Lors de sa dernière visite de travail et d'inspection à Annaba et contrairement à ses habitudes, Abdelaziz Bouteflika s'est exprimé avec des petites phrases. Elles étaient destinées à ses interlocuteurs directs qui lui expliquaient l'opportunité de tel ou tel autre projet socioéconomique. Annaba : De notre bureau Ce sont de hauts responsables d'institutions de l'Etat, opérateurs économiques nationaux ou étrangers, hommes ou femmes représentatifs de la société civile. Il les avait essaimés au fil de sa trentaine d'étapes à travers différentes communes de la wilaya. La première petite phrase, lourde de sens, avait été exprimée dès sa descente d'avion à l'aéroport Rabah Bitat. Informé que la société égyptienne Arab Contractors chargée de la réalisation de la nouvelle aérogare de Annaba avait déjà un retard de 6 mois, le président de la République s'est limité à dire au ministre des Transports : « Si le retard persiste, vous n'avez qu'à recommencer tout à zéro. » L'instruction n'a pas échappé au patron égyptien ne sachant sur quel pied danser. C'est une autre phrase que l'on entendra sur le site “19 juin”. Sur ce terrain d'assiette d'un important projet attribué à la société du groupe saoudien Sidar, le Président n'a pas fait dans la dentelle. Fluctuant sur le handicap algérien en matière d'entretien et de maintenance des infrastructures, il a déclaré à Mahmoud Zaied, le président-directeur général de Sidar qui l'écoutait avec une grande attention : « Pour la maintenance et l'entretien de vos futures installations évitez de solliciter les Algériens. Faites appel aux techniciens étrangers au contact desquels nos techniciens pourront apprendre la technologie. » Il a même conseillé à son interlocuteur représentant du groupe saoudien de donner le nom « Rotana » ou « Mariott » à la chaîne hôtelière qu'il compte réaliser à Sidi Salem. Ces deux petites phrases lancées par le premier magistrat du pays en deux sites différents et pour deux aspects différents ont démontré que Abdelaziz Bouteflika a laissé de côté la communication événementielle. Ce qui lui a permis durant les 48 heures passées à Annaba d'être très audible. Certes, ses instructions n'ont pas fait beaucoup de bruit médiatique, les journalistes ayant été empêché d'accomplir leur mission par les zélés du protocole. Mais en ce temps d'apparente lassitude physique du Président, elles ont dessiné les limites à ne pas dépasser et les directives à appliquer en matière de gestion des projets socioéconomiques en cours, à lancer ou à élaborer. Conscient que chacun de ses propos sont suivis et bien écoutés, le Président s'est efforcé à les ancrer dans des problématiques de fond. C'est le cas du site de la mosquée Abou Marouane à réhabiliter. Tel est aussi pour ce qui est de la réalisation de la grande Mosquée de Annaba, les ports de pêche et de commerce de Chetaïbi et de Aïn Barbar, le viaduc, le tramway, le téléphérique, les échangeurs, le dédoublement des voies et le tronçon d'autoroute Est/Ouest, les logements, les grandes conduites d'adduction en eau potable... Si sur le plan social, tous ces projets sont, selon les services de la wilaya, créateurs de plus de 40.000 postes de travail, ils sont aussi importants sur le plan économique. C'est pourquoi, toujours à l'aide de petites phrases Abdelaziz Bouteflika ne cessait de souligner l'utilité économique et pédagogique de ses déclarations. Tout en aiguisant l'appétit de ses interlocuteurs investisseurs étrangers, il a énormément insisté sur la nécessité pour les opérateurs algériens de bouger. Il faut dire que de tous les projets qu'il a visités, pas un seul dont la réalisation n'est à la charge d'une société algérienne d'études ou de réalisation. Arabes ou Occidentaux, les hommes d'affaires étrangers ont raflé l'ensemble des projets visités ou inspectés par le président de la République. A lui seul, le groupe saoudien Sidar en a décroché trois dans les secteurs du tourisme et des services. Un centre multifonctionnel en un point névralgique de la ville à quelques dizaines de mètres de l'hôtel Seybouse International, de l'historique Casbah et de la légendaire Vieille ville. Tours, hôtels, appartements, bureaux commerciaux, parking pour 1800 voitures à 3 niveaux seront érigés en ce lieu d'une surface de plus de 3 hectares. Le 2ème projet porte sur la réalisation en 36 mois de résidences touristiques grand standing avec fonds de commerce. Le village touristique sera implanté à Sidi Salem. Réalisable en 54 mois, il est formé de deux hôtels, d'un club sportif, centre de thalassothérapie, banques, assurances et plusieurs autres infrastructures d'accompagnement. Un autre projet portant la construction de 872 résidences touristiques a été abandonné. Il a été rejeté par le président de la République sur le site même de ce qui devait être l'assiette de terrain. Là également, l'on a eu droit à une autre petite phrase à l'intention de l'opérateur saoudien. « Réalisez des projets aussi beaux et aussi bien faits que ceux que vous avez réalisés ailleurs dans les pays du Golfe », avait-il instruit. Pour plusieurs membres de la délégation présidentielle, il s'agissait d'un rappel des critiques faites par Abdelaziz Bouteflika en marge du 9ème salon international du tourisme et des voyages. A eux seuls, les 3 projets du groupe saoudien financés sur fonds propres de la société et estimés à 9 milliards de dinars devraient générer 4000 postes de travail dont 1500 directs et 2500 indirects. En phase d'exploitation, ce sont 6000 autres qui seront créés.