Coincé entre la cité Emir Abdelkader et le plateau du Mansourah, le quartier El Kantra, ou Bab El Kantra pour les initiés, est l'un des plus vieux quartiers de la Ville des ponts, si l'on excepte la Médina. De conception coloniale, Bab El Kantra a longtemps été un faubourg tranquille où l'on aimait se promener, jusqu'à ce que la déliquescence l'atteigne comme tant d'autres cités de Constantine. « J'estime que c'est une véritable hogra qu'est en train de subir notre quartier. Toutes les bâtisses coloniales ont fait l'objet de réfection, sauf celles de Bab El Kantra. Pourquoi ? Comme vous pouvez le remarquer, tout le bâti tombe en ruine et cela ne semble déranger personne. Les propriétaires retapent comme ils peuvent. Mais là où il y a un relent de location, je pense qu'il y a urgence que l'Etat prenne en charge les travaux de restauration, sinon on va vers une véritable catastrophe, surtout par temps de gros orages », nous dira ammi Mohamed, un retraité. C'est vrai que par temps de grosses giboulées, Bab El Kantra se transforme en quelques minutes en un véritable marais du côté de la SNTF. C'est là que se rejoignent les avenues Madaoui et Khaznadar, un point culminant quand il s'agit de la bêtise humaine, puisque l'APC n'a jamais pu résoudre les problèmes d'inondation du quartier, des problèmes qui perdurent depuis des décennies. Pourtant le quartier ne manque pas d'infrastructures de base : des lycées, des CEM, des écoles, des boucheries, un marché, une agence CNAS, Sonelgaz, et bien sûr beaucoup de pizzerias et autres fast-food. Par contre, et comme la majeure partie des cités de la ville, les routes sont défoncées. « Il faudrait que le cortège du président passe par notre quartier, rajoutera notre interlocuteur, pour qu'on puisse peut-être lorgner El Kantra. » Et pour que la boucle soit bouclée, Bab El Kantra est l'un des quartiers vers lequel le transport public ne va jamais, le seul qui ne soit pas relié au centre-ville par des taxis. Il y a bien une station, mais la seule destination vers laquelle les chauffeurs de taxis daignent vous transporter, reste le plateau du Mansourah, à quelques centaines de mètres plus haut. Ne quittons pas le quartier et les transports sans « dénoncer la torture au quotidien que subissent les riverains à cause du bruit des trains », selon les mots d'un pharmacien habitant les lieux, qui ajoute ceci : « Par exemple, celui qui part à Alger à 6h35 entre en gare la veille vers minuit et reste moteur allumé jusqu'au départ. Je vous mets au défi de trouver une personne du quartier,face à la gare qui fait ses huit heures de sommeil normalement. »