Connaissez-vous Nessma TV ? C'est une chaîne de télévision tunisienne, diffusée via Arabsat et Nilesat, devenue visible grâce à la Star Academy Maghreb. Il fallait trouver l'idée ! La real TV a fait des émules dans tous les pays, pourquoi pas en Afrique du Nord. Nessma TV y a pensé. Elle vient chasser sur les terres des chaînes saoudiennes et libanaises Rotana, MBC et LBC. Propriété des frères Nabil et Ghazi Karoui, la chaîne au visuel rouge émet à partir de Paris et aspire à se placer en première place au Maghreb. “Nessma est une brise d'air frais pour le Maghreb, car elle innove dans le secteur des médias et de la communication”, poétise Meriem Bezazi, responsable des médias de la chaîne, interviewée par le journal on line Afrik.com. Elle ajoute : ”Elle a été créée car aucune chaîne de télévision ne couvrait, jusque-là, la région du Maghreb, malgré les nombreuses chaînes nationales, aussi bien privées que publiques, existant dans les quatre pays du Maghreb qui sont le Maroc, la Tunisie, l'Algérie et la Libye.” Ambition dévorante ! Nessma TV diffuse une version soft de la Star'Ac, “une formule familiale” pour reprendre l'expression d'un responsable de la chaîne. Pas de caméra dans les chambres ou dans les salles de bain, pas de partage de chambres entre garçons et filles... L'audimat, principalement jeune, suit de près l'évolution des candidats avant la grande finale. Les Algériens Badro et Djamel sont devenus des célébrités. Autant que les Marocains Abdelhamid ou Hadjar, le Libyen Hamid ou la Tunisienne Soraya. Occasion pour les opérateurs de téléphonie mobile de faire de bonnes affaires puisqu'il faut voter par SMS. Contrairement aux marocains ou au tunisiens, les algériens s'y intéressent moins. La Star'ac de la LBC, qui a fait connaître l'algérienne Rym Ghazali, avait attiré plus d'attention. Pour se mettre en orbite, Nessma TV s'est alliée à Endemol, groupe néerlandais à l'origine, racheté, récemment, par Mediaset, le groupe de Silvio Berlusconi, ex-président du Conseil italien, et par Goldman Sachs (GS), banque américaine d'investissement spécialisée, entre autres, dans la gestion des fortunes de personnes influentes. Endemol, qui depuis 1994 évolue à un rythme soutenu, a acheté des entreprises de production télévisuelle dans vingt-quatre pays et a des actions à Jetix, chaîne de télévision du groupe Disney. Son chiffre d'affaires dépasse 1 milliard d'euros par an. En France, en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis, Endemol produit de célèbres émissions comme A prendre ou à laisser, Fear Factor, Attention à la marche, Le Soiring, Les enfants de la télé, On ne peut pas plaire à tout le monde, Big Brother... Benoît Delmas et Véronique Richebois, journalistes français, ont écrit en 2006, dans L'histoire secrète d'Endemol, que cette multinationale pratique le culte du secret. “Une méfiance névrotique envers les journalistes”, ont-ils constaté avant de préciser : “Avec près de deux milliards d'euros de capitalisation boursière, elle constitue un Etat dans l'Etat de l'audiovisuel mondial (...)Connexions politiques, mainmise sur de nombreuses entreprises clefs, culte du résultat et cynisme sans états d'âme : la forteresse Endemol recèle d'infinis tiroirs”. Personne ne sait ni à Tunis ni à Paris ce que sera Nessma TV après la Star'ac. Jusque là, l'habillage d'antenne se fait avec des clips... Autre chaîne de télévision tunisienne, plus ancienne que Nessma TV, Hannibal TV, propriété de l'homme d'affaires Larbi Nasra, diffuse depuis février 2005. A caractère généraliste, la chaîne, qui aspire adapter un ton décalé, cible également le public jeune. “Interactive et ouverte à son environnement, elle est en premier lieu tunisienne”, précise-t-on à la direction de la chaîne. Comme Nessma TV, Hannibal évite de diffuser des journaux télévisés, des talk-show politiques ou des débats contradictoires. Lisse et douce, Hannibal fait dans les programme à mi-chemin entre le people et le grand public. Samir El Ouefi anime presque la même émission que propose l'ENTV, Saraha Raha : des personnalités de l'art, des sports et la vie sociale viennent livrer des confidences. Farragh Qalbek (vide ton cœur) va dans le même sens. Ala Chebbi et Farah Ben Amara propose aux téléspectateurs de dire leur mal, de parler. Aucun risque n'est pris puisque le contact se fait par SMS (les opérateurs de téléphonie mobile tirent également leur épingle du jeu). Pas question de s'en prendre aux méfaits de la police politique de Zine Al Abidine Ben Ali ou d'évoquer la répression qui s'abat sur les opposants. Même les documentaires diffusés sont triés : Le Monde des explorateurs, L'amour de la nature, Adventure Guide... Pas de reportages sur la vie sociale, sur l'économie, sur la politique internationale... Rien. Normal pour une chaîne qui a débuté ses programmes par la lecture d'une lettre de Zine Al Abidine Ben Ali et qui porte le nom d'un général carthagoinois ! Hannibal TV vient d'établir un accord publicitaire avec le groupe France Télévisions (France 2, France 3, LCP....) Début décembre 2006, la radio franco-marocaine Medi 1 se dote d'une chaîne de télévision : Medi 1 Sat qui diffuse sur satellite Hotbird à partir de Tanger. La chaîne a une ambition plus grande que Nessma TV ou Hannibal et un ton de parole plus libre. Des journaux télévisés, en arabe et en français, des débats et talk show sont proposés téléspectateurs...Medi 1 Sat veut être une chaîne méditerranéenne concentrée sur le Maghreb. Elle n'a pas l'ambition de concurrencer les chaînes internationales comme Al Jazeera ou BBC. S'adaptant à une tendance actuelle, Médi 1 Sat, dirigée par Pierre Casalta, a recruté des journalistes de plusieurs pays comme la Tunisie, les Emirats arabes Unis, l'Algérie et la France. L'algérienne Leila Bouzidi, qui s'est illustrée à l'ENTV par une émission de bonne facture “Mina al hayat”, présente les journaux du soir de Médi 1 Sat. Chance qu'elle n'aurait peut être jamais eu à l'ex-RTA où la présentation des JT est “un domaine” réservé. France 24, qui émet en français, en arabe et en anglais, et Russia Today, qui diffuse en anglais et en arabe ont, elles aussi, recruté des journalistes de différentes nationalités. Medi 1 Sat forme, elle même, ses reporters et présentateurs. Denis Wittenberg et Marc Saikali, des anciens de France 3, dirigent la rédaction francophone. Doté d'un capital de 15 millions d'euros, propriété de Maroc Telecom, de Medi 1 et la française Compagnie internationale de Radio télévision, Medi 1 Sat diffuse depuis le 21 mai 2007 en matinée et envisage de lancer une série d'émissions nouvelles à partir de septembre prochaine Le Maroc, qui s'est doté d'une loi de libéralisation de l'audiovisuel et d'une autorité de régulation, possède déjà plusieurs de chaînes de télévision détenus par l'Etat, comme RTM, 2M, Al Maghribia, Assadissa, et des radios libres qui émettent depuis l'été 2006. Qu'en est-il en Algérie ? Rien, deux fois rien. Il n'existe aucune volonté de démonopoliser les ondes et de permettre à des radios et des télévisions libres d'exister. Aucun argument valable n'explique cette situation. L'ENTV traîne seule sur le terrain. Jusqu'à quand ?