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Le parquet requiert les peines maximales prévues par la loi
Procès du séisme de Boumerdès
Publié dans El Watan le 22 - 07 - 2007

Le procureur de la République près le tribunal de Boumerdès, Belhadj Abdelmadjid, a requis hier, 10e jour du procès, les peines maximales prévues par le code pénal à l'encontre de 33 accusés, parmi les 38 poursuivis pour « homicide involontaire, blessures involontaires, fraude dans la qualité et la quantité des matériaux de construction et non-respect des normes et de la réglementation » dans l'affaire du séisme de mai 2003.
Boumerdès : De notre bureau
Le procureur a en outre requis 2 ans de prison ferme et 100 000 DA d'amende à l'encontre de 2 autres accusés et l'acquittement pour 3 autres. Le représentant du ministère public a requis 3 années de prison ferme et 100 000 DA d'amende à l'encontre de la majorité des accusés, dont le PDG de l'EPLF, Selkim Mohamed, l'ex-DG de l'OPGI, Heni Ada Kamel, le DG d'une filiale de la SNTF, Ziadi Mouldi, et les ingénieurs du CTC ainsi que les responsables des bureaux d'études, du suivi des chantiers et d'entreprises privées de construction. Il appuie son réquisitoire sur les « anomalies et les irrégularités relevées par la commission d'enquête gouvernementale et les expertises ordonnées par la justice ». M. Belhadj a en fait refait le tour des 13 projets cités dans l'arrêt de renvoi, avançant les « anomalies et irrégularités » relevées dans les différents chantiers. Le représentant du ministère public, dont le réquisitoire a duré plus de 4 heures, a conclu à « la négligence, le laxisme, l'imprudence, la fraude et la non-application de la réglementation » pour les 35 accusés, chacun en ce qui le concerne, et pour lesquels il a requis des sanctions. Premier parmi les 48 avocats de la défense à prendre la parole, Me Miloud Brahimi a livré une plaidoirie magistrale. « Nous voilà dans une situation paradoxale : le parquet requiert la peine maximale prévue et la défense, défenderesse des libertés individuelles et collectives, va certainement réclamer l'acquittement. Cet écart laisse la société sans espoir. Nous n'avons pas besoin de victimes de la justice pour soi-disant rendre justice aux victimes du séisme. Le temps des sacrifices humains suite aux catastrophes naturelles, tel qu'il se pratiquait chez beaucoup de peuples, comme les Incas en Amérique, est révolu. Nous sommes en train de reproduire la célèbre phrase de Tarek Ibn Ziyad ‘‘Devant vous est l'ennemi, derrière est la mer ; où fuir ?'' en direction de nos cadres gestionnaires, à la différence qu'au lieu de l'ennemi et la mer, nous avons le policier et la justice », a-t-il dit. Saluant le courage et le professionnalisme du juge Redouane Benabdallah, l'avocat a cependant invité celui-ci à « faire attention à l'overdose si l'on doit insister sur le caractère pédagogique du procès ». « La judiciarisation de la vie publique ne s'accommode pas d'abus. Il serait dangereux pour la justice de se sacrifier à d'autres considérations que celles de droit, comme les pressions », ajoutera-t-il avant de s'interroger : « Pourquoi spécialement le séisme de Boumerdès ? Pourquoi pas celui de Chlef, les inondations de Bab El Oued ? Pourquoi avoir exclu d'autres cités où les dégâts sont aussi importants si ce n'est plus, comme Réghaïa et la cité 1200 Logements. Est-ce parce que ces dernières ont été réalisées par la DNC et Sonatrach ? Pourquoi la plainte a-t-elle été jugée irrecevable à Alger ? »
Evaluation difficile
L'avocat réclamera rien moins que l'acquittement pour son mandant, Boumaza Habib, chef de projet des 252 logements EPLF des Issers qui est, dira-t-il, irréprochable et qui n'a rien à voir avec la responsabilité, puisqu'il n'est pas entrepreneur. Me Brahimi évoquera ensuite le cas du directeur de l'EPLF, Selkim Mohamed, qui « est une institution », insiste-t-il. « L'Etat ne l'a pas démis de ses fonctions ; il a fourni des efforts pour rendre service à l'Algérie. Tous les accusés sont encore à leur place, ils continuent à travailler, certains ont même participé dans le programme de reconstruction après le séisme. Le seul à avoir été ‘‘relevé'', car muté à Chlef, c'est le premier juge d'instruction qui a prononcé, à deux reprises, un non-lieu dans cette affaire. Pourquoi ne pas avoir appelé le directeur qui a précédé Selkim au poste de PDG et qui était en poste lors du lancement des projets incriminés ? », poursuit l'avocat. « Pourquoi ne pas poursuivre le ministère de l'Habitat pour l'absence d'un zoning approprié, malgré l'existence d'une étude américaine fiable depuis 1999 recommandant à l'Algérie de revoir le zonage des wilayas entourant Alger ? », s'interroge-t-il encore. Me Brahimi n'a pas manqué d'aborder l'aspect juridique de l'accusation et du dossier en général, s'appuyant parfois sur l'avis des scientifiques, citant les propos du Pr Chelghoum publiés dans El Watan d'hier selon lesquels « il y a eu certes des erreurs humaines dans l'acte de bâtir, mais la véritable cause de l'effondrement des bâtisses est à chercher ailleurs ». Il rappellera au parquet que les ordonnances de non-lieu, avec un total de 163 pages, qu'il trouve parfaites, ont été « contrecarrées » par de menus dossiers. Reprenant une déclaration du CGS, Me Brahimi dira qu'il est difficile d'évaluer la part de responsabilité dans l'effondrement d'une bâtisse après le séisme. « Cela ne peut être que subjectif », dira-t-il. « Et personne n'a répondu à la question principale qui se pose dans cette affaire : qui est responsable de l'effondrement des bâtisses ? En tout cas, s'il n'y avait pas eu de séisme, il n'y aurait pas eu de victimes », tranche l'avocat qui dira que, même sur le plan de l'interprétation des lois en fonction des chefs d'inculpation d'« homicide et blessures involontaires », l'accusation est discutable.


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