Les producteurs de lait comptent demander plus de subventions aux pouvoirs publics afin d'éviter d'augmenter les prix du lait en sachet, selon M. Ziani, président de la Fédération nationale de l'industrie agroalimentaire, agriculture et pêche, affiliée à la Confédération des industriels et producteurs algériens (CIPA), dont les membres se sont réunis hier au siège de cette organisation en présence du secrétaire général du ministère de l'Agriculture, Abdeslam Chelghoum, et le président-directeur général de la BADR, Boualem Djebar. La Badr a accordé des indemnisations pour un montant de 874 millions de dinars algériens pour 41 producteurs de lait. Ces derniers restent cependant sceptiques. Ils estiment que les 15 DA par litre accordés en vertu d'un accord signé en avril dernier ne leur permettent plus d'entrer dans leurs frais. Ils imputent cette situation à la flambée des prix de la poudre de lait qui est passée en quelques mois d'environ 2000 dollars la tonne à presque 5800 dollars la tonne sur le marché international. Les producteurs ont essayé de recourir à la collecte de lait cru chez les éleveurs bovins algériens afin d'y remédier. Mais cette alternative n'a été d'aucun secours pour eux. « Nous n'avons pas trouvé la quantité suffisante », souligne Jawed Bererhi, représentant de l'entreprise privée Monlait, située à Oued Smar (Alger). « La qualité est différente d'une collecte à l'autre et c'est difficile d'homogénéiser. Cela nécessite de lourds investissements, mais il faut d'abord qu'on trouve un approvisionnement régulier en lait cru », a-t-il expliqué. Monlait continuera donc à importer de la poudre pour pérenniser sa production. M. Bererhi assure que celle-ci fonctionne à perte actuellement. Les subventions accordées par les pouvoirs publics ont été une véritable bouffée d'oxygène, selon lui, mais les lenteurs de remboursement ont pénalisé la bonne marche de l'entreprise. « Nous avons reçu les subventions pour les mois de mars et avril, mais nous n'avons encore rien vu pour mai et juin », a-t-il fait savoir. Le représentant de la laiterie Pâturages d'Algérie, M.Ounnoughene de Tizi Ouzou, estime pour sa part que les subventions sont une solution de facilité. « Ceux qui acceptent les subventions de l'Etat ont des arrière-pensées. Beaucoup de gens vont se ruer pour investir dans le lait et bénéficier des subventions », a-t-il signalé. Pour lui, la collecte du lait cru peut être la solution pour peu qu'« on laisse l'initiative au privé avec un rôle de régulateur pour l'Etat ». Pâturages d'Algérie utilise à 90% la poudre de lait importée pour sa production. M. Ounnoughene fera remarquer que le coût de revient se situerait entre 48 à 52 DA, alors que le prix affiché dans le marché est de 25 DA. Les difficultés que rencontrent les éleveurs bovins se répercutent sur les producteurs de lait, note M. Ounnoughene. « Il n'y a pas d'encouragement sur le terrain. L'importation est plus rentable. La poudre de lait est subventionnée en Europe et elle n'est sujette à aucune taxe à l'importation ici en Algérie. Les opérateurs préfèrent importer du lait propre, contrôlé et pas cher plutôt que d'investir dans la collecte et la production et devoir gérer les problèmes de qualité et de transport et faire face à une concurrence déloyale », a-t-il indiqué tout en avertissant que si le statu quo persiste, il devra mettre la clé sous le paillasson. Le secrétaire général du ministère de l'Agriculture et du Développement rural, Abdeslam Chelghoum, reconnaît qu'il y a un désinvestissement dans ce domaine. Sur les 2,2 milliards de litres de lait produits en Algérie, seuls 220 millions de litres, soit 10%, sont collectés. La solution à ce problème passe par la mise en place d'une véritable politique de collecte et une coordination entre les éleveurs bovins et les producteurs de lait, a-t-il soutenu. Les opérateurs économiques algériens ou étrangers, qui souhaitent investir dans ce créneau, seront encouragés, a-t-il assuré. Il n'en demeure pas moins que la crise du lait n'a toujours pas été désamorcée et risque de se répercuter sur le consommateur qui aura à payer le prix fort.