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L'Algérie dans le ventre mou du classement africain
Performances économique, sociale et de gouvernance
Publié dans El Watan le 21 - 05 - 2007

L'Algérie est le second PIB de l'Afrique en 2006. Grâce bien sûr à la nouvelle ère des prix pétroliers. Mais ses autres classements liés à la performance de l'économie, de la gouvernance et des indicateurs de développement humain la relèguent loin des meilleurs… toujours en Afrique.
Le pays d'Afrique où il ferait le mieux vivre est l'Afrique du Sud suivie de I'île Maurice et du Botswana. C'est une combinaison de « ranking » basée sur une kyrielle de sources (la Banque mondiale, le FMI, le PNUD, la BAD, l'OMS, ect.) qui donne ce résultat dans le hors-série de Jeune Afrique sur l'Etat de l'Afrique en 2007 récemment paru. Le classement (ranking) (JA) est la synthèse de trois classements, politique, économique et social. Il place l'Algérie en 8e position derrière le podium déjà cité puis la Tunisie (4e), le Maroc (5e), la Namibie (6e) et l'Egypte (7e) sur les 53 pays africains. Il place aux trois dernières positions le Burundi, l'Erythrée et la Somalie. Certes le classement qui pénalise le plus l'Algérie est le moins rigoureux des trois classements. La gouvernance politique algérienne est placée au 18e rang africain. JA reconnaît que les critères de son classement politique sont discutables. Le statut des libertés individuelles et publiques ne semble pas y bénéficier du meilleur coefficient de pondération comme le montre, par exemple, le très flatteur classement de la Tunisie de Benali (10e) alors que la Mauritanie qui a élu librement son président de la République n'est que 32e à ce classement « politique ». Il n'en reste pas moins que la démarche globale de cette évaluation conserve par ailleurs suffisamment de sérieux (les bases de données utilisées sont neutres) pour interpeller les opinions nationales et les investisseurs étrangers. Un pays comme la Libye arrive en 17e position des performances globales à cause d'une désastreuse 48e place « politique » alors qu'avec les Seychelles il se retrouve ex aequo au premier rang du classement social des 53 pays africains.
De grosses faiblesses de compétitivité
La mise en concurrence des performances de l'économie algérienne sur le continent africain est un excellent révélateur de ses faiblesses persistantes. Certes l'Algérie s'inscrit quelquefois au palmarès des meilleures performances. Cela est toujours rattaché aux recettes pétrolières : excédent commercial, 1er rang devant le Nigeria et la Libye ; réserves de change 1re place devant la Libye. Dès qu'il faut passer aux indices d'attractivité, le tableau s'assombrit. L'Algérie est seulement le 8e pays qui a attiré le plus d'investissements directs étrangers en cumulé sur la période 2003-2005. Le Soudan, l'Angola, et la Guinée équatoriale ont fait mieux. Les choses se compliquent sévèrement lorsqu'on aborde la compétitivité de l'économie. Si l'on ferme la rubrique hydrocarbures, l'Algérie devient le 20e exportateur du continent. Le Kenya, le Ghana, la Zambie, tous au-dessus des 2,5 milliards de dollars, font beaucoup mieux. Même le Mozambique, le Sénégal et la Tanzanie (1,4 milliard de dollars) exportent plus de marchandises hors pétrole que l'Algérie. Le classement vire au désastre lorsqu'on évoque la valeur ajoutée de l'industrie dans le PIB. En Algérie, il ne représente que 5,3% certes d'un PIB supérieur à 100 milliards de dollars le seul second d'Afrique derrière les 240 milliards de dollars de l'Afrique du Sud. Mais ce 5,3% de valeur ajoutée industrielle dans la richesse globale créée dans l'économie algérienne en 2006 fait qu'elle se situe à la 36e place africaine de ce point de vue. La désindustrialisation de l'économie algérienne est le phénomène le plus accablant ces dix dernières années. Elle a mis le poids de l'industrie à un niveau tellement bas que des pays comme le Niger, le Cap-Vert ou la République centrafricaine ont proportionnellement un poids plus important de leur secteur industriel dans leur économie. Ces contre-performances patentes (il en existe d'autres) amènent l'économie algérienne à ne se classer qu'en 6e place africaine en termes de performance, et cela en dépit du second PIB du continent. Le classement de JA basé sur les indices déjà cités situe l'Afrique du Sud en tête suivie des trois pays d'Afrique du Nord, l'Egypte, le Maroc et la Tunisie. L'île Maurice s'intercale devant l'Algérie.
Le mythe social écorné
Le grand mythe de l'Algérie pays social prend également un coup dans le ranking de JA appuyé sur les indicateurs de développement humain de la Banque mondiale. L'Algérie est classée 10e derrière le Gabon (7e), l'Egypte (8e) et la Namibie (9e). La Libye et les Seychelles se partagent la première place devant l'Afrique du Sud, l'île Maurice, la Tunisie et le Botsawana. Le social est le dernier domaine où le Maroc n'a pas encore dépassé l'Algérie. Mais il est tout juste derrière à la 11e place. Les principaux indicateurs utilisés sont le PIB par habitant, la scolarisation, les dépenses de santé par habitant, l'accès à l'eau potable et la consommation d'électricité par habitant. Les parités monétaires peuvent créer un biais à ce niveau. Par exemple le Maroc et l'Egypte arrivent devant l'Algérie dans les dépenses de santé par habitant ce qui est probablement un effet de niveau de prix intérieur des services hospitaliers et des médicaments. Il n'en reste pas moins que l'Algérie n'est sur le podium d'aucun indice social, 10e pour le PIB par tête, 7e pour la scolarisation, 12e pour les dépenses de santé, 11e pour l'accès à l'eau potable et 8e seulement pour la consommation d'électricité ce qui est également surprenant. L'Algérie 8e pays en Afrique par les performances combinées de son système politique, de son économie et de son système social ? Finalement sa place est tout à fait justifiée. Lorsqu'on rentre dans les dédales des stratégies d'entreprise à l'international, on réalise combien l'Algérie est restée renfermée sur elle-même pendant que des entreprises africaines d'Afrique australe, d'Egypte ou du Maroc partent à la conquête du continent dans leurs métiers. AJ avait consacré il y a un mois un hors-série à l'Algérie intitulé « un futur géant ». Les annonceurs publicitaires algériens ont sans doute apprécié. Le classement africain lui dit cette fois que le géant est toujours en salle d'accouchement.


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