Les candidats têtes de liste susceptibles de suppléer le maire sortant d'Oran (qui s'est représenté sur la liste FLN avec une nouvelle équipe) redoublent d'efforts pour mener une campagne à la hauteur des défis qui les attendent une fois élus dans une commune qui compte un million d'habitants (chiffre prévisionnel communiqué par l'APC). Ils sont quatre partis à avoir le privilège de se mesurer au FLN, détenteur de la majorité, qui a placé Nouredine Boukhatem à la tête de cette APC. Si on devait tenir compte des scores réalisés lors des législatives de mai dernier, le FNA apparaîtrait, après une percée inattendue, comme la deuxième force politique à l'échelle de la wilaya avec trois (sur quinze) sièges acquis à l'APN. Seulement, reconnaît Salim Fekir, tête de liste, « ce n'est pas dans la commune d'Oran que les meilleurs scores ont été réalisés et il s'agit justement pour nous de relever un défi ». En termes de gestion, cet ancien élu FLN déçu sait de quoi il parle pour avoir déjà fréquenté les coulisses de l'hôtel de ville. « Le système mis en place est tellement rigide qu'il ne laisse presque pas de marge de manœuvre, mais avec notre expérience, nous allons essayer de minimiser le mal autant que possible. » Il trouve anormal qu'une commune comme Oran se retrouve chaque année déficitaire ou qu'elle vive avec des subventions de l'Etat. « On a ôté le bénéfice des taxes du port qui générait près de 80 milliards de centime et les VF pour près de 90 milliards et, aujourd'hui, les charges obligatoires atteignent 160 milliards de centimes pour un budget qui tourne autour de 162 milliards de centimes », explique-t-il pour montrer les difficultés financières. Selon lui, donné à titre indicatif, le budget de chaque école existe mais au final les concernés ne reçoivent que des miettes. Profitant de l'ouverture jeudi d'un local avec baie vitrée donnant sur les arcades de la rue d'Arzew, la tête de liste du MSP a fait cette déclaration publique : « Il y a eu un mandat RND puis un mandat FLN. Maintenant le temps est venu pour un mandat MSP. » En réalité, le parti de Bouguerra Soltani a perdu beaucoup de terrain à Oran. Pour s'en convaincre, il suffit de se remémorer le fait que le candidat tête de liste du MSP pour les élections locales de 1997 a été intronisé symboliquement maire d'Oran par ses pairs des autres partis en lice, y compris le RCD à l'époque, lors d'une cérémonie également symbolique tenue à l'entrée du siège de la mairie. C'était pour protester contre la fraude supposée avoir entaché les élections. Aujourd'hui, c'est le spectre de l'abstention qui est le plus redouté. « Si nous avons la majorité, nous allons travailler avec les autres partis, car si on agit seul, il est évident que la ville restera telle qu'elle est aujourd'hui », explique M. Rezine (il est déjà un élu de cette APC) qui compte maintenant installer un conseil consultatif entre les douze secteurs urbains et la commune mère, mais aussi impliquer les intellectuels. Le MSP prône aussi la nécessité du bon accueil et de l'écoute des citoyens pour un meilleur développement de la localité. « Oran est sinistrée et orpheline et il n'y a pas assez d'hommes capables (ou qui ne veulent pas s'impliquer) de la prendre en charge. » C'est le discours qu'auraient tenu des notables pour inciter Henni Merouane à se présenter aux élections dans l'espoir de revenir aux commandes de la deuxième plus grande commune d'Algérie. « Dans les moments difficiles, j'ai accepté d'assumer les fonctions de DEC (délégué exécutif communal) et, aujourd'hui encore, j'ai répondu à l'appel de la société civile », explique cet avocat qui dit qu'il a analysé la situation avant de faire son choix. Pour lui, le FLN qui s'entre-déchire ne constitue pas un environnement favorable et c'est pour cela qu'il a répondu favorablement à la sollicitation du RND, un parti qu'il trouve structuré, cohérent, discipliné et dont le programme lui convient. Son objectif, s'il est élu à la tête de l'APC, sera de faire participer la société civile, par là il entend les comités de quartiers, de cités ou même d'immeubles. « Ceux-là ne demandent pas de subventions, au contraire ils interviennent, interpellent sur des problèmes concrets des citoyens et surtout ne caressent pas dans le sens du poil. Ils sont indispensables et il faut les encourager en les faisant participer à des réunions périodiques pour connaître leurs opinions. » De son passage à la tête de la commune, il évoque le fait qu'Oran était membre du réseau Medcité (méditerranéen) et qu'un audit a été effectué par la Banque mondiale, mais qui n'a pas été exploité. Il évoque également les trois projets décentralisés qui n'ont pas été menés à terme : l'incinération des produits pharmaceutiques, le renforcement du bureau d'hygiène et la mesure du taux de pollution. Ce dernier chapitre a été réactivé récemment. Le projet devant être financé à l'époque de la CEE ambitionnait de faire d'Oran une ville aérée avec des espaces verts, des terrains de jeu, etc. Pour la gestion future, l'ancien DEC est conscient que le budget est insuffisant mais, pour lui, « on peut jouer sur les dépenses pour les réduire ». Il atteste que la masse salariale représente en ce moment plus de 75% du budget alors qu'elle devrait être arrêtée à 34%, mais la solution qu'il propose passe par l'organisation et consiste aussi à se passer de l'achat de grosses voitures de prestige ou de gaspillage de carburant, de communications téléphoniques, etc. « A mon époque, nous avons par exemple emprunté à la BDL pour acheter 70 camions que nous avons remboursés par la suite. C'est pour dire que des solutions existent pour contourner les entraves financières », explique-t-il en insistant sur le facteur psychologique relatif à la dignité des ouvriers et des employés et l'attitude respectueuse que les responsables doivent adopter pour un meilleur rendement. Alors qu'il préconise de revoir le plan d'urbanisme, dépassé selon lui, il projette de créer un cadre d'échange intercommunal car la ville d'Oran dépasse aujourd'hui largement les frontières de sa commune. Les APC sont déchargées de l'épineux problème du logement (déplacé vers l'administration) mais Oran souffre toujours d'un goulot d'étranglement qu'est l'état civil dont la seule solution consiste en son informatisation. Dernier adversaire politique et de taille, le PT se lance pour la première fois dans les communales à Oran. L'actuelle tête de liste, Berkani Aziz, a déjà une expérience à l'APW. Le PT ne croit pas aux recettes des institutions financières internationales comme la notion de démocratie participative. « La souveraineté nationale pour garantir le développement local » est le slogan de campagne menée par Louisa Hanoune pour qui, « avant d'être détrônée par Annaba, Oran était la capitale des harraga, un phénomène qui traduit à lui seul le degré de démoralisation des populations dont les perspectives d'avenir sont annihilées par la situation paradoxale de la poursuite de la politique de fermeture d'entreprises et de pertes d'emplois, générant de plus en plus de maux sociaux ». Si pour le PT les solutions sont nationales, le combat pour les APC n'est cependant pas vain. « Nous allons faire revivre les entreprises communales dissoutes et aider de manière rationnelle celles qui sont en difficulté comme le transport, la régie communale de nettoiement, les entreprises de bâtiment, etc. », prévoit M. Berkani qui évoque tout de suite après le problème du vieux bâti. « Ce qui se fait en ce moment n'est pas la solution. Nous disons qu'il faut restaurer les monuments historiques mais il n'est pas question de débourser quatre fois le prix d'un immeuble neuf pour restaurer un immeuble d'habitation ancien. » Selon le même candidat, la commune d'Oran enregistre 92 000 demandes de logement et c'est pour cela que son parti ne s'engage pas à résoudre la crise de logement, mais il espère, avec l'aide des citoyens, arriver à arracher des quotas plus grands de logements sociaux. Le PT compte également revoir l'organisation des services de nettoiement décentralisés mais non efficaces et créer une entreprise communale de revêtement de la voirie, seule solution pour venir à bout des désagréments qui gênent la circulation sur la voie publique. Oran en Chiffres L'APC d'Oran gère 192 écoles, 28 marchés, 11 centres culturels fonctionnels, 3 salles de cinéma : Es-Saâda (ex-Le Colisée), El Feth (ex-Pigalle) et Le Maghreb (ex-le Régent, actuellement en rénovation) et une autre salle, moins équipée, l'Escurial, également en phase de réhabilitation. Elle gère également un théâtre de verdure (près de 2000 places, retapé), deux bibliothèques (Zabana et Bakhti Benaouda), un office des arts et de la culture qui remplace l'Association culturelle de la ville d'Oran (ACVO), une médiathèque, un conservatoire (Ahmed Wahbi, actuellement en réhabilitation) et une salle de danse. Les lieux de culte sont au nombre de 105 plus 6 en phase de réalisation. L'APC s'occupe également, avec un effectif de 117 personnes, de 26 infrastructures sportives dont 3 complexes, 10 terrains de football, 2 piscines, 9 salles de sport, 1 boulodrome et 1 hippodrome. La ville d'Oran compte 1900 immeubles de la catégorie vieux bâti dont 460 dans un état de dégradation avancée et plus de 90 000 demandes de logements.