Complètement ignoré chez nous et peu de consommateurs d'ailleurs le savent, pourtant à regarder les chiffres qui marquent son évolution sur le marché français, on est frappé par l'importance des ventes réalisées : 120 millions d'euros en 2005 contre 70 millions l'année précédente, au point où une quinzaine commerciale lui a été consacrée en France, en mai dernier. Sous l'appellation de « commerce équitable » est née une nouvelle pratique dans les échanges internationaux. A son origine, des militants d'ONG proches des populations des pays émergents qui, scandalisés par les conditions imposées aux petits et moyens producteurs, ont imaginé une formule consistant à mettre en pratique la vente directe aux consommateurs. ll fallait d'abord convaincre les producteurs sur le profit qui leur reviendrait en évitant les multiples intermédiaires qui intervenaient dans les circuits qui mènent à la commercialisation aux consommateurs, mais aussi mettre fin aux inhumaines méthodes de travail imposées aux ouvriers exploités dans la totale ignorance des assouplissements que connaissent des pays où existe un droit du travail proche des règles fixées par les institutions internationales. Sans parler de l'absolue nécessité de mettre fin définitivement au travail des enfants, en vogue dans les pays en développement. Sous ces conditions, les initiateurs prendront en charge la mise en place de circuits de commercialisation ne faisant intervenir que les seuls intermédiaires vraiment utiles dans des domaines que les producteurs ne peuvent prendre en charge : conditionnement, transport… et, en fin de chaîne, traiter directement avec le vendeur en contact direct avec le consommateur, le but étant de se rapprocher au mieux possible de la devise « du producteur au consommateur » avec ce que cela comporte comme avantages pour les petits et moyens producteurs ainsi que pour leurs travailleurs. Par ailleurs, des firmes, sous des marques spécialement créées à des fins de marketing se sont lancées dans le commerce équitable : Lobodis, Alter Eco, Malongo, Max Havelaar, etc. Des grandes surfaces, comme Carrefour, se sont mises de la partie avec des produits commercialisés sous leur propre nom et appuient leur publicité par des phrases explicatives qui en disent long : le commerce équitable « intègre les droits de l'homme et la préservation de l'environnement et favorise le développement et l'autonomie des producteurs et des travailleurs défavorisés des pays du Sud en leur assurant des débouchés commerciaux à des conditions équitables ». Si à l'origine c'est le café qui a été le premier produit équitable (aujourd'hui il ne représente pas plus de 50% des marchandises du secteur), on compte à présent en France une quarantaine de marques dont 17 ont fait leur entrée en 2006. Le textile n'est pas en reste. II cible tout spécialement le coton auquel s'intéressent de grandes marques : Armor Lu, Celio, Kindy, Rica Lewis, la Redoute, Etam, etc. La haute couture ne dédaigne pas « l'équitable » et de nouvelles griffes haut de gamme comme la marque de tee-shirt en coton connue sous le nom de Monsieur Poulet. Avec le concours du célèbre styliste Adam Love qui a collaboré avec de grands noms de la mode comme Karl Lagerfeld, des griffes de haut luxe envisagent de s'engager en raison du prix remarquablement faible du coton « équitable ». Sur la variété des produits qualifiés « équitables », on trouve, en plus du café, des jus de fruits (pour la plupart issus de l'agriculture biologique), des petits déjeuners chocolatés, du sucre roux de canne, des confitures du miel du chocolat, du thé vert, du riz et même des fleurs en forme de magnifiques bouquets de roses. Une multitude d'autres produits relevant entre autres de l'hygiène et beauté (cosmétiques) à base de matière naturelle, des meubles de jardin... ont fait récemment leur entrée dans le commerce « équitable ». Selon une information de presse française, la banane bio labellisée est la gagnante de toutes catégories avec 36% de parts de marché en volume en grande surface. Une question vient tout naturellement à l'esprit : « A quand les produits équitables en Algérie ? » Tout naturellement, la réponse spontanée sera : « pas pour demain ». Nos importateurs sont pour la plupart « spécialisés » dans des secteurs d'activité où ils ont leurs habitudes, leurs « petites entrées »... Que viendraient-ils faire dans cette galère, dirait Molière. A moins qu'un nouveau venu soit pris soudainement d'une bonne pensée : puisqu'il n'y a encore personne dans le secteur, pourquoi ne pas l'occuper ? Pour celles et ceux qui souhaiteraient en savoir plus : www.commerceequitable.org (pour comprendre les bases, les buts du commerce équitable).