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« L'accession de l'Algérie à l'OMC n'offre guère de perspectives à court terme »
Trân Van Thinh Paul. Ambassadeur et spécialiste des questions de développement
Publié dans El Watan le 15 - 10 - 2007

Trân Van Thinh Paul a été le premier ambassadeur de la Commission Européenne. Il était accrédité auprès de l'Office des Nations-Unies à Genève et auprès du GATT/OMC de 1979 à 1994. Tout au long de sa carrière, il a négocié au nom de l'Union Européenne 82 accords bi et multilatéraux, dont l'Accord de Marrakech de 1994 créant l'O.M.C. L'Ambassaseur Trân est spécialiste des problèmes du développement et est connu pour son militantisme pour la cause des pays en développement.
Vous avez été pendant 16 ans l'Ambassadeur de l'Union Européenne auprès de l'OMC, quel est , à votre avis , l'intérêt pour un pays mono-exportateur comme l'Algérie à entrer à l'O.M.C. ?
La mondialisation des économies, désormais irréversible avec ses effets bénéfiques et maléfiques, rarement bénins, laisse présager une gouvernance à l'échelle planétaire inéluctable à terme, ne serait-ce que pour éviter la destruction de notre planète. Dans les années 70, l'Algérie avec la Yougoslavie avaient même lancé l'idée de la création d 'un "nouvel ordre économique international " : c'était à la Conférence d'Alger de 1973. Pour l'heure, au niveau politique fondé sur la souveraineté des Etats, depuis 1945 la Charte de San Francisco est l'instrument constitutif de l'Organisation des Nations Unies qui compte 192 Etats membres parmi les 209 Etats souverains de la Planète Terre. Sur le plan du commerce, l'Organisation Mondiale du Commerce dont l'origine remonte à la Charte de La Havane de 1947 (Conférence des Nations Unies sur le commerce et l'emploi) régit les échanges commerciaux entre ses 151 membres sur la base des règles négociées : cadre de négociation par excellence, l'O.M.C constitue un Etat de droit multilatéral comportant un mécanisme de règlement des différends. L'Algérie bénéficie actuellement du statut d'observateur dans cette enceinte en compagnie de 29 autres pays dont la Fédération de Russie, l'Iraq, l'Iran, la Jamahiriya arabe libyenne, l'Afghanistan, le Liban… qui préparent et négocient leur adhésion. Pour relever le défi de la mondialisation qui implique l'interdépendance croissante des économies, l'Algérie gagne, en tout état de cause ne serait-ce que pour éviter d'être marginalisée, à accéder à l'O.M.C. pour bénéficier des droits découlant de l'Etat de droit commercial multilatéral,en contrepartie des obligations générales résultant des règles en vigueur ainsi que des obligations spécifiques découlant de la négociation d'adhésion en cours et à venir. L'adhésion à l'O.M.C. ne sera pas l'aboutissement d'un processus mais le point de départ d'une restructuration économique, législative et réglementaire au niveau national. L'appartenance à l'O.M.C. offre en effet à l'Algérie un cadre de référence multilatéral pour stimuler sa croissance, pour définir comme pour gérer sa politique commerciale et sa politique économique, tout en évitant les dérives toujours possibles et tentantes. Quant au qualificatif mono exportateur, voici quelques remarques rapides : les ressources d'hydrocarbures ne sont pas inépuisables et de toute façon l'Algérie n'a pas vocation à rester un pays mono exportateur. En effet le peuple algérien, surtout sa jeunesse, possède le potentiel et la capacité pour produire, dans une économie dynamique et diversifiée, de la richesse matérielle dans le domaine des marchandises et immatérielle dans celui des services.
A quel niveau est arrivée l'Algérie dans ses négociations avec l'O.M.C. ? D'après vous, quelle est la date prévisionnelle de son accession à cette organisation ?
Depuis 20 ans l'Algérie est en négociation par intermittence. Le Groupe de travail de l'accession de l'Algérie a été établi le 17 juin 1987. Son président actuel est l'Ambassadeur Guillermo Valles Galmes d'Uruguay. Actuellement ce groupe est composé des membres suivants : Argentine, Australie, Brésil, Bulgarie, Canada, Chine, Communautés Européennes et Etats membres, Croatie, Cuba, Egypte, Etats-Unis, Inde, Israël, Japon, Malaisie, Maroc, Mexique, Nouvelle Zélande, Paraguay, Pologne, Qatar, République de Corée, République kirghize, République slovaque, République tchèque, Suisse, Taipei chinois, Thaïlande, Tunisie, Turquie, Uruguay, Venezuela. Ce groupe s'est réuni pour la première fois en avril 1998. Les négociations bilatérales en matière de concessions d'accès aux marchés sont toujours en cours sur la base d'offres révisées concernant les marchandises et les services. L'examen multilatéral du régime du commerce extérieur est toujours en cours. La 9ème réunion du Groupe a eu lieu en octobre 2005. Un projet de rapport révisé du Groupe a été distribué en juin 2006. En l'état actuel de la négociation, il n'est pas possible d'en prévoir l'issue et il n'est pas avisé de prendre le risque d'en prédire la conclusion dans le temps.
Des investissements importants ont été réalisés ces dernières années dans le secteur de l'industrie pharmaceutique nationale . Les fabricants locaux à travers l'UNOP et le SAIP demandent aujourd'hui une protection de la fabrication locale pour une période de transition qui leur permettra à terme de faire face à la concurrence internationale, est-ce une démarche possible et compatible avec les règles de l'O.M.C. ?
Les investissements réalisés, surtout en R&D ( recherche et développement-ndlr), ont toujours besoin de suffisamment de temps pour permettre à la production nationale de se mettre à niveau pour être en mesure d'affronter la concurrence. Le développement de la production nationale dans le secteur pharmaceutique contribue à la création de l'emploi et à l'amélioration de la balance commerciale. En l'occurrence, la production nationale trouve sa légitimité dans la politique de santé publique au-delà de la politique industrielle. Un équilibre entre cette légitimité et les obligations au titre de l'O.M.C devrait pouvoir être trouvé dans la négociation. L'industrie algérienne du médicament souffre en effet de la dépendance extérieure excessive (80% des médicaments sont importés) alors que les pays voisins du Maghreb (Tunisie et Maroc) couvrent leurs besoin à hauteur de 70%. Cette dépendance est extrêmement préoccupante à tous égards car elle constitue une véritable bombe à retardement. Il faudrait, comme en Tunisie, au Maroc et également en Turquie, en Egypte, au Pakistan, et autres pays similaires, un cadre réglementaire pour développer les capacités locales de production de façon à couvrir au moins les ¾ des besoins. En tout cas, une période de transition appropriée parait souhaitable à défaut de tout autre instrument pour développer et rentabiliser l'outil industriel déjà en place en direction de la production nationale de génériques à bas coût. Il convient de rappeler que l'Algérie est le seul pays africain qui dispose d'un véritable système de sécurité sociale. Ce système couvre 80% de la population et assure le remboursement de la majeure partie des dépenses des assurés en médicaments. Le remboursement des médicaments importés correspond dès lors au financement public indirect du profit des firmes étrangères. Toute croissance du développement national algérien de la "conception et/ou invention" d'éléments nouveaux constitutifs de produits pharmaceutiques susceptibles de protection au titre de la propriété industrielle et intellectuelle serait donc souhaitable. Un tel développement au niveau national permettrait ainsi de constituer un patrimoine de droits immatériels y afférents notamment, la protection des inventions de molécules au titre de brevets, protection des noms de médicaments déposés à titre de marques, protection des logiciels servant à la fabrication et à l'exploitation de ceux-ci au titre du droit d'auteur ou copyright, protection des bases de données au titre du droit d'auteur et d'un droit sui generis, protection de savoir-faire et de secrets de fabrique à différents titres, selon la stratégie commerciale propre à l'entreprise. Dans ce contexte, les effets pervers de la mondialisation ne peuvent être ignorés. Depuis les années 80, la mondialisation financière a modifié la morphologie, la structure, la stratégie des grandes entreprises : le développement du recours à la sous-traitance, l'actionnariat diversifié pour répartir les risques, les délocalisations … finissent par concentrer les aléas et les risques sur l'emploi salarié. La conséquence est par exemple qu'un logiciel coûte moins cher à produire qu'à concevoir. Dans le secteur pharmaceutique, le plus difficile est de découvrir une molécule innovante. Le coût de la fabrication du médicament est infiniment plus faible que l'amortissement des investissements de recherche/développement (R&D) qui est répercuté dans le prix des médicaments sous licence ou sous brevet. L'un des enjeux majeurs des pays du Sud est de pouvoir contribuer à leur tour à la production immatérielle et ainsi de devenir des concepteurs et inventeurs…. L'O.M.C en promouvant le recours à des mécanismes nouveaux de règlements des différends commerciaux devrait contribuer à rétablir un meilleur équilibre entre les nations partenaires.
Certains hauts responsables insistent sur le fait qu'il faut attendre l'accession de l'Algérie à l'OMC pour mettre en place des mesures de soutien pour les industriels. Qu'en pensez vous ? Accéder d'abord à l'O.M.C. et après seulement mettre en place des mesures de soutien ? Et si les mesures de soutien étaient incompatibles avec les règles et les obligations générales ainsi que les conditions particulières négociées ?
Une fois l'accession acquise, il n'y a plus de marge de manœuvre pour négocier des flexibilités particulières. Les seules encore réellement possibles le seront dans le cadre des cycles multilatéraux tels que celui de Doha. En ce sens, le protocole d'accession qui constitue le texte par lequel l'accession prend effet de manière définitive, est un cadre contraignant et non flexible. Il est difficile, voire impossible, de revenir sur des mesures acceptées par tous les membres et validées. Cela dit, une négociation est une négociation : en d'autres termes, les écarts temporaires sont potentiellement possibles dans des limites raisonnables en contrepartie de concessions à convenir !
Depuis 2005, l'Algérie a procédé à une large ouverture de son marché afin d'adhérer à l'O.M.C., n'aurait il pas été possible de négocier un calendrier à cet effet afin de minimiser la durée de cette période qui met les jeunes industries algériennes en péril ?
Les perceptions extérieures de cette ouverture du marché algérien sont mitigées surtout dans les services. Dans le cadre de l'accession, une telle ouverture gagnerait à faire l'objet de négociations en tant que composante du paquet global et dès lors à ne pas précéder l'accession. Les critères et conditions d'accession à l'O.M.C. subissent des évolutions. Les membres de l'O.M.C., surtout les grandes puissances commerciales, disposent d'un pouvoir discrétionnaire (dont l'exercice que les géniteurs de l'O.M.C., dont moi-même, considèrent comme de plus en plus excessif, voire arbitraire) pour obtenir des nouveaux membres et des candidats des conditions bien au-delà des obligations et des dispositions contenues dans les accords existants. En fin de compte c'est une affaire de négociation, y compris pour nouer des "alliances" et pour faire valoir une stratégie de développement et, en l'occurrence, une politique de santé publique. Même l'arbitraire reste sensible au bon sens. En clair, certaines obligations ou concessions (par exemple tarifaires ou ouverture du marché des services) devraient pouvoir bénéficier de périodes de transition, sinon convenables, du moins raisonnables.
Quel rôle tient l'Union Européenne quant à l'aboutissement du processus d'adhésion de l'Algérie à l'O.M.C. ?
L'Union Européenne en tant que telle et comme les Etats membres, sont concernés. La Commission Européenne en particulier, est tout à fait consciente des enjeux en termes de développement économique et social et, dans le cadre de la politique de voisinage et de partenariat, la Commission souhaite que la négociation progresse. Mais en tant que citoyen européen et connaisseur, je milite pour un bien meilleur équilibre des avantages et des sacrifices entre les deux rives méditerranéennes. Au-delà des aléas et des variations conjoncturelles de l'Histoire, la rive sud de la Mare Nostrum porte le poids de la sécurité d'Europa et conditionne le rayonnement de la Pax Europea, première brique de la paix universelle. Ni rêve ni utopie, simplement une vision géopolitique anticipée.
Dans quelle mesure la nature des accords entre l'UE et l'Algérie rend difficile les négociations d'accession à l'O.M.C. avec d'autres pays ?
L'accord d'association entre l'Algérie et l'Union Européenne, en vigueur depuis septembre 2005 établit progressivement une zone de libre-échange à l'horizon de 2017. L'Union Européenne n'a pratiquement plus rien à négocier au plan bilatéral avec l'Algérie sur l'accès au marché des marchandises dans le cadre de l'accession à l'O.M.C. Par contre, il reste à négocier dans le domaine des services, et c'est une question délicate et difficile au-delà du traitement au titre de l'Accord Général sur le Commerce des Services de l'O.M.C. En principe, il n'existe pas de raisons qui rendent plus difficile la négociation de l'Algérie avec d'autres membres de l'O.M.C. du fait de son accord d'association avec l'Union Européenne. Dans la pratique, l'Algérie rencontre des difficultés pour faire une offre révisée notamment dans le domaine des services.
Quelles sont les chances de l'Algérie d'accéder à l'O.M.C. avant l'aboutissement du cycle de Doha ?
L'achèvement du cycle de Doha reste chargé d'incertitudes en dépit d'une récente éclaircie plutôt prometteuse alors que la négociation d'accession de l'Algérie, figée pour le moment, n'offre guère de perspective à court terme.
On demande à l'Algérie d'aligner ses prix énergétiques sur ceux pratiqués sur le marché international. Quel est votre commentaire ?
Compte tenu de ce qui s'est passé pour l'accession de l'Arabie Saoudite à l'O.M.C., votre affirmation n'est pas exacte : les membres de l'O.M.C. acceptent que l'énergie soit vendue sur le marché intérieur du pays producteur à un prix inférieur au cours mondial, mais à la condition : que le prix ne soit pas inférieur au coût de production national, qu'il n'y ait pas de discrimination entre le prix pratiqué pour les entreprises nationales et les entreprises étrangères et que ce prix s'applique à tous les consommateurs. En conclusion, les difficultés sont bien sûr réelles. Mais est-il avisé de les utiliser comme justifications pour le blocage ? Il y a des marges dans la négociation. Il faut les utiliser systématiquement , avec perspicacité . Les positions affichées des partenaires sont certes intéressées, voire exagérées, dénuées de vision de coopération, mais elles ne sont pas intangibles. L'adhésion à l'OMC est à la portée de l'Algérie : c'est une affaire de volonté.


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