Mégaphone en évidence, le Ministère des affaires populaires (MAP) est un groupe de rap lillois qui a choisi de porter haut la voix des prolos. Rien de ce qui touche la France des banlieues ne les laisse indifférents. Pourquoi le choix d'un tel sigle ? « Parce que UMP était déjà pris », vous répondront, tout sourire, ceux qui ont délocalisé un ministère dans le Nord. Saïd alias Dias, l'Algérien, Lillo de naissance, a réuni autour de son projet « citoyen », un violoniste, Hacène, un accordéoniste, Joffrey Arnone et un autre rappeur, Hk. Ce groupe fut sélectionné dans la catégorie découverte au Printemps de Bourges 2006. Depuis, le succès ne s'est pas démenti. En concert à la salle Ibn Zeydoun, à l'invitation du CCF d'Alger, les cinq potes, poètes, ne font pas dans la dentelle : un rap ouvrier, mêlé à un jeu d'accordéon formidable, constitue l'essentiel des ingrédients de MAP, rappelant une certaine France doucereuse. Le groupe qui a sorti l'album Debout là d'dans, en 2006, veut coller à l'image d'un rap-musette, à la manière de Java. Des refrains de chansons, comme celui Aznavour Je me voyais déjà en haut de l'affiche et Manich menna de chez nous, ont été repris par le groupe. Les gens s'étonnent de voir un groupe plein de couleurs comme le nôtre, rappelle Dias. Le résultat est tout le moins hallucinant avec des mélanges rappelant, par certains côtés, le raï de la côte oranaise. L'éclectisme est la méthode sur laquelle s'appuie ce groupe en s'inspirant des musiques du Nord. Les paroles des rappeurs sont également grinçantes. Florilège : « La France va mal : les fins de mois deviennent de plus en plus dures, le chômage, la précarité, les licenciements, le pouvoir d'achat en berne, la violence, la crise du logement, les discriminations, l'insécurité… Si la trouille et la panique te crispent, si le pessimisme t'anesthésie, si l'urgence et le stress te paralysent,(...). » Juste après, ils en appellent à ces jeunes dont les espoirs ont fondu comme neige au soleil : « Bref... si t'as le moral à zéro et que t'as envie de faire un p'tit break, souffler deux minutes, refaire le monde autour d'un p'tit thé, alors bienvenue chez toi, ici, tu pourras partager un bon repas chaud au coin du feu entre p'tites gens qui s'comprennent, au menu : de la chorba, du ch'ti cola, et du respect… » Le groupe peut étonner, malgré ces « clins d'œil franco-français »