Les accidents de travail se multiplient dans l'ensemble des secteurs et les mesures de prévention restent encore insuffisantes au niveau des entreprises. Le nombre de décès suite à ces accidents prend de l'ampleur. Les chutes représentent environ 40% des accidents graves et mortels. Le thème a fait l'objet hier d'un séminaire organisé à l'hôtel Mercure par l'Organisme de prévention des risques professionnels dans les activités du bâtiment, des travaux publics et de l'hydraulique (OPREBATPH). Les organisateurs ont tiré la sonnette d'alarme sur l'ampleur du phénomène. 126 travailleurs sont décédés en 2006 suite à des chutes dans tous les secteurs d'activités dont 92 sont imputables au bâtiment. Ce chiffre présenté par la Caisse nationale des assurés sociaux (Cnas) n'est que la partie visible de l'iceberg. Ces chutes mortelles se produisent essentiellement à partir d'échafaudages ne répondant pas aux normes de sécurité dans les 50% des cas et à partir de planchers d'étage en bordure du vide ou de terrasses de bâtiment non protégées à 35%, selon Chérif Abdmeziem, directeur l'OPREBATPH. Le reste des chutes, soit 15%, est imputable à des échelles bricolées et à des ouvrages divers. Pour le directeur de la prévention à la Cnas, M. Mezaâche, la tendance des accidents dus à des chutes va crescendo. Ces cinq dernières années, ces accidents ont coûté à la Cnas 1 milliard de dinars, tandis que les versements payés aux indemnisés ont atteint, durant la même période, 282 millions de dinars. Le directeur général de l'OPREBATPH affirme que les textes réglementaires régissant l'hygiène et la sécurité en milieu professionnel ne manquent pas. « C'est l'application qui fait réellement défaut. Les travailleurs sont livrés à eux-mêmes sur des chantiers où les mesures de sécurité sont quasiment inexistantes et nos recommandations ne sont pas prises en compte. » Il a précisé que le secteur du bâtiment demeure un secteur à haut risque où les chutes sont fréquemment enregistrées et souvent mortelles. Il déplore l'inexistence de protection collective, « pas de plateforme de travail dans les pylônes, ni de lignes de vie dans les échelles pour accès aux différents niveaux, pas de points d'ancrage. Sur les terrasses d'immeubles, pas d'acrotère normalisé. Pas de points d'ancrage pour sécuriser le personnel dans les nacelles. Celles-ci n'ont aucun dispositif de secours. Souvent, les fins de course sont shuntées. C'est pour toutes ces raisons que l'OPREBATPH a organisé ce séminaire qui a pour objectif la sensibilisation des participants sur les moyens à mettre en œuvre pour une prévention accrue des accidents dus aux chutes sur les chantiers du BTPH », a-t-il souligné en interpellant les différents acteurs pour que la réglementation ainsi que les différents dispositifs de sécurité et de prévention soient appliqués. Syndicats d'entreprises, médecins du travail, inspection du travail, CNAS, experts nationaux et internationaux ont posé lors de ce séminaire la problématique et ont rappelé les dispositions réglementaires pour assurer une meilleure prévention de tous ces accidents. Selon M. Chérif, trois modes de prévention sont normalement préconisés. Il s'agit de la prévention intégrée, une forme qui doit être, selon lui, la plus privilégiée, la prévention collective et la prévention individuelle. Ainsi, les travailleurs doivent porter des harnais de sécurité. Ces derniers doivent être attachés à des points solides de la construction. Les intervenants recommandent aussi l'utilisation d'un matériel conforme aux normes et les travailleurs doivent être formés et informés de tous les risques auxquels ils peuvent être confrontés, notamment ceux qui concernent les travaux en hauteur. Les échafaudages doivent être vérifiés par une personne compétente surtout après une période de mauvais temps ou une interruption prolongée de travaux avant l'utilisation. Les cordages et câbles de suspension doivent être utilisés avec des moufles ou des treuils appropriés. Un bon programme de prévention des chutes passe, selon les participants, par l'identification des risques de chute, la mise en application d'une politique d'entreprise, la sélection et l'utilisation d'équipements ou de dispositifs et un programme de formation adapté et approfondi portant, entre autres, sur le sauvetage. La mise en place d'une stratégie nationale de lutte contre les chutes constitue aujourd'hui une urgence, selon les experts. Une série de recommandations sont alors soumises à l'adoption. Il s'agit, en premier lieu, du renforcement des dispositions réglementaires sur les échafaudages, les échelles, les plateformes de travail, les équipements de protection individuelle et les conditions de leur utilisation. Les participants au séminaire recommandent aussi le renforcement des actions de contrôle de l'application des dispositions législatives et réglementaires, contribuer à l'information des travailleurs, notamment les nouveaux embauchés aux risques des chutes et la mise en place du système incitatif de modulation des taux de cotisation des bonus-malus prévu par la réglementation en vigueur pour encourager les entreprises qui font des efforts de prévention et sanctionner les autres par un relèvement de leur taux de cotisation. Pour rappel, durant l'année 2005, le nombre d'accidents de travail avoisinait les 46 000 cas, dont 700 ont été mortels. Dans la majorité des cas, les victimes sont contraintes à l'arrêt de travail. Plus de 1 million de journées de travail ont été accordées pour cause d'accidents.