Le moment fut choisi exprès : c'est jour pour jour que la Bataille de Paris s'est déroulée. Les Forces du préfet de Paris Maurice Papon ont réussi, ce 17 octobre 1961, à mater le mouvement, mais non à en réduire l'ampleur. Le concert d'Akli Yahiatène donné au Théâtre de Verdure rappellera la figure de l'étranger en terre hostile. El Menfi, que d'aucuns considèrent comme l'une des chansons les plus représentatives de la chanson de l'exil, rappelle les souffrances endurées par les immigrés algériens dans l'Hexagone, immigrés que l'on s'efforce de présenter comme des gens qui ont vécu un exil douillet. Le moment fut émouvant et les réminiscences fortes parmi un public qui a eu à souffrir de cette habitude qui a la peau dure : le concert de Akli Yahiatène a commencé avec plus d'une heure de retard. Le répertoire de l'artiste qui est resté à l'écoute de sa société est sur toutes les lèvres. Lvaz (1963), Tamurt iw (1965), Elfiraq (1966), Am inigh awal (1968), Zrigh zin di Micheli, Ya lmoudjareb furent l'un de ses grands succès. Jahagh bezaf d'Ameziane résume le parcours de celui qui a fait que la chanson de l'immigration ait l'écho voulu. Qui de ceux qui ont connu les privations de l'exil ne l'ont pas fredonnées ? Akli Yahiatène est de ceux dont on a toujours évoqué le courage lorsque l'on sait que les thèmes qu'il a abordés ne furent pas faciles dans une société conservatrice. Ce natif d'Aït Mendès à Boghni a pris les chemins de l'exil tout jeune. Il fera ses classes parmi les immigrés et fera l'expérience du déracinement et de l'abandon des siens. Seul endroit où peut reprendre confiance ce jeune, les cafés où il s'est frotté à beaucoup d'artistes. Slimane Azem, Zerrouki Allaoua, Cheikh El Hasnaoui furent ces artistes qui l'on toujours marqué. Toujours bon œil bon pied et l'esprit vif, Akli Yahiatène doit aussi beaucoup à Amraoui Missoum, grand musicien et chef d'orchestre. Sans ce kabylisme de mauvais aloi que l'on remarque chez d'autres artistes, Yahiatène chantera en arabe dialectal qui a fait que les auditeurs des régions arabophones l'ont adopté.