Des peines maximales ont été requises, hier, par le procureur de la République contre 33 personnes sur les 38 accusées d'homicide et blessure involontaire, tromperie dans la qualité des matériaux, non-observation des règles de construction et d'urbanisme. Ainsi, le procureur a requis trois ans de prison ferme et 100 000 DA d'amende à l'encontre de ces personnes parmi elles des responsables d'entreprise, des responsables de bureau d'études, des techniciens CTC, et des entrepreneurs alors qu'une peine de 2 ans de prison ferme et 100 000 DA a été requise contre deux autres accusés. Tout au long de son réquisitoire, qui a duré presque cinq heures, le procureur de la République, Belhadj Abdallah, a longuement insisté sur les anomalies relevées sur les constructions effondrées par les deux commissions composées de techniciens et d'experts mises en place par les pouvoirs publics. “Ces experts et ces spécialistes ont motivé les dégâts causés par la puissance du séisme et les erreurs humaines enregistrées dans la chaîne de la construction”, a indiqué le procureur avant d'ajouter que des experts assermentés ont été engagés par le juge d'instruction pour examiner et approfondir les conclusions de ces deux commissions. “Mais ces experts sont arrivés à la même conclusion en désignant, eux aussi, la puissance du séisme et les anomalies relevées dans l'acte de bâtir”, a poursuivi le procureur et d'ajouter que “la justice a fait appel à deux experts de renommée mondiale que j'assimile à des savants comme le directeur du Craag, M. Yellès Chaouch, le Pr Chelghoum ou Mohamed Belazougui, directeur du CGS qui ont établi le même constat”, a précisé M. Belhadj. “Beaucoup de négligences et des maladresses ont été signalées, mais aussi des cas de tromperie dans la qualité des matériaux relevés notamment au niveau du béton utilisé et pour lesquels il y a lieu d'appliquer les articles 288, 289 et 428 du code pénal”, a-t-il encore ajouté. Le procureur s'est étonné que des entreprises et des responsables à l'origine de la mort des gens se disent victimes du séisme en faisant allusion à l'OPGI de Boumerdès qui s'est portée jeudi dernier partie civile dans cette affaire. Les avocats de la défense se sont soulevés contre ces peines qu'ils ont jugées sévères et le premier à intervenir fut Me Brahimi qui a regretté qu'on continue de malmener les cadres algériens notamment ceux qui appartiennent aux entreprises publiques. “Nous avons connu d'innombrables scandales où des cadres ont été emprisonnés sans motif et sans raison valables et on continue encore à viser ces cadres”, a affirmé Me Brahimi qui refuse que son client, un chef de projet, soit désigné coupable à la place de l'entrepreneur décédé. L'avocat se demande pourquoi n'a-t-on pas fait appel aux gens de la DNC et de la Sonatrach qui ont construit la cité des 1 200-Logements où plus de 600 personnes sont mortes. Comme il s'est étonné des sites de Réghaïa situés à 20 km qui sont complètement ignorés par la justice. Me Brahimi s'interroge encore une fois sur des raisons ayant conduit la mutation du juge d'instruction qui avait ordonné à deux reprises des non-lieux sur cette affaire. “La même décision a été prise au niveau de la cour d'Alger, mais la chambre d'accusation n'a pas fait appel comme c'est le cas à Boumerdès”, a encore ajouté Me Brahimi et d'ajouter que “le CGS a déclaré dans un rapport remis au juge d'instruction qu'il serait subjectif et non justifiable d'évaluer la responsabilité des dégâts aux erreurs des hommes par rapport à celle du séisme”. Me Brahimi a révélé qu'un bureau d'études américain avait averti sur la forte sismicité de tout le nord du pays, mais ce dernier n'a tenu compte que le 28 juin 2003 soit un mois après le séisme. M. T.