Contrairement à ses deux précédentes visites de travail et d'inspection à Annaba (la troisième du genre), le président Bouteflika n'a pas trop discouru. Par ailleurs, il s'est difficilement exprimé sur le site de la nouvelle aérogare Rabah Bitat en construction pour déclarer d'une voix presque inaudible : « Si un quelconque retard est enregistré, vous n'avez qu'à reprendre tout à zéro. » Cela avait été dit comme s'il s'agissait d'une mise en demeure à l'entreprise égyptienne, Arab Contractor, en retard de 6 mois sur les délais de réalisation de cette infrastructure. M. Bouteflika était entouré des ministres de l'Intérieur, des Transports, des Ressources en eau, du Tourisme, des Travaux publics, de l'Education, de l'Enseignement supérieur, des Affaires religieuses et de l'Habitat. A son arrivée au niveau de l'échangeur, sa seconde étape avant de rejoindre le chef-lieu de wilaya, quelques vociférations d'un citoyen ont été entendues. L'auteur a été rapidement muselé par les gendarmes. A Annaba, pour le traditionnel bain de foule, le président de la République n'a laissé paraître aucune détermination dans sa marche à pied vers le siège de la wilaya. Bien que les rues et les places publiques prévues pour le passage du cortège présidentiel aient été peintes aux couleurs nationales avec des portraits géants du Président, cette visite officielle, étalée sur deux jours, ne s'est pas déroulée dans une ambiance festive. Entouré d'une garde rapprochée alerte et vigilante au point d'empêcher parfois les représentants de la presse d'accomplir leur mission convenablement, le premier magistrat du pays a visité plusieurs projets. Il n'a pas manqué de rappeler à chaque fois les efforts de l'Etat pour répondre aux préoccupations des citoyens. Il s'est quelquefois adressé aux ministres qui le suivaient comme son ombre. « Je veillerai à ce que les engagements de l'Etat soient respectés », disait-il d'une voix difficilement audible. « Vous devez réaliser ce projet aussi bien que ceux que vous avez réussis dans divers pays du Golfe », a-t-il martelé à la face du représentant de la société saoudienne Sidar. Cet investisseur étranger s'est vu attribuer le projet de la place du 19 Juin en plein centre-ville de Annaba. A la mosquée Abou Marouane de la vieille ville appelée à être restaurée, il a effectué la prière du salut aux lieux et écouté quelques versets du Saint Coran. A ce moment-là, c'est beaucoup plus son entourage direct (des ministres) qui paraissait avoir été chargé de parler aux jeunes et aux travailleurs réunis sur l'itinéraire du cortège présidentiel qui sont apparus au-devant de la scène. C'est le cas à la mosquée Abou Marouane, où Yazid Zerhouni, ministre de l'Intérieur, a parlé d'élections législatives et de l'aspect sécuritaire dans le pays. Il s'était exprimé à quelques pas de Saïd Bouteflika, frère et conseiller du Président. Les messages de Zerhouni Le message qu'il a fait passer était clair en ce qui concerne les élections. « Si fraude il y aura lors des prochaines législatives, ça sera le fait des candidats et des partis politiques eux-mêmes. Les citoyens de toutes les tendances doivent pouvoir s'exprimer librement dans le cadre des institutions démocratiques et républicaines. ». Clair également dans le domaine sécuritaire avec cette autre déclaration de M. Zerhouni : « Comme vous avez pu le constater ces dernières semaines, nous avons asséné de sérieux coups aux terroristes. Cela va se poursuivre jusqu'à leur éradication. La sécurité sera renforcée durant les législatives. » D'autres ministres, comme Abdelmalek Sellal, ministre des Ressources en eau, Maghlaoui des Transports, Benbouzid pour l'Education, avaient aussi presque le même type de messages à communiquer. Le Président a inauguré l'hôtel Majestic avant de se rendre sur le site de la Caroube et du cap de Garde. Des exposés sur la réalisation du viaduc et d'ouvrages d'arts urbains, sur les ports de pêche de Chetaïbi et Aïn Barbar, les zones d'expansion touristiques lui ont été présentés et a procédé à l'inauguration de la corniche du littoral de Annaba CW22. A Seraïdi, où l'attendait une foule nombreuse, le président Bouteflika a mis en service l'alimentation en gaz de ville de cette commune haut perchée et capitale de l'Edough. Pose de la première pierre du projet de réalisation de 288 logements sociaux participatifs, 362 promotionnels et 1 centre commercial à la Colline rose, celle du centre anticancéreux et inauguration du poste haute tension à Zaafrania, l'inauguration d'un établissement préscolaire à El Moukaouama et d'un lycée ont marqué les autres étapes. Il y a eu également l'inauguration de l'important pôle universitaire El Bouni avec ses 8000 places pédagogiques, la cité universitaire 3000 lits et un restaurant de 800 places. Le président de la République s'est attardé sur ce site pour procéder à la pose de la première pierre de la 2e tranche de ce pôle. Il porte sur la réalisation de 8000 autres places pédagogiques (4000 pour la faculté de médecine et 4000 autres pour celle de droit) ainsi que d'une cité universitaire de 5000 lits avec dépendances. Tous ces projets avaient pourtant été inaugurés précédemment par un ministre. C'est dire que sans être marquante, car loin des foules, cette première journée d'apparition publique et politique hors de la capitale du président de la République a été considérée comme étant une démonstration de force. Ou, plutôt, comme une volonté d'apporter un cinglant démenti aux rumeurs qui présentaient, la semaine dernière, le premier magistrat du pays comme étant très malade. Selon des universitaires spécialistes de la chose politique, elle est destinée à ceux qui auraient douté de la détermination et de la fermeté de Abdelaziz Bouteflika dans la gestion du pays. En fait, à Annaba, fatigué ou pas, le président de la République n'a pratiquement pas desserré les dents durant toutes les étapes de sa visite. Cette dernière intervient 48 heures avant le rendez-vous des législatives. Des sources locales avancent en outre que le chef de l'Etat a chargé à Annaba ses proches collaborateurs - dont son propre frère Saïd - de recenser les écueils qui freinent sa marche de chef d'Etat. A. Djabali , M. F. Gaïdi