Distante pourtant de 7 km du chef-lieu de la commune de Bordj Ghedir, la bourgade de Ouled Sillini donne l'impression d'être un no man's land livrée à elle-même, elle vit complètement en marge du développement. Le fameux plan d'aide à la relance économique n'a pas profité du tout à cette région et ses 5 000 habitants en rade, des décennies durant. Elle est située sur un pic montagneux, difficilement accessible, et est connue pour son relief rocheux, ses chemins qui montent, ses rivières qui ruissellent à longueur d'année, et surtout ses monts qui rappellent ceux du Hoggar dans l'extrême sud du pays. Comme si la nature intervenait pour compenser les insuffisances dues à la léthargie humaine et la marginalisation dont souffre cette population, condamnée à vivre dans la misère et le dénuement total, « les élus, on ne les voit qu'une fois tous les cinq ans ; ils viennent solliciter nos voix en promettant monts et merveilles, qui s'avèreront par la suite des chimères », dira un sexagénaire qui vit avec sa famille, comme tant d'autres, dans des ghettos, puisque l'aide, dans le cadre de la construction rurale, ils n'en entendent jamais parler. Les gourbis éparpillés ça et là, et qui rappellent l'ère coloniale, corroborent quelque part ses dires. Il a fallu plus de trois quarts d'heure pour parcourir les 7 km qui séparent le chef-lieu du douar, compte tenu de l'état piteux et rocailleux de la piste. Quand il pleut, les habitants retiennent leur souffle, la menace des crues est omniprésente, les dernières en date sont venues à bout de tous les ouvrages d'art dont la réalisation ne répond pas aux normes ; du coup ils se sont écroulés, pour certains ensevelis, d'autres laissent apparaître un fatras de béton. Les misères de la dechra ne se limitent pas au problème du chômage, à l'éclairage public inexistant, à la corvée d'eau pour laquelle la population doit consacrer des heures entières pour s'alimenter à partir d'un abreuvoir, au même titre que le bétail, dira avec amertume un autre citoyen. Depuis deux mois, l'eau n'a pas coulé dans les robinets des deux fontaines destinées à étancher la soif de la population. Renseignements pris, les services concernés n'ont pas daigné réparer la pompe du captage, nous dit-on.Cette situation, qui n'a que trop duré, a contraint les villageois à faire le déplacement au siège de la wilaya, où ils ont été reçu par le chef de cabinet. Ce dernier s'est engagé, nous dit-on, à prendre en charge leurs doléances. Cependant, les habitants croient dur comme fer que cette hogra résulte de l'absence de représentativité à l'APC. En effet, seule une virée dans ce coin perdu, comme l'appellent ses habitants, pourra renseigner sur les conditions inhumaines dans lesquelles vivote la population de Ouled Sillini, où dans chaque foyer on compte des chômeurs et encore une fosse septique, un véritable retour vers le passé. En attendant, les villageois continuent d'entretenir l'espoir, néanmoins ils interpellent les autorités, en interrogeant : « Qu'a fait l'Etat pour maintenir la population sur place ? ». Les opportunités de travail sont inexistantes, d'où la disette d'argent et son corollaire, même les nouvelles formules de recrutement dans le cadre de l'emploi de jeune (ESIL, filet social), bien que générant un maigre revenu devant maintenir ces oubliés de la société en vie, tardent à venir. Des pères de famille et des jeunes en âge de travailler vivent dans le désarroi et ne savent même pas de quoi il s'agit. Enfin, le seul secteur qui pourrait donner un brin d'espoir demeure l'agriculture, malheureusement, rien n'a été fait, s'accordent à dire les citoyens, pourtant l'arbre fruitier demeure le seul projet qui pourrait aboutir vu la nature du sol, néanmoins les villageois évoquent les entraves bureaucratiques et le fameux papier de propriété qui les a privés de toute aide, même de celle de l'habitat rural.