistance de sauter au rythme de la musique. Personne ne se fait prier pour suivre le rebelle à la verve et veine engagées. Au bout de trois heures de spectacle, la lumière tamisée laisse place à un éclairage incandescent. Si tous les jeunes fans ont trouvé cette soirée mémorable, d'autres, en l'occurrence les aînés, ont été déçus par le répertoire décousu du leader du groupe. Un bonhomme frisant les trente-cinq ans, nous révèlera que les anciens concerts de Gnawa Diffusion étaient dans le passé à la hauteur des attentes du public. « Le dernier concert de Gnawa Diffusion à la salle Ibn Zeydoun était magnifique et très structuré. Là, le public a eu droit à des extraits décousus », affirme-t-il. Ce légendaire groupe greneblois qui après quinze années de carrière a décidé de se séparer pour d'autres horizons artistiques, sera en tournée à travers le monde jusqu'en août prochain. Comme Les Beatles, il laisse à la génération future un important legs. Souhaitons un parcours auréolé d'autres succès aux musiciens de Gnawa Diffusion.