Du côté des étudiants : Sachant qu'ils doivent rattraper une année, il faut des étudiants brillants, motivés, qui ont choisi la spécialité et non des étudiants qui, faute de places en médecine ou en architecture, se retrouvent en sciences exactes. Ils doivent être tous détenteurs de baccalauréat option « mathématiques » ou à défaut des « sciences de la nature et de la vie » (Ah ! quelle belle spécialité). Ils doivent préparer et consulter les polycopiés avant chaque cours. Ils ont une idée sur le contenu du cours qui sera dispensé à son heure habituelle. Ils préparent leur série d'exercices. Ils connaissent la difficulté de chaque exercice avant le début de chaque séance de TD. Ils proposent et orientent le maître-assistant qui les assiste, à leur fournir des indications ou des corrections pour les exercices non élémentaires et difficiles. Ils ne doivent pas perdre du temps sur des exercices élémentaires. Ils peuvent les faire tout seuls. Ce n'est qu'après un tel effort, que les étudiants seront autorisés à accéder à la bibliothèque et consulter d'autres ouvrages pour pouvoir apprécier les différentes approches d'un cours particulier. Ils peuvent même comparer une approche anglo-saxonne à une approche française ou russe ou autres. Avec ces bagages en main, ils peuvent aller surfer sur d'autres sites de mathématiques des universités du monde. Dans les nouveaux textes du LMD, un tuteur est attribué à chaque étudiant. Le tuteur est celui dont la tâche consiste à faciliter le processus d'interaction entre l'étudiant et le contenu du programme. Le tutorat apparaît traditionnellement dans la formation en alternance, la formation alternant avec le travail en entreprise. Cette notion renvoie à une certaine prise en charge « morale » de l'étudiant, elle évoque une disponibilité différente de celle du formateur classique. Le tuteur est l'enseignant chargé de suivre l'étudiant en formation, de l'assister dans son parcours. Il est considéré comme un accompagnateur, un guide, une personne ressource dans un processus dans lequel l'étudiant élabore lui-même ses propres connaissances. Son rôle consiste non seulement à transférer des connaissances, mais aussi à aider l'étudiant dans son processus personnel d'apprentissage et d'assimilation de connaissances. Dans ce cas, on peut parler d'auto-formation assistée (1). A chaque niveau de la licence, première année, deuxième année et troisième année, pas plus de deux étudiants seront suivis sérieusement par chaque enseignant. En faisant un décompte, pas plus de six étudiants seront associés à chaque enseignant. Un nombre de 6000 à 7000 enseignants permanents est indispensable pour la réussite de ce système au niveau de notre université. Disposons-nous de ce nombre d'enseignants ? Non, sauf si tous les universitaires algériens à l'étranger regagnent le pays, et ne seront affectés qu'à notre université. Du côté de l'administratif : Est-il possible que chaque université dispose d'un site web ? Pour que toutes les facultés, leurs département respectifs, leurs équipes ou staffs pédagogiques et de recherches peuvent mettre à jour leurs cours, leurs TD, leurs examens, leurs corrections, leurs sujets de thèses à proposer, leurs travaux de recherches, leurs curriculum vitae, etc. Le LMD nécessite une formation médiatée et de nouvelles technologies de formation doivent être disponibles. C'est une formation fondée sur l'usage d'un média qui vient, en quelque sorte, s'interposer dans la communication enseignant-étudiant, voire s'y substituer. Le média ou médium (1) désignera tous les systèmes permettant d'établir des liens, de faire circuler des messages ou des informations entre les individus, en temps réel aussi bien qu'en temps différé. L'enseignant qui, pendant un cours, déclenche une séquence audiovisuelle enregistrée, en est l'émetteur mais pas nécessairement l'auteur. Dispose-t-on du multimédia, des centres de ressources multimédia, des moyens audiovisuels et des supports physiques, véhicules du message, en un nombre suffisant ? Les moniteurs d'ordinateurs, la télévision, l'imprimerie, le câble, les ondes hertziennes, les livres, les data-shows, les micros portables, les rétroprojecteurs, etc. Les responsables de ce système LMD ne savent pas et n'ont pas encore tranché sur le mode d'évaluation à utiliser les crédits ou la moyenne sur vingt. Beaucoup de points ne sont pas clairs et ne sont pas élucidés, même dans la tête des responsables. La licence est-elle avec ou sans mémoire ? Le mastère sera-t-il un diplôme de graduation ou de post-graduation ? L'ingéniorat et le magistère actuels sont des diplômes respectivement de graduation et de première post-graduation. Les responsables communiquent certaines données à « doses homéopathiques ». Pourquoi nous comprenons-nous si mal dans nos échanges pédagogiques ? L'année dernière, j'ai participé à une délibération de fin d'année où j'ai signé un procès verbal de notes favorablement et on a déclaré un étudiant de première année admis en deuxième année avec 08,75 sur 20. Il avait 30 « crédits » sur 60. Les responsables nous ont incités à prendre en considération le cas le plus favorable pour l'étudiant, crédits ou notes. Le « crédit » est la nouvelle notation à la place de la moyenne. Dans le temps, beaucoup d'étudiants à 09,5 sur 20 n'ont pas été compensés en notation (qui n'est pas un droit de l'étudiant) et déclarés admis ? Ils ont refait l'année. Qui a dit que ce nouveau système relèvera le niveau ? Les étudiants admis en une classe supérieure, qui ont des dettes en termes de crédits, suivent les cours de leur année d'admission, mais, faute de temps, ils ne peuvent pas assister aux cours de modules non acquis. Peu de chances de réussite dans ses modules non acquis leur sont accordées. Dernièrement, sur les ondes d'une radio locale, j'ai entendu le responsable du LMD de l'Université de Boumerdès annoncer que pour l'année prochaine, tous les étudiants titulaires de la nouvelle licence seront autorisés, sans concours, à préparer le mastère. S'il le fait pour cette première promotion, ne doit-il pas le faire pour les promotions ultérieures ? Dans l'avenir, aucun concours d'entrée en mastère ne peut être institué. De ce fait, nous serons appelés à former des mastères en cinq années. Les étudiants, qui auront acquis difficilement la licence, feront de droit le mastère. Au lieu de produire un diplôme d'ingénieur, nous produisons deux diplômes, une licence et un mastère. Sachant que le papier des diplômes est de qualité supérieure, importé des confins du Canada ou de la Finlande, nous épuiseront inutilement les caisses de l'Etat. Une question me trotte encore dans les méninges : Y-a-t-il un FMI pédagogique et scientifique qui nous impose des systèmes ?Qui va doucement, arrivera sûrement. Références : 1) J. C. Marot et A. Darnige. La Téléformation. « Que sais-je ? » Presses universitaires de France, 1996. L'auteur est Maître de conférences